1
M. de Montherlant, le sport
et
les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est considéré par
2
’exprimaient en une langue plus compliquée encore
et
nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet est
3
et esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ;
et
elle a donné naissance à la doctrine de M. de Montherlant, qui en est
4
M. de Montherlant, qui en est sortie toute formée
et
casquée pour la lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme
5
, se disputent le monde. L’une vient de l’Orient,
et
insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de la Réform
6
du christianisme, de la Réforme, de la Révolution
et
du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme
7
olution et du romantisme, les concepts de liberté
et
de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est
8
e catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme
et
le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l
9
n’a pas faite aussi franchement, du catholicisme
et
du christianisme, le christianisme étant dans le même camp que la Réf
10
la guerre encore contus de huit coups de griffes
et
chaud de l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de
11
vité le choc fatal pour tant d’autres du guerrier
et
du bourgeois. Dernièrement, il abandonna le stade et rentra dans le m
12
du bourgeois. Dernièrement, il abandonna le stade
et
rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre général,
13
œuré du désordre général, il cherche des remèdes,
et
nous tend les premiers qui lui tombent sous la main : le sport et la
14
premiers qui lui tombent sous la main : le sport
et
la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’es
15
é supérieure » l’antinomie de l’esprit catholique
et
de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-
16
me philosophie la morale jésuite, faite de règles
et
de contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’in
17
es imposées dans le but de restreindre la liberté
et
l’initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale q
18
reindre la liberté et l’initiative individuelles,
et
la morale des sports anglais, morale qui veut former des hommes maîtr
19
hommes maîtres d’eux-mêmes, c’est-à-dire libres.
Et
cela me semble d’autant plus paradoxal que M. de Montherlant est just
20
du sport n’est pas la performance, mais le style
et
la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Ma
21
ations, qu’on les appelle ou non idées générales,
et
j’avoue bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur le monde à la
22
s, un style de sportif, mais qu’on sent humaniste
et
poète, un style à la fois bref et chaud, imagé et réaliste, M. de Mon
23
sent humaniste et poète, un style à la fois bref
et
chaud, imagé et réaliste, M. de Montherlant chante cette « violence o
24
et poète, un style à la fois bref et chaud, imagé
et
réaliste, M. de Montherlant chante cette « violence ordonnée et calme
25
. de Montherlant chante cette « violence ordonnée
et
calme » des « grands corps athlétiques ». Sur le stade au soleil se d
26
Sur le stade au soleil se déploient les équipes,
et
l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît
27
le, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre »,
et
aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerr
28
que qu’infuse à son corps la douce matière. L’air
et
le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’
29
. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent,
et
il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre terre et ciel.
30
rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un
et
l’autre. Ainsi mon art, entre terre et ciel. Mais sa foulée, bondissa
31
entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre terre
et
ciel. Mais sa foulée, bondissante et posée, est pleine du désir de l’
32
entre terre et ciel. Mais sa foulée, bondissante
et
posée, est pleine du désir de l’air. Danse-t-il sur une musique que j
33
tion de la raison sur ce corps qui est exaltante,
et
c’est cette domination qui est le but véritable du sport. On accepte
34
ecte les règles, non plus comme une lutte sauvage
et
déloyale, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités
35
yale, la morale d’équipe devient toute la morale,
et
les qualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités d
36
plication de l’immense axiome formulé par Hésiode
et
qui gouverna le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout
37
urse d’équipe. Le cœur connaît la présence muette
et
sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le chef se dresse ent
38
as dites en vain. Stades que parcourent de jeunes
et
purs courages, donnez-moi votre silence jusqu’à l’heure. Que je taise
39
ins artificiellement moderne que ce lyrisme sobre
et
prenant : « Si l’on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On
40
lise romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant.
Et
voici, ô paradoxe, qu’il rejoint Kant, Kant qui écrit : « C’est sur d
41
eunes filles assez fortes pour pouvoir tout lire,
et
il n’y aura plus besoin de roman catholique. » C’est ce qu’on pourrai
42
ructive » : porter l’effort sur ce qui doit être,
et
ce qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à l’entr
43
de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme,
et
non plus seulement un homme de lettres. Un homme en qui s’équilibrent
44
ilibrent déjà l’enthousiasme d’une jeunesse saine
et
la retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le
45
ette « limitation » que lui ont enseigné le sport
et
les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ;
46
ment chrétienne de tel autre écrivain catholique.
Et
son lyrisme, encore un peu brutal, il saura le dompter, et atteindre
47
risme, encore un peu brutal, il saura le dompter,
et
atteindre au classicisme véritable. Voici un constructeur, un entraîn
48
véritable. Voici un constructeur, un entraîneur,
et
qui joue franc jeu. S’il faut lutter contre lui, nous savons qu’il ob
49
mplification ». a. « M. de Montherlant, le sport
et
les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, n° 1571, 9 février 192
50
iècle à nos jours. Partis du classicisme de David
et
d’Ingres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle,
51
e, pour aboutir enfin dans ces impasses : cubisme
et
futurisme. Les voici revenus, après cent-vingt-cinq ans, à peu près à
52
ines. Ils en reviennent chargés de chefs-d’œuvre,
et
plus conscients de leurs moyens d’expression. Très maîtres de leur te
53
te courbe de la peinture moderne avec une netteté
et
un relief remarquable. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à l
54
ortance de telles prises de contact entre artiste
et
public ? b. « Conférence Meili », Feuille d’Avis de Neuchâtel, n° 2
55
rt… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques.
Et
voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de parti
56
ues. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre
et
aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terriblement l
57
g. Tout cela s’est purifié dans le Chant funèbre.
Et
une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas nous tromper en n
58
bref soupir s’y résignent, puis tablent sur eux,
et
d’autres qui tiennent qu’une telle attitude est responsable de ces ca
59
te sorte, les soldats déjà légendaires de Verdun,
et
ce « haut ton de vie » qu’ils trouvaient au front. D’une phrase, il j
60
« Ranimons ces horreurs pour les vouloir éviter,
et
ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’est-ce pas une éclata
61
dre ». N’est-ce pas une éclatante mise au point ?
Et
venant de l’auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent »
62
Mais Montherlant se redresse vite, frappe du pied
et
repart. Vers quels buts ? On verra plus tard. L’urgent c’est d’avance
63
s ? On verra plus tard. L’urgent c’est d’avancer.
Et
l’on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contrair
64
Il va chercher le souvenir de l’aventure antique,
et
dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuv
65
eaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable
et
qu’il lui faudra livrer au « feu de vérité » qui brûle dans son templ
66
ple intérieur, s’il veut rester digne de son rôle
et
vraiment le coryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de tou
67
humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle
et
désolée comme cette « flamme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont.
68
n (B. Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mars 1925, p. 380-382.
69
a moins que la significative pauvreté idéologique
et
morale qu’il révèle. Le style brillant et elliptique qui tend à deven
70
logique et morale qu’il révèle. Le style brillant
et
elliptique qui tend à devenir notre poncif moderne, — si propre à éga
71
une fortuite coïncidence entre l’univers du poète
et
le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poèmes qui devraient m
72
ur une grande part dans l’« alchimie du verbe » ;
et
je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de préméditation… À quoi sert,
73
du Sagittaire, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, juin 1925, p. 775-776.
74
onnu bien d’autres de ces jeunes gens prétentieux
et
sincères qui se croient une vocation, végètent dans des œuvres d’évan
75
choisi un être de cette espèce pour le tourmenter
et
le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y a quelque cho
76
, il ne restera plus que les flammes, les soleils
et
aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Col
77
gh (F. Rieder, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, août 1925, p. 1033.
78
guère en province liquider des stocks américains.
Et
ses romans, c’est aussi une liquidation : les faits s’y pressent et s
79
st aussi une liquidation : les faits s’y pressent
et
s’y bousculent ; de temps à autre une notation d’artiste ou de psycho
80
n en trois volumes sans y laisser des maladresses
et
des négligences. Mais on ne demande pas non plus au puissant boxeur s
81
en train de redevenir serfs, serfs des syndicats
et
des capitalistes des villes. Mais dans une de ces provinces du Midi o
82
and roman : autour d’un sujet de vaste envergure,
et
brûlant, une intrigue puissante, des personnages d’une belle richesse
83
ois, une certaine harmonie générale dans le récit
et
le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que
84
aire. Mais le tissu des faits se relâche parfois,
et
les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou
85
ine puissance. Il reste que Lucien Fabre a tenté,
et
en somme, réussi, une entreprise bien téméraire de nos jours : un rom
86
ramagnou (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1151-1152.
87
e manifeste son génie méthodique, son universelle
et
inépuisable curiosité. Mais, de même que la France interrogeant l’Eur
88
erling, les Guénon, qui les font entendre, autant
et
plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, i
89
les font entendre, autant et plus que les Tagore
et
les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que
90
êtés se font de l’Orient une représentation vague
et
poétique. « Orient…, toi qui n’as qu’une valeur de symbole », a dit A
91
dit A. Breton. C’est de cet Orient qu’il s’agit,
et
Jean Schlumberger le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’
92
l, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre
et
à sa logique. » On confond Japon et Arabie, Indes et Chine sous une d
93
e à sa fièvre et à sa logique. » On confond Japon
et
Arabie, Indes et Chine sous une dénomination qui n’a de sens que par
94
à sa logique. » On confond Japon et Arabie, Indes
et
Chine sous une dénomination qui n’a de sens que par rapport à l’Europ
95
points de vue semblables, qu’un esprit analytique
et
organisateur d’occidental se perdra ici dans un ensemble kaléidoscopi
96
rdra ici dans un ensemble kaléidoscopique d’idées
et
de jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l
97
scopique d’idées et de jugements contradictoires,
et
de termes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain
98
utres attribuent cette supériorité au machinisme,
et
la déplorent. Plusieurs jeunes songent que dans une Europe vieillie,
99
eux qui repoussent une Asie ignorante du thomisme
et
ceux qui pensent inévitable le choc de deux mondes, et que seule une
100
ux qui pensent inévitable le choc de deux mondes,
et
que seule une intime connaissance mutuelle l’adoucira. Il y a ceux qu
101
ne peut nous donner qu’une supériorité provisoire
et
qui porte en son principe le germe de sa destruction.) Il y a enfin c
102
sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent
et
combinent toutes ces opinions ; et ceux qui avouent n’en point avoir,
103
qui refondent et combinent toutes ces opinions ;
et
ceux qui avouent n’en point avoir, sincérité trop rare… Presque toute
104
de n’être pas suffisamment motivées par des faits
et
des documents. Pour beaucoup, l’Orient n’est qu’un prétexte à variati
105
ormule qui, je pense, réunira tous les suffrages.
Et
chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Orient ou cherche
106
difiant ses gratte-ciel comme des tours de Babel,
et
une Asie immobile dans sa méditation éternelle. e. « Les Appels de
107
des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1152-1154.
108
out une démonstration ; mais, puissante de sûreté
et
d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théorème de Sp
109
sûreté et d’évidence, elle a cette beauté froide
et
massive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du styl
110
la densité du style révèlent seules l’écrivain ;
et
aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de nos yeux que fr
111
solitude (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1156-1157.
112
u naturalisme puisqu’au début Fischer publia Zola
et
Ibsen, Tolstoï, Hauptmann et Maeterlinck. On trouve au tableau des au
113
Fischer publia Zola et Ibsen, Tolstoï, Hauptmann
et
Maeterlinck. On trouve au tableau des auteurs édités depuis lors les
114
ceux des maîtres du renouveau idéaliste allemand
et
viennois, Hesse, Hofmannsthal… Les extraits de ces auteurs qui compos
115
e que fut la littérature d’avant-garde entre 1900
et
1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons pl
116
lmanach 1925 (Berlin) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1162-1163.
117
osphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle —
et
peut-être parce qu’il sait en sortir parfois — M. Otto Flakei a gardé
118
tir parfois — M. Otto Flakei a gardé son bon sens
et
son sang-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe
119
to Flakei a gardé son bon sens et son sang-froid.
Et
si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parc
120
avoir conservé une vision générale de notre temps
et
un évident besoin d’impartialité. Son art bénéficie de cette vision.
121
uses péripéties de son dernier roman sans exposer
et
discuter toutes les idées qu’elles illustrent. Les personnages discut
122
mais leurs actions sont les meilleurs arguments.
Et
peu à peu surgissent d’une accumulation de petites touches précises d
123
nge vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux
et
le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, ver
124
assé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles
et
les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège
125
de la réalité, ils forment un cortège pittoresque
et
désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans le désordre de son pa
126
suivra obstinément le « bon chemin » de la santé
et
de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre
127
ison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur
et
la nôtre. h. « Otto Flake : Der Gute Weg (S. Fischer Verlag, Berlin
128
scher Verlag, Berlin) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié «
129
Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires
et
un prologue (septembre 1925)j M. Valéry Larbaud est vraiment un ét
130
œuvre qu’on trouvera la mesure de son admiration
et
le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplair
131
aux types créés par Unamuno sont ces femmes dures
et
passionnées, Raquel et Catherine, ou cet Alexandro Gomez cynique et p
132
muno sont ces femmes dures et passionnées, Raquel
et
Catherine, ou cet Alexandro Gomez cynique et puissant de confiance en
133
quel et Catherine, ou cet Alexandro Gomez cynique
et
puissant de confiance en soi, qu’une volonté presque inhumaine tortur
134
en soi, qu’une volonté presque inhumaine torture
et
conduit au crime. Et s’ils s’imposent comme types, c’est encore et un
135
té presque inhumaine torture et conduit au crime.
Et
s’ils s’imposent comme types, c’est encore et uniquement par leur obs
136
me. Et s’ils s’imposent comme types, c’est encore
et
uniquement par leur obsédante volonté. Car on imagine difficilement u
137
es, d’une classique sobriété mais d’une brutalité
et
d’une ironie romantiques, laisse la même impression de grandeur désol
138
« Miguel de Unamuno : Trois nouvelles exemplaires
et
un prologue. Traduction de Jean Cassou et Mathilde Pomès (Édition du
139
plaires et un prologue. Traduction de Jean Cassou
et
Mathilde Pomès (Édition du Sagittaire, Paris) », Bibliothèque univers
140
du Sagittaire, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, septembre 1925, p. 1164.
141
sa grande étude sur les rapports du christianisme
et
du romantisme. M. Seillière cherchait dans l’époque romantique un tém
142
turiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet.
Et
j’imagine son étonnement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois
143
ant que je crains qu’il n’ait été incité parfois,
et
presque inconsciemment, à gauchir légèrement la pensée de Vinet pour
144
sellièrisme » de tout son mysticisme protestant.
Et
cela n’est pas sans gêner M. Seillière. C’est peut-être pourquoi il i
145
té la plus brûlante les richesses intellectuelles
et
morales du grand vaudois. Vraiment, tout ce qui semble viable et huma
146
rand vaudois. Vraiment, tout ce qui semble viable
et
humain dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé.
147
ral. Pour notre époque déchirée entre un thomisme
et
un nihilisme exaspérés, pour notre nouveau mal du siècle, il n’est pe
148
sée française (Payot) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, octobre 1925, p. 1797-1798.
149
i-là qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie
et
la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? »
150
rlent avec des mots de tous les jours aux vivants
et
aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche les morts… « …
151
ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel
et
le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il
152
autes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase
et
caracole dans les étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui
153
itations (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1560.
154
sance d’une littérature nationale à la fois cause
et
effet de la libération politique. Cause, puisque pour mener à chef ce
155
t produire qu’une littérature très neuve de forme
et
traditionaliste d’inspiration, comme fut celle des Yeats, Synge, Joyc
156
y ne fait pas. Car elle veut éviter l’emballement
et
conserver dans l’admiration son sens critique de Parisienne. C’est un
157
athie malicieuse qui anime ses amusants portraits
et
ses commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de ren
158
me irlandaise en laquelle s’allient une fantaisie
et
un réalisme également lyriques. m. « Simone Téry : L’Île des bardes
159
” (Flammarion, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567.
160
man quelques mois avant que n’éclate le sinistre,
et
s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus
161
a révolution dans un cœur, puis dans une famille.
Et
une fois le grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de
162
t l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos
et
perd connaissance chaque fois que le récit doit sauter quelques semai
163
, tremblait si fort qu’il avait peur de trébucher
et
de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi. Puis : — Quel
164
moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière
et
peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid que ses dent
165
traîna jusqu’à l’angle le plus éloigné du réduit,
et
se blottit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans
166
crète (Perrin, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1925, p. 1567-1568.
167
. René Guisan, professeur de théologie à Lausanne
et
directeur de la Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi
168
à Lausanne et directeur de la Revue de théologie
et
de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, devant un très nombreux
169
pante la comparaison des points de vue catholique
et
protestant : la notion de « Saint » et son évolution au cours des siè
170
catholique et protestant : la notion de « Saint »
et
son évolution au cours des siècles. Primitivement, le Saint est un ho
171
es semblent s’être le plus rapprochés du Christ ;
et
dans l’Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence
172
hrétien dans l’accomplissement scrupuleux, joyeux
et
fidèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers
173
n’était-ce pas une sainte, comme ce missionnaire
et
cette diaconesse ? S’il n’y a pas de saints protestants, il existe de
174
drait la clarté d’un exposé solidement documenté,
et
le scrupule d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de mont
175
solidement documenté, et le scrupule d’historien
et
de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer le point de vue adverse
176
point de vue adverse avec autant de compréhension
et
de sympathie que le sien propre. Cela donne à ses conclusions cette s
177
e bonheur devant soi, dans un progrès mal défini,
et
l’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un
178
s choisir encore entre un ressaisissement profond
et
la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiè
179
à quelques meneurs aveugles d’une société affolée
et
ridiculement opportuniste où mène la pente de notre civilisation. Men
180
e où mène la pente de notre civilisation. Meneurs
et
chefs : des économistes, des financiers, des industriels. Il y a enco
181
endra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, —
et
mettre qui à la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens
182
à répéter que nous vivons dans le chaos des idées
et
des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du siècle, hors un cert
183
vivons dans le chaos des idées et des doctrines,
et
qu’il n’existe pas d’esprit du siècle, hors un certain « confusionnis
184
profondeur : c’est une unité d’inquiétude. Barrès
et
Gide : ils ont construit des édifices très différents de style, et do
185
construit des édifices très différents de style,
et
dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux
186
ébattent les mêmes brouilles de famille entre Art
et
Morale, Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et
187
brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée
et
Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération d
188
Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture
et
à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles gén
189
chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique
et
l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieu
190
que convergent dans la littérature d’aujourd’hui,
et
plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir les séparer. On n’écrit p
191
public. Un livre est une action, une expérience.
Et
, le plus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour
192
. On écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver
et
le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libé
193
t responsable de tout le « mal », le romantisme —
et
c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison nouvelle de le
194
il en tirait une raison nouvelle de le condamner,
et
nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époq
195
re quelques conséquences. Connaissance intégrale
et
culture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature m
196
expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison
et
les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisem
197
ilibres entre la raison et les sens, entre le moi
et
le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possi
198
s à cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ;
et
les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des
199
été essayé. Dégoût, parce qu’on se connaît trop,
et
que plus rien ne retient. (Or on ne crée que contre quelque chose, co
200
vilisation qui aboutit logiquement à cet épuisant
et
forcené gaspillage : la guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût
201
: la guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût
et
l’exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde en
202
égitime le surréalisme, qui vomit le monde entier
et
la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution toujours ». « Pour n
203
ulle part… » « Je comprends la révolte des autres
et
quelles prières cela fait à Dieu », disait Drieu la Rochelle. Mais il
204
ettre à manger, tout de même nous avons un corps,
et
c’est très beau, Breton, de crier « Révolution toujours » — tant qu’i
205
tant qu’il y a des gens pour vous faire du pain ;
et
c’est très beau, Aragon, de ne plus rien attendre du monde, mais on v
206
brutaliser quelque peu les « grands problèmes »,
et
le voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’action qu
207
cide, hésite, trébuche, oscille entre la violence
et
le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du
208
ntre la violence et le désespoir (c’est l’amour),
et
, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitudes fragme
209
nchantement qui l’amène au besoin d’une mystique.
Et
pour finir, l’un des derniers venus, Marcel Arland, — plus jeune, il
210
idément nous sommes malades dans les profondeurs.
Et
le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en
211
Il serait temps de faire la critique des méthodes
et
des façons de vivre autant que de penser qui les ont amenés aux posit
212
t dans les livres des jeunes, dites-vous, le pire
et
le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les pa
213
re et le meilleur, toutes les vieilleries morales
et
immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque
214
ertes, aucune époque ne fut à la fois plus morale
et
plus immorale, parce qu’aucune ne s’est autant attachée à chercher da
215
seulement légitime à leurs yeux, mais « tabou » ;
et
c’est vertu que de favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi o
216
iser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre
et
désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il es
217
— Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison
et
folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tend
218
ndances négatives l’emportent, il est plus facile
et
plus enivrant de se laisser glisser que de construire. Et l’on y pren
219
enivrant de se laisser glisser que de construire.
Et
l’on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en
220
es heureuses que nous avions jusqu’alors enviées,
et
une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’
221
à repousser avec horreur tout argument d’utilité,
et
bien que nous niions toute vérité, nous étions dominés par le sens d’
222
lan intellectuel sur lequel tout apparaît inutile
et
vain ? Je cite ces phrases, tirées d’un récit d’ailleurs admirable4,
223
les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican
et
Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inquiétude, de malaises,
224
rt des romans de jeunes qui se situent entre Gide
et
Aragon nous montrent le même personnage : un être sans foi, à qui une
225
ité » interdit de commettre aucun acte volontaire
et
raisonné parce que ce serait fausser quelque chose ; à la merci des c
226
galement ; n’attendant rien que de ses impulsions
et
contemplant avec une lucidité parfois douloureuse ses propres actes d
227
culture de soi, « d’intensification de la vie »,
et
qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus », les pousser
228
une chose si forte, de me sentir plus fort encore
et
de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si
229
, n’est pas si bonne que de céder à vous, désirs,
et
d’être vaincu sans bataille. On voit assez à quel genre de sophismes
230
iversel, désir de violences, gratuité des pensées
et
des actes, rêves éveillés, tout cela ne dérive-t-il pas d’une fatigue
231
mense. Nous voyons se fausser le rythme des jours
et
des nuits à mesure que se développe une civilisation mécanicienne. (L
232
eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique
et
symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de l
233
état presque inhumain de celui qui n’a pas dormi
et
qui « assiste » à sa vie, à ses sensations, à ses automatismes. En ar
234
n des états les plus riches de visions nouvelles,
et
qui résiste le mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons graduellem
235
; retrouver le sens social, le sens des ensembles
et
des proportions ; rééduquer les instincts du corps et de l’âme ; voul
236
es proportions ; rééduquer les instincts du corps
et
de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction comp
237
ations par l’absurde de quelques problèmes moraux
et
littéraires 8, à quoi beaucoup sacrifièrent leur jeunesse. (« Nous so
238
ne conscience à l’époque, ou se défaire avec elle
et
dériver vers un Orient d’oubli — (mais avant de s’y perdre, quelles r
239
té ; ils savent que pour lutter il faut des armes
et
ne méprisent pas la culture ; sans autre parti pris que celui de vivr
240
e, c’est-à-dire de construire ; sobres de langage
et
maîtres de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de pensée vala
241
erté que dans la soumission aux lois naturelles ;
et
leur effort est de retrouver ces lois ; ils ne craignent pas de chois
242
encore dans l’attente angoissée d’une révélation
et
dans la connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait
243
s’en vont « épiant toutes les émotions de l’âme,
et
lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le t
244
res, en compose d’un seul coup une grande misère,
et
par ce moyen nous met tout d’abord en présence, non de nous-mêmes, ma
245
. En tout cas je vois bien le mal qu’ils ont fait
et
qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’est une manière d’agir
246
me moderne nous empêche secrètement de construire
et
de nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’idéal goethéen
247
u de tout composer en soi, on veut tout cultiver,
et
en fait l’on se contente d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude.
248
ux ou trois de Philosophies, des Cahiers du Mois,
et
peut-être Drieu la Rochelle, s’il voulait…) o. « Adieu, beau désordr
249
u, beau désordre… (Notes sur la jeune littérature
et
la morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, ma
250
érature et la morale) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mars 1926, p. 311-319.
251
chrétienne d’étudiants eurent lieu au printemps,
et
non plus à Sainte-Croix, mais à Aubonne. Un plein succès a répondu à
252
ences de l’Évangile en face de la pensée moderne,
et
fut impressionnant de vigueur dialectique et de largeur d’idées. Une
253
rne, et fut impressionnant de vigueur dialectique
et
de largeur d’idées. Une soirée consacrée à la fédération vint interro
254
logie, présenta deux ouvriers de Paris, Clerville
et
Janson, dont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et
255
a eu l’occasion de partager les conditions de vie
et
qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Me
256
arienne. Brémond conclut en montrant la nécessité
et
les difficultés d’une action missionnaire dans ces milieux, comme M.
257
n contenue d’hommes qui ont vu, qui ont souffert,
et
qui ne se payent plus de mots ni d’utopies, Clerville, Janson et Brém
258
yent plus de mots ni d’utopies, Clerville, Janson
et
Brémond ont su arracher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour
259
’homme au-dessus de la plus dégradante condition,
et
nous n’y arriverons que par un travail d’éducation lent et souvent da
260
’y arriverons que par un travail d’éducation lent
et
souvent dangereux. Vous, étudiants, venez à nous pour nous aider. Nou
261
re, si nous écopons, tant pis. » Cinq conférences
et
autant de cultes en trois jours, cela peut paraître excessif à qui n’
262
u’il pense sans se préoccuper d’être bien pensant
et
les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir
263
s du village une discussion toujours trop courte.
Et
les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante.
264
ouvrier en maillot rouge assis entre un banquier
et
un philosophe au milieu d’une centaine d’étudiants et de professeurs
265
n philosophe au milieu d’une centaine d’étudiants
et
de professeurs suisses et français. Miracle qui nous fit croire un in
266
ne centaine d’étudiants et de professeurs suisses
et
français. Miracle qui nous fit croire un instant à la fameuse devise
267
ers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté
et
de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une hist
268
re. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique
et
de crime, intense et tragique comme un couchant d’automne, émouvante
269
histoire de passion mystique et de crime, intense
et
tragique comme un couchant d’automne, émouvante encore après tant d’a
270
risé par les élans alternés ou confondus du désir
et
de la prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystèr
271
qui est le mystère même, pour suivre la naissance
et
l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la re
272
on de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute
et
le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve
273
Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ;
et
l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir h
274
Un chapitre d’observation psychologique ironique
et
minutieuse, à la Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à un
275
hique. Mais tout cela baigne dans le même lyrisme
et
s’agite sur un fond sombre et riche de passions inconscientes qui don
276
ans le même lyrisme et s’agite sur un fond sombre
et
riche de passions inconscientes qui donnent à tous les actes une sign
277
es comme Rousseau sur les droits de la passion, —
et
dans sa trame quelques chapitres inspirés presque littéralement d’une
278
Paulina semble parfois un peu trop « classique »
et
prévue, l’originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c
279
ent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques
et
de Vous êtes des hommes. p. « Pierre Jean Jouve : Paulina 1880 (NRF
280
ina 1880 (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, avril 1926, p. 530-531.
281
uerre a fait perdre le goût des théories d’écoles
et
de quelques autres plaisirs pour civils : mettez-le aux prises avec u
282
vra portraiturer les gentilshommes archéologiques
et
les vieilles dames à principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet
283
moral, avec ses personnages un peu conventionnels
et
l’invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que
284
’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve,
et
qui eût gagné à être mise en action plutôt qu’en commentaires. Le tal
285
x de Watteville : La Folie de l’espace (Delachaux
et
Niestlé) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avri
286
Delachaux et Niestlé) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, avril 1926, p. 531.
287
muse, parce que c’est dimanche, parce qu’il pleut
et
qu’on s’ennuie. Si la vie est bête à pleurer, sourire est moins fatig
288
qui fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue
et
l’Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâill
289
t l’Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse
et
se permet de bâiller en public. On connaît le danger… r. « Wilfred
290
èmes (Spes, Lausanne) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
291
roman. La profusion souvent facile des incidents
et
le style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fati
292
trait commun à presque toutes les femmes auteur,
et
qui plaît aux lectrices — m’agace un peu ? C’est une vétille. s. «
293
hée (Payot, Lausanne) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661.
294
le meilleur de son œuvre : ses récits de critique
et
d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret prof
295
: ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq
et
l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans do
296
e faudrait-il préciser ce qu’il entend par ordre,
et
montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour
297
i dépasse de beaucoup les limites de cette école,
et
qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exerci
298
ts exercices poétiques. Mais quelle intelligence,
et
dont l’audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien
299
e la lumière. « Le mystère se passe en plein jour
et
à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l
300
sse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre
et
de l’art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-o
301
peinture, en musique. Suppression du clair-obscur
et
de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas,
302
x projecteurs convergent sur une machine luisante
et
tournante. L’esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d
303
arme admirable de précision, d’élégance mécanique
et
de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours le même déclic. Coc
304
e c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait,
et
pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Barrès, sur
305
renaître catholique.) Certes, il bannit le charme
et
toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles sont sans
306
’ordre (Stock, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 661-662.
307
René Crevel, Mon corps
et
moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse mo
308
plupart en sont encore à des symboles équivoques
et
, quoi qu’ils en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus le menson
309
iqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’art,
et
pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition r
310
». Cette inversion de tout ce qui est constructif
et
créateur, voilà je pense le véritable désordre. Une intelligence parv
311
effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force
et
le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorai
312
us la force et le courage de contempler nos corps
et
nos cœurs sans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait-il le coura
313
courage de prier… u. « René Crevel : Mon corps
et
moi », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926,
314
el : Mon corps et moi », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mai 1926, p. 662-663.
315
uvrit par une bise qu’on peut bien dire du diable
et
se termina sous le plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’
316
l y a de plus protestant — mais oui, M. Journet —
et
je ne crois pas qu’il puisse se produire ailleurs qu’en terre romande
317
liberté de défendre sa petite hérésie personnelle
et
de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans la recherc
318
ression, durant les discussions entre de Saussure
et
Bertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour les objections que
319
débat que tous menaient en eux-mêmes loyalement.
Et
ce désir d’arriver à quelque chose de définitif à la fois et d’intell
320
d’arriver à quelque chose de définitif à la fois
et
d’intelligent, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude
321
le tourment de cette âme leur propre recherche, —
et
dans ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle des réponses dé
322
t l’atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux
et
méditations. Dehors, on honore la liberté d’un culte moins platonique
323
plesse pour maintenir l’équilibre des discussions
et
de sa propre personne. Et il y eut encore un dîner très démocratique
324
uilibre des discussions et de sa propre personne.
Et
il y eut encore un dîner très démocratique pendant lequel le philosop
325
ec âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson,
et
de l’autre dessinant dans l’air des phrases musicales. Après quoi Ric
326
omme si on l’avait attendu pour le manifester ! —
et
qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour sav
327
elques notes. 3. Il suffit encore : f 2.50, nom
et
adresse. e. « L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vit
328
« L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux
et
Vita : nouvelles de l’Association chrétienne suisse d’étudiants, Laus
329
1926)v Nous disons adieu aux charmes troubles
et
inhumains de la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un déc
330
’agit de créer à notre vie moderne un décor utile
et
beau. Or « la grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujo
331
pas été animée de l’esprit de géométrie… Elle use
et
conduit lentement l’usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est
332
tion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs ».
Et
pourtant « la ville est une image puissante qui actionne notre esprit
333
lace au croisement des préoccupations esthétiques
et
sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre la crise de notre civilisation
334
que des dictateurs : des Architectes, de l’esprit
et
de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort qu
335
iles de Rome). Urbanisme est une étude technique
et
un pamphlet dont l’argumentation serrée éclate parfois en boutades mo
336
xistence… construire les villes de notre temps ».
Et
je déplie ce plan d’une « ville contemporaine ». Pures géométries de
337
ville contemporaine ». Pures géométries de verre
et
de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel
338
sses. Des perspectives régulières recoupées à 200
et
400 mètres par les plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l
339
ées ne sont plus que des enceintes transparentes,
et
minces en regard de leur hauteur, entourant de leurs multiples « rede
340
leurs multiples « redents » des terrains de jeux
et
des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organis
341
s la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie
et
de raison où de grandes ordonnances élèvent leur chant. Utopie ! Oui,
342
idables des ensembles soumis aux lois de l’esprit
et
de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des l
343
ie — la « ville contemporaine ». Un labeur précis
et
anonyme concourt obscurément à cette parfaite expression du triomphe
344
isme (G. Crès, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, juin 1926, p. 797-798.
345
t. Nous sommes devenus si savants sur nous-mêmes,
et
si craintifs en même temps, si jaloux de ne pas nous déformer artific
346
xieux de prévoir l’influence, avant de s’y jeter,
et
dont on craint de ressortir trop différent. Amour de soi, qui nous to
347
ent. Amour de soi, qui nous tourmente obscurément
et
nous obsède de craintes et de réticences dont nous ne comprenons pas
348
tourmente obscurément et nous obsède de craintes
et
de réticences dont nous ne comprenons pas toujours l’objet. Peur de p
349
s amis, ce tic. Mais encore, tant d’autres forces
et
tant d’autres faiblesses, tant d’autres désirs contradictoires ; au g
350
sta qu’une fatigue profonde ; je devins si faible
et
démuni, livré aux regards d’une foule absurde, bienveillante, repue,
351
tous paraissaient détenir un secret très simple,
et
un peu narquois ils me considéraient avec une pitié curieuse : je me
352
eusement insupportables, si cruellement présentes
et
dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, s
353
tions de détail dont je m’exagérais l’importance.
Et
c’est ainsi par feintes que je progressais, jusqu’au jour où je m’avo
354
bousculez ! La parole est aux instincts combatifs
et
dominateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de l’animal. Louée
355
e distingue plus de l’animal. Louée soit ma force
et
tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en
356
mal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte,
et
tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma
357
ne foi, mais peut-être arriverai-je à la vouloir,
et
c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me rendant plus parf
358
stes les plus favorables. J’ai d’autres instincts
et
je n’entends pas tous les cultiver pour cela seul qu’ils sont naturel
359
champ de luttes, de tendances vers la destruction
et
vers la construction ; c’est un mélange à doses égales de mort et de
360
ruction ; c’est un mélange à doses égales de mort
et
de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer la vie, puisque n’e
361
’est un mélange à doses égales de mort et de vie.
Et
c’est à l’intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas enco
362
des lois établies par le concours de l’expérience
et
d’un sentiment de convenance en quoi se composent le plaisir et la co
363
ent de convenance en quoi se composent le plaisir
et
la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouv
364
ier, d’où cette fatigue générale qui fausse tout,
et
qui s’oppose au perfectionnement de l’esprit, puisqu’elle ne permet q
365
estie que je m’enorgueillis un peu de connaître ;
et
de cette volonté d’un meilleur moi, une certaine méfiance vis-à-vis d
366
la nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.)
Et
demain peut-être, agir dans le monde, si je m’en suis d’abord rendu d
367
e conscience. Je fais partie d’un ensemble social
et
dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvega
368
m’adapter à l’existence que m’imposent mon corps
et
les lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en mêm
369
ce que m’imposent mon corps et les lois du monde,
et
comment augmenter ma puissance de jouir, en même temps que ma puissan
370
ents que je me tiens — plisser un peu mes lèvres,
et
s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme un écho profond, une
371
puissante, quelle confiance vont guider ce corps
et
cet esprit… Créer, ou glisser au plaisir ? Êtes-vous belle, mon amie,
372
glisser au plaisir ? Êtes-vous belle, mon amie, —
et
vous, ma vie ? Certes, mais je vous aime moins que je ne vous désire.
373
raît aller contre fin. Une attention trop directe
et
soutenue modifie son objet vivant. Pour moi, la sincérité ne peut êtr
374
our moi, la sincérité ne peut être que spontanée.
Et
spontanément je suis porté à écrire des idées qui m’aideront. Une foi
375
urquoi je ne puis comprendre les excommunications
et
les intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes c
376
nt (10 juillet 1926)g Je ferme les Bestiaires,
et
me tirant hors de ce « long songe de violence et de volupté », je me
377
et me tirant hors de ce « long songe de violence
et
de volupté », je me sens envahi par un rythme impérieux au point qu’i
378
ujours échappé, mais qu’il domine dans l’ensemble
et
entraîne dans l’allure puissante à la fois et désinvolte de son récit
379
ble et entraîne dans l’allure puissante à la fois
et
désinvolte de son récit. On a souvent parlé d’excès de lyrisme à prop
380
a description la plus réaliste de la vie animale.
Et
n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il peut atteindre à p
381
Une perpétuelle palpitation de vie anime ce livre
et
lui donne un rythme tel qu’il s’accorde d’emblée avec ce qu’il y a de
382
la plaine s’élève le long beuglement des taureaux
et
le ohéohéohé des bouviers « comme un chant mystérieux entendu au-dess
383
la tête dressée, des vachettes qui se mordillent
et
se frôlent amoureusement, des chiens « qui vous faufilent des douceur
384
bas des jambes », jusqu’à ces chats qui griffent
et
lèchent alternativement, « en vraies bêtes de désir ». Une intelligen
385
profonde de la vie animale suppose entre l’homme
et
la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs reprises. C’es
386
) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle.
Et
parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut la dominer… : on ne vai
387
ominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime,
et
les victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux ce
388
strophait ainsi tout bas, sur un ton révérenciel,
et
comme on déroule une litanie. Sous les grands cils brillants, lustrés
389
ée. Quelques secondes encore elle cligna des yeux
et
on vit sa respiration. Puis ses pattes se tendirent peu à peu, comme
390
n spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir,
et
comme lui, elle y resta immobile. Et son âme divine s’échappa, pleura
391
son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile.
Et
son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la c
392
. Et son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux,
et
les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans
393
ne s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses,
et
la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires f
394
hements superstitieux, de grands symboles païens,
et
l’on se perd dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taur
395
crétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureaux
et
Alban confondent leurs génies dans une sorte de cauchemar de soleil e
396
eurs génies dans une sorte de cauchemar de soleil
et
de sang. On peut penser ce qu’on veut de ce paganisme exalté, tout iv
397
ants. Pour ma part, je le trouve assez peu humain
et
comme obsédé par une idée de violence tonique certes, mais décidément
398
un autre Montherlant, plutôt stoïcien, celui-là.
Et
c’est un moraliste de grande race, qui peut nous mener à des hauteurs
399
dans les Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne
et
du génie taurin. Ce qui perce à chaque page, ce qui peu à peu obsède
400
en fin de compte de tous ces tableaux de violence
et
de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d
401
la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc.,
et
il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas
402
acent dans l’intelligence de l’instinct universel
et
nous élèvent à une vie plus âpre et violemment contractée, par la grâ
403
nct universel et nous élèvent à une vie plus âpre
et
violemment contractée, par la grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est
404
e chenille précisément aux trois-centres nerveux,
et
sa victime « une sympathie (au sens étymologique du mot) qui la rense
405
ssages qui préciseraient ce parallélisme du poète
et
du philosophe. g. « Les Bestiaires, roman, par Henry de Montherlant,
406
annoncent le « crépuscule du monde occidental »,
et
, au-dessus des ruines prochaines de nos cités mécaniciennes, ils rall
407
d’où nous viendraient une fois de plus la sagesse
et
la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions
408
tantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient
et
de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de
409
az a visité l’Égypte, ses habitants, ses tombeaux
et
son passé, en curieux avide du secret dernier des choses, lucide, ave
410
n livre, aux petits chapitres à la fois si concis
et
achevés, n’est ni un album de vues pittoresques, ni le journal plus o
411
m, que nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu
et
parfois — je pense à certaines pages sur Jérusalem qui touchent parti
412
passionné. Nul n’est moins oriental que de Traz,
et
c’est ce qui donne à ses notations tout leur prix. Elles ne nous rens
413
i de l’Européen se précise dans la même mesure, —
et
aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valab
414
guère de comparaison valable qu’entre individus,
et
comme type d’individu européen Robert de Traz ne pouvait trouver mieu
415
avons fait une vertu. Eux, ils l’ont rendu facile
et
en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je trouve si juste : « C
416
s l’ont rendu facile et en ont fait un plaisir. »
Et
encore ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit le plus profond
417
chologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles
et
le mènent à cette constatation fondamentale que « notre intelligence
418
onstatation fondamentale que « notre intelligence
et
celle de l’Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment co
419
lors, comment collaborer, comment se comprendre,
et
si c’est impossible, pourra-t-on du moins éviter le conflit que certa
420
Traz un philosophe de l’histoire aux vues larges
et
pourtant réalistes, aux hypothèses hardies — de la hardiesse de ce bo
421
rope ? Il y a là des pages d’un accent très noble
et
courageux mêlé, parfois, d’une certaine amertume, où de Traz quitte l
422
dépaysements un point de vue fixe, d’où comparer
et
, parfois, juger ; préférant obstinément à la légende le vrai, même am
423
ère œuvre importante du mouvement de construction
et
de synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. L
424
ontenue surtout dans ses essais sur Proust, Pater
et
Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce la confusion romant
425
n romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne
et
la morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter
426
de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale
et
l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Ferna
427
empoisonne et la morale et l’esthétique modernes.
Et
à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais l
428
it nier toute communication directe entre l’œuvre
et
le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie
429
M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie
et
le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses
430
x manières de se connaître, à savoir se concevoir
et
s’essayer. » Fort bien, mais l’œuvre n’est-elle pas une façon particu
431
emander s’il nie vraiment l’interaction de la vie
et
de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y
432
meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust
et
sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fernandez donne une cr
433
œur » dont Fernandez donne une critique décisive.
Et
c’est justement par opposition à la conception proustienne de la pers
434
dement sur les données modernes de la psychologie
et
de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — u
435
ipe unificateur » — que la psychologie freudienne
et
proustienne a porté à un point si dangereux, il nous propose l’expéri
436
xpérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith
et
d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire d
437
e l’action, faire de la psychologie à la volée »,
et
donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me
438
e une théorie assez proche du cubisme littéraire,
et
qu’il serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter les confusions
439
er sa valeur littéraire au genre le plus encombré
et
le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre
440
technique ou obscure, une richesse d’idées neuves
et
fortes, mais péniblement comprimées. Ce défaut de forme est peut-être
441
sque de paraître trop littéraire aux philosophes,
et
trop philosophe aux littérateurs. Il manque à M. Fernandez un certain
442
ue son livre manifeste une belle unité de pensée,
et
qu’il propose quelques directions très nettes de synthèse. Avec une œ
443
e œuvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost,
et
les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez
444
Messages (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, juillet 1926, p. 124-125.
445
de savante sensualité, pour ces insolences jolies
et
les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de l
446
j’ai supporté mille fastidieux détails techniques
et
des délires taurologiques avec lesquels, pour communier, il faudrait
447
Elle est tonique comme le spectacle des athlètes.
Et
c’est elle avant tout que j’admire dans ces Bestiaires, presque malgr
448
que malgré leur sujet trop pittoresque. « Honneur
et
longue fidélité aux taureaux braves et simplets d’esprit ! Qu’ils pai
449
« Honneur et longue fidélité aux taureaux braves
et
simplets d’esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans les prairies c
450
es Fontaines du désir certaines pages magnifiques
et
sobres, jetées de haut avec la nonchalance des vrais puissants, je co
451
ires (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, septembre 1926, p. 397-398.
452
e corridor de lumière où elle accueille le ciel —
et
derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est, des collines fluides
453
nt plus secrète. Vers l’est, des collines fluides
et
roses. De l’autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement les eau
454
é, c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux
et
les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitur
455
s lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste
et
nu, les voitures revenaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il
456
Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges
et
le vert dur des berges : un malaise montait dans l’air plus frais, av
457
parmi les dissonances mélancoliques des lumières
et
des odeurs, espérant entrer là-bas dans je ne sais quelle harmonie pl
458
st qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air
et
musiques sourdes. Penser serait sacrilège, comme une barre droite au
459
lumières sur les champs sombres du ciel de l’est,
et
une façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato sur sa col
460
uyons ces bords où conspirent des ombres informes
et
des harmonies troubles de parfums et de courbes compliquées. Nous sec
461
res informes et des harmonies troubles de parfums
et
de courbes compliquées. Nous secouons un sortilège pénétrant comme ce
462
ne vie étrangère, une paix qui n’est pas humaine,
et
qui nous laisse gourds et faibles, caressant en nous la lâche volupté
463
qui n’est pas humaine, et qui nous laisse gourds
et
faibles, caressant en nous la lâche volupté de sentir l’esprit se déf
464
us la lâche volupté de sentir l’esprit se défaire
et
couler sans fin vers un sommeil à l’odeur fade de fleuve, un sommeil
465
e fer, près de nous, érigeait l’image de la lutte
et
des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui nous évoqua
466
geait l’image de la lutte et des forces humaines,
et
rendait sous des coups un son qui nous évoqua les rumeurs de villes d
467
usines. Il y avait la vie des hommes pour demain,
et
il était beau d’y songer un peu avant de nous abandonner à l’oubli lu
468
rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes
et
roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. T
469
Il passe une possibilité de bonheur par personne
et
les devantures ne cherchent qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée p
470
re qu’on oublie pour celui des regards étrangers.
Et
voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Doni
471
estes des passantes. Sous cette agitation aimable
et
monotone nous allons voir courir l’arabesque des sentiments et le mou
472
ous allons voir courir l’arabesque des sentiments
et
le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans u
473
s — tous les tableaux dans le noir des musées ! —
et
si tu veux soudain le son grave de l’infini, pour être seul parmi la
474
manifestent, avec un certain manque de conviction
et
des poses de mannequins, les tendances contradictoires d’un individu.
475
nant, c’est que le livre soit réellement amusant,
et
qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans le rythme des désirs jama
476
indécise (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 810.
477
ère trop claire où les cris se font un peu aigres
et
les couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointai
478
ù la douleur nette d’un amour réveillé l’envahit.
Et
Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de juifs espagnol
479
ec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine
et
douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse, le fuit, parce que son silen
480
e comprenait pas comment on pouvait tant souffrir
et
ne plus aimer ». Closain se tue pour finir le livre. Livre charmant e
481
losain se tue pour finir le livre. Livre charmant
et
bizarre, où la sentimentalité moderne trouve l’expression ironique qu
482
à une émotion plus grave, qui transparaît parfois
et
nous fait regretter que l’auteur ne se soit pas mieux abandonné à son
483
s (Émile-Paul, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 810-811.
484
s : le Chinois s’étonne non sans quelque aigreur,
et
critique avec un mépris tranquille ; le Français riposte sans convict
485
tranquille ; le Français riposte sans conviction,
et
sous sa défense on devine une détresse. C’est encore une vision de l’
486
entivement ordonnée, où l’idée de la civilisation
et
celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conq
487
ction ; notre individualisme en naît logiquement,
et
toutes nos catégories artificielles et nécessaires. Mais le monde éch
488
giquement, et toutes nos catégories artificielles
et
nécessaires. Mais le monde échappe toujours à nos cadres — perpétuel
489
nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.)
Et
notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifice. Sans dout
490
nne libre peut souscrire aux critiques du Chinois
et
sympathiser avec son idéal de culture. Il n’y a pas là deux points de
491
ois de telle façon qu’ils ne le paraissent point.
Et
alors le relativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette
492
upérieure de l’esprit humain que nous découvrons,
et
qui nous permettra de juger à notre tour certaines démences qui enfiè
493
onté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ».
Et
peut-être n’est-il pas de position plus périlleuse, puisqu’elle risqu
494
er en nous qu’un « étrange goût de la destruction
et
de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incerti
495
dent (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1926, p. 811-812.
496
s avons élevé à la hauteur d’une vertu première —
et
qui légitime tous les dénis de morale à quoi nous obligeaient en réal
497
nous obligeaient en réalité on sait quel dégoût,
et
certains désirs de grabuge moins avouables, — la sincérité, masque fi
498
buge moins avouables, — la sincérité, masque fier
et
un peu douloureux des défaitismes les plus subtils comme des plus pur
499
défaitismes les plus subtils comme des plus pures
et
loyales inquiétudes. Sincérité, le mal du siècle. Tout le monde en pa
500
cérité, le mal du siècle. Tout le monde en parle,
et
chacun s’en autorise pour excuser sa petite faiblesse originale : tan
501
ité s’évanouit en mille définitions tendancieuses
et
contradictoires. Êtes-vous sincères en actes ou en pensées ; envers v
502
en quelque sorte scientifique, à la fois curieuse
et
désintéressée, de naturaliste de l’âme ? Heureusement que M. Brémond
503
se mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui —
et
l’étonnement indigné du spectateur. Pour parler avec un peu de clairv
504
ter hors de soi. Seule, une méthode d’observation
et
de déduction passablement sèche pourrait nous donner l’illusion et pe
505
assablement sèche pourrait nous donner l’illusion
et
peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En même temps
506
prit pour se dégager de confusions aussi perfides
et
si profondément mêlées à ses plus chères aventures. Sincérité et sp
507
t mêlées à ses plus chères aventures. Sincérité
et
spontanéité « Nos actes les plus sincères sont aussi les moins cal
508
roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ».
Et
les critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez e
509
u’ils ne comprennent pas. Il faudrait s’entendre.
Et
, ici encore, prenons garde de confondre le plan littéraire avec le pl
510
ntégrale de soi. Mais pour être moins pittoresque
et
plus « entachée d’utilitarisme », la décision réfléchie, aussi peu gr
511
onner de nous-mêmes une connaissance plus intense
et
plus émouvante ; mais la morale, plutôt que de nous constater, doit n
512
e mode le plus libre, le plus conscient à la fois
et
le plus voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere.
513
ientôt — par un mouvement normal de l’attention —
et
fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’aboutis : ce q
514
s à me souvenir de certaines sensations profondes
et
indéfinies (telle sensation physique de bonheur, dans une rue au couc
515
tes, je retrouve un être si différent. Les gestes
et
les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au cr
516
tains décors modernes : vous changez l’éclairage,
et
la chaumière devient palais. C’est l’objection classique et irréfutab
517
mière devient palais. C’est l’objection classique
et
irréfutable à toute introspection : ce daltonisme du souvenir. Si l’
518
ée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault
et
surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et sig
519
né Crevel ont donné les exemples les plus récents
et
significatifs ? Tous ces livres évoquent assez précisément la forme d
520
vivre, le personnage à douter du sens de sa vie)
et
les forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le
521
ation vers le bas produit une agitation accélérée
et
folle, puis tout finit dans un râle, brusquement c’est le vide. Centr
522
m de mon passé : ce qui était élan devient recul,
et
l’évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai c
523
rofondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps
et
moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plu
524
. Faillite de toute introspection, en littérature
et
en morale. Impossibilité de faire mon autoportrait moral : je bouge t
525
cère ne puisse faire découvrir quelques richesses
et
ne serve parfois de contrôle efficace. Mais les bénéfices sont maigre
526
enter, c’est se porter à l’extrême pointe de soi,
et
, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi les ro
527
effets imprévisibles, « réalisme » décourageant,
et
, bientôt, incapacité d’agir efficacement. (Il faut, pour sauter, une
528
dans l’élan qui échappe à toute analyse préalable
et
sans quoi le saut paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation d
529
cère. Peut-on véritablement se mentir à soi-même,
et
surtout se prendre à ses propres mensonges ? Peut-être juste assez po
530
ce que beaucoup continuaient d’appeler sincérité
et
qui me devenait inintelligible en même temps qu’odieux. Au hasard de
531
erche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité
et
montrer plus de style. (Georges Duhamel.) … Nous ne sommes pas, nous
532
on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accepte.
Et
aussitôt j’annonce : Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout d
533
, je t’avais déjà invoquée, hypocrisie consolante
et
libératrice. Mais tu m’offrais un visage un peu crispé, signe d’une i
534
visage un peu crispé, signe d’une ironie secrète
et
pour moi douloureuse encore. Pitoyable, trop visiblement, tu prêtais
535
ie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle,
et
chaque être un plus prenant sourire. Cependant que ma joie — un état
536
ce que momentanément je choisissais de laisser —
et
des baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’attribuer com
537
re, on entretient comme une arrière-pensée sagace
et
obstinée l’assurance d’une continuité entre ses actions et ses désirs
538
ée l’assurance d’une continuité entre ses actions
et
ses désirs, un quant-à-soi qui ne gêne aucun geste, mais incline disc
539
un geste, mais incline discrètement les décisions
et
les rend complices d’un dessein logique, peut-être lointain, en quoi
540
a plus réelle de l’individu — en dehors du corps.
Et
ce ne sont point là jeux d’idées et jongleries verbales. Regards au-d
541
ors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées
et
jongleries verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à la
542
’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu
et
calculer rapidement le retour à une fidélité plus profonde. Fidélité
543
une honnêteté peut-être plus réelle que l’autre.
Et
l’on conçoit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal
544
elle que l’autre. Et l’on conçoit que ce constant
et
secret assujettissement au moi idéal exige une politique des sentimen
545
l exige une politique des sentiments plus subtile
et
, je pense, moins vulgaire que cette agilité offensive qu’on appelle d
546
ive qu’on appelle dans la vie publique arrivisme,
et
séduction dans les salons. Constater une faiblesse, c’est toujours u
547
me directement dans notre langage statique. 3. «
Et
certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’affirmation prouve
548
iscours sur les difficultés du temps, en général,
et
sur celles en particulier qu’implique la publication de notre revue.
549
comme M. Coué, que ce serait de mauvaise méthode.
Et
, comme M. Coué, nous nous persuadons que tout ira très bien. Les circ
550
onstances l’exigent, d’ailleurs, plus que jamais,
et
plus que jamais, nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être. La
551
irrésistiblement l’obligation d’être nous-mêmes.
Et
, disons-le tout de suite, c’est en cela uniquement — être nous-mêmes
552
chercher plus patiemment encore à nous comprendre
et
de nous accorder une confiance sans laquelle nous ne saurions aller,
553
e confiance sans laquelle nous ne saurions aller,
et
qui, nous voulons l’espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bén
554
renne toutes nos obscurités pour des profondeurs.
Et
nous n’allons pas procéder à quelque sensationnelle révision des vale
555
t de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent
et
de les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : «
556
facile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! »,
et
de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre « désordre ». M
557
dre ». Mais on est toujours le fils de quelqu’un…
Et
, peut-être, la considération du « déluge » peut-elle faire réfléchir
558
-mêmes, avons-nous dit, c’est à la fois notre but
et
notre excuse en publiant cette revue. Nous ne sommes pas « une revue
559
Il faut que notre revue reste cette chose unique
et
indéfinissable, comme toute chose vivante… Gerbe de fleurs disparates
560
es, aux tiges divergentes, mais qu’un ruban rouge
et
vert lie par la grâce d’une volonté sans doute divine… a. « Avant-p
561
ont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi
et
vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres
562
e. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres
et
poux barbus », qui perdraient leur temps à recenser les incohérences
563
. Quant à ceux que certaines envolées magnifiques
et
hagardes pourraient enthousiasmer il leur réserve mieux encore : aprè
564
« Ils m’ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ;
et
sans rire : « À mort ceux qui paraphrasent ce que je dis ». Il y a ch
565
ersécution, qui se cherche partout des prétextes,
et
une passion farouche pour la liberté, qui font de cet ombrageux perso
566
stentation de révolte, ce mélange de fanfaronnade
et
d’intense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à q
567
’intense désespoir, on songe au Frank de La Coupe
et
les Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon d
568
dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi
et
le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame «
569
sants, un écrivain qui s’impose avec des qualités
et
des défauts pareillement énormes. Il faut remonter loin dans notre li
570
e pour trouver semblable domination de la langue.
Et
parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous v
571
ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes
et
quelques sombres délires, des pages d’un lyrisme inouï. Que Louis Ara
572
tieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est l’amour,
et
certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-vous des
573
ffaire, c’est l’amour, et certain désespoir vaste
et
profond comme l’époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des ch
574
de Paris (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, janvier 1927, p. 123-124.
575
au sourire absent, Or luisant, terreau qui fume…
Et
tu laisses, ô col roide, En souffrance mes baisers. L’amour est u
576
ait compté jusqu’alors que d’authentiques avocats
et
un chapelier dont tous s’accordaient à dire qu’il ne péchait que par
577
se caresse lumineuse la chevelure rouge d’Urbain,
et
son nez, lequel, par ses dimensions remarquablement exagérées, lui va
578
lait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux
et
ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées de leur
579
le printemps désormais rendra le ciel plus pâle,
et
nous irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garç
580
is l’étoile chantait dans l’axe de sa vie normale
et
s’approchait en faisant la roue — celle à qui sourit la Fortune. Urba
581
a Fortune. Urbain, fort d’une hérédité judiciaire
et
française, dédaigna des avances que la perte de son sens de l’éternel
582
circulaire pour Paul Morand, auteur de « Lewis
et
Irène » L’auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cro
583
e : … Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède
et
la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier
584
ire général du ministre des Affaires étrangères ;
et
pour la mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à P
585
très bel auditoire, est un des plus passionnants
et
des plus controversés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est l
586
rupuleux, qui juge d’après les textes, les causes
et
les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu. (Cette at
587
les textes, les causes et les effets vérifiables,
et
non d’après un système préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on
588
t, entre 1578, date de la proclamation de l’édit,
et
1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande libert
589
e, un archevêque libertin, Harlay de Champvallon,
et
surtout Madame de Maintenon. Tous ces gens conciliant fort bien leurs
590
a révocation serait une œuvre digne du Roi-Soleil
et
capable de lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, «
591
« tourner » l’édit par mille arguties juridiques.
Et
les statistiques faussées peuvent faire croire à une très forte dimin
592
politiques (guerre de la confession d’Augsbourg)
et
surtout morales : car malgré des félicitations arrachées par Louis XI
593
é les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ».
Et
les persécutions contre ceux qui n’ont commis d’autre crime que de «
594
séquences de nos jours encore, ajoute M. Esmonin.
Et
nous ne pouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans l’ouvrage
595
uis XIV l’exposé si dénué de parti pris, si libre
et
d’une si élégante science du sympathique professeur de Grenoble. i.
596
e vie conjugale, la décristallisation progressive
et
réciproque des conjoints. » On sait que Beyle appelait cristallisatio
597
gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre.
Et
comme la morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le
598
andit entre eux dans leur isolement, inexplicable
et
mal avoué. L’on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meu
599
faitisme sentimental qui l’empêtre de réticences,
et
le fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa pr
600
t est justement de voiler les intentions du récit
et
de les exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une im
601
e étrange harmonie entre le climat des sentiments
et
celui des campagnes désolées où ils se développent. Paysages tristes
602
désolées où ils se développent. Paysages tristes
et
sans violence, autour de ces êtres dont la détresse est d’autant plus
603
avant l’orage, le rose sombre d’une joue brûlante
et
fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant
604
mbre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent.
Et
dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumé
605
e manoir perdu, des fumées sur un paysage d’hiver
et
soudain sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion.
606
dère (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, février 1927, p. 265.
607
r de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère,
et
l’on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux
608
end le plus sympathique. « Officiellement comblé,
et
par dedans… comment bien dire ? inquiet ? aride ? heureux ? » pour lu
609
nce indispensable au perfectionnement de son âme.
Et
qu’importe si les Allemands qui, fréquente sontae, pour notre plaisir
610
s qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes,
et
là, gidiennes. Il se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de l
611
lui de l’homme même, ou de l’amateur distingué, —
et
ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se connaît avec une sorte de f
612
ce du cœur qui contraste avec une vie voluptueuse
et
assez désordonnée. Pourtant, entre Montclar et Ameline, un amour se n
613
se et assez désordonnée. Pourtant, entre Montclar
et
Ameline, un amour se noue, qui commence où souvent l’on finit. Et peu
614
mour se noue, qui commence où souvent l’on finit.
Et
peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve
615
pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle,
et
peut-être tendre, à se faire souffrir rejette l’un vers l’autre ces ê
616
rir rejette l’un vers l’autre ces êtres égoïstes,
et
fonde lentement leur amour, à force de petites blessures. Ce n’est pa
617
it de cette vie comme une arrière-pensée inquiète
et
un peu hautaine. Que la composition de cette réminiscence soit assez
618
mposition de cette réminiscence soit assez facile
et
« artiste » on hésite à en faire reproche à l’auteur. Cette espèce de
619
si humaine, est mieux que charmant, — douloureux
et
désinvolte, glacé, passionné. ad. « Guy de Pourtalès : Montclar (NR
620
Montclar (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans do
621
uicider, d’autant plus que vous n’y croirez pas —
et
pourtant… Il faut aussi que je vous dise qu’il fait très froid dans m
622
très froid dans ma chambre : le feu n’a pas pris,
et
d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuillez ne pas voir dans c
623
s ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses,
et
c’est là que j’ai découvert que vous existiez en moi, à certain désag
624
arracher à une obsession secrètement attirante ;
et
je pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouvie
625
es regards croisés n’avaient aucune signification
et
que mon anxiété seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin l’o
626
ut près de vous. Mon ami me fit un signe discret,
et
déjà il se préparait à vous rendre attentive à ma présence… Mais, alo
627
Je venais d’entrevoir l’image d’un couple heureux
et
banal, votre sourire répondant au mien, comme on voit au dénouement d
628
comme on voit au dénouement des films populaires
et
sur des cartes postales illustrées. Déjà la foule des danseurs nous s
629
ait. Je sentis une invincible lassitude me saisir
et
m’assis à l’écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je
630
œur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes,
et
les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombre livide, a
631
furieusement dans l’ombre livide, aux cris fêlés
et
déchirants des saxophones. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui a
632
désordre où je venais de jeter mon col de smoking
et
un œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont le seul défaut f
633
aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée,
et
ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’orifla
634
rs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera,
et
, me glissant auprès d’elle, je pourrai lui dire très vite quelques mo
635
de dix personnes s’engouffrait dans la cage rouge
et
or et s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comme précisément
636
personnes s’engouffrait dans la cage rouge et or
et
s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comme précisément un enf
637
Je me disais encore : Si je prends cet ascenseur
et
que je la croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fall
638
e-là qui venait de tourner à l’angle de cette rue
et
qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps, vous pouviez paraît
639
mon désir surmené vous appelait encore, haletant.
Et
le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’arrivée du prochain m
640
eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes,
et
ce chant désespéré qui vous appelait, assourdissant mes pensées ; et
641
ré qui vous appelait, assourdissant mes pensées ;
et
ces élans réticents, maladroits, contradictoires… Un autobus de luxe
642
sifflement particulièrement doux pour ma fatigue,
et
ces gens pressés et songeurs respectaient la folie douloureuse qui de
643
èrement doux pour ma fatigue, et ces gens pressés
et
songeurs respectaient la folie douloureuse qui devait contracter mon
644
ue je mêlais à mes pensées des fragments de rêves
et
les personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans les coul
645
ntes. Je voyais avec une sombre joie les employés
et
les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trot
646
ouviens plus que de cette déception insupportable
et
définitive de mon désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si je puis
647
eau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel.
Et
une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n’y a pas un seul
648
tre que la poésie consiste à écrire une phrase ».
Et
cette phrase, c’est un cheval savant qui la lui a dictée : « Madame E
649
r les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes
et
comme dictées de l’inconscient, au fond desquels on a si vite fait de
650
le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu.
Et
puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a-t-on di
651
rincipes chers à l’auteur du Secret professionnel
et
de la préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et défini
652
ace des Mariés — principes dont l’énoncé brillant
et
définitif restera l’un des titres les plus authentiques de Cocteau. P
653
itres les plus authentiques de Cocteau. Précision
et
relief du dialogue, ingénieuse utilisation des expressions courantes,
654
cteau ait réalisé là exactement ce qu’il voulait.
Et
pourtant cette admirable machine ne m’inquiète guère : je sais qu’ell
655
.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne .
Et
même il appelait Orphée « une tragédie de l’amour conjugal ». Vraimen
656
nous ne sommes pas de ces gens qui croient que 2
et
2 font 22, et qui confondent Jérôme et Jean Tharaud ! » Il y a des so
657
s pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22,
et
qui confondent Jérôme et Jean Tharaud ! » Il y a des soirs où tout ça
658
ient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme
et
Jean Tharaud ! » Il y a des soirs où tout ça semble idiot. Il y a des
659
ù une idée de la responsabilité s’empare de nous.
Et
nous calculons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en huit soirée
660
’agit de déranger 5000 personnes en huit soirées,
et
de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entre
661
, lugubrement fardée, l’haleine mauvaise, édentée
et
tâchant à prendre un accent anglais d’un comique assez macabre. Ses d
662
e spectacle que celui d’une maîtresse jadis belle
et
diserte qui tombe au ruisseau en prononçant de séniles calembours… Pé
663
onstre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu
et
le contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit enfin Dar
664
oul amène un scénario né entre deux cafés-nature,
et
presque sans qu’il s’en soit rendu compte. Clerc entrevoit un projet
665
n projet à deux faces. Lugin, qui est théologien,
et
de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que j
666
mme Mossoul. Pourtant, au milieu de ce paludesque
et
stérile consistoire, une idée de génie vint s’asseoir certaine nuit.
667
upe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate
et
Narcisse, un acte à grande figuration. » Enfin l’on joua aux petits d
668
’on joua aux petits dés le sort de notre parade —
et
l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de n
669
Synovie », parade « née du mariage de nos veilles
et
de nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un
670
x actrices, M. Grosclaude son fils Lucas Loukitch
et
une mise en scène fort ingénieuse qui permit à Mossoul de se perdre d
671
ore. À La Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres
et
cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’oreill
672
gts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds
et
d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit da
673
elever les indices chez ses jeunes contemporains,
et
qu’il vient appuyer de son autorité de critique et surtout de son exp
674
t qu’il vient appuyer de son autorité de critique
et
surtout de son expérience déjà riche de romancier. Son regard se prom
675
, cet air de rêverie d’un homme qui en sait long…
Et
, certes, il faut être un peu mage pour porter tant de richesses avec
676
tabler au café en face des personnages de Jaloux.
Et
peut-être que la comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais
677
u’elle livre si facilement au héros plus confiant
et
secrètement incertain de ce roman. À la veille de se marier, Jérôme P
678
’il attend de l’amour. Une confidence, un baiser,
et
il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aim
679
. Peu à peu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise
et
gagne la puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de long
680
es lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort,
et
qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit d
681
, seul, il la revoit dans une vision prestigieuse
et
désolée… M. Jaloux a trouvé là un sujet qui convient admirablement à
682
ssent aujourd’hui un réalisme discret mais précis
et
le sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos
683
ves éveillés. Tout un système de valeurs lyriques
et
sentimentales que la raison ignore ou tyrannise aveuglément, car « no
684
nous tromper sur tout ce qui est profond en nous,
et
elle ne manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril d’
685
M. Jaloux évite le péril d’un réalisme trop amer
et
celui du roman lyrique, par l’équilibre qu’il maintient entre ces deu
686
maintient entre ces deux inconscients : l’époque
et
l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire
687
z-vous manqués, lettres perdues, aveux incompris,
et
peut-être, un quiproquo de destinées… Le tragique du peut-être ; (com
688
n personnage épisodique : « Il confondait la rose
et
la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans ob
689
: « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange
et
l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décant
690
»). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche
et
décantée, profonde et délicieuse, gagnera à son auteur beaucoup d’ami
691
ense, sans obscurité, riche et décantée, profonde
et
délicieuse, gagnera à son auteur beaucoup d’amis inconnus. af. « Ed
692
aimée… (Plon, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mars 1927, p. 387-388.
693
ilm d’avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte
et
le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905
694
uit par trois ou quatre claques sur la poitrine ;
et
une crise intérieure par un court accès de danse de Saint-Guy. Art cl
695
un petit bateau de papier, sur fond de boulevards
et
parmi les toits flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phar
696
esques à trois dimensions mêlées avec une lenteur
et
une perfection dont une brève vue verticale donne la clé… Un enterrem
697
s dételé. Les amis affligés mangent les couronnes
et
suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la danseuse, fo
698
stre dont la baguette éteint tous les personnages
et
lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous ma
699
es et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes.
Et
c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans le domaine du mervei
700
ns le domaine du merveilleux moderne. Un peu plus
et
nous demandions grâce de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que
701
her d’admirer l’utilisation artistique ingénieuse
et
précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu
702
le résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve
et
dit : « C’est bien ça, c’est comme quand on rêve. » Un des défauts d’
703
presque inévitables dans une production de début,
et
Entr’acte mérite d’être ainsi qualifié : c’est peut-être le premier f
704
acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime,
et
se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de cri
705
René Clair un sens du miracle assez bouleversant.
Et
je ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imagin
706
le réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné.
Et
les fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque
707
ère qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau,
et
l’espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harm
708
té aussi réelle que celle dont nous avons convenu
et
que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » nous apparaî
709
rdis, dans un pays d’illuminations vertigineuses,
et
nous en sommes encore à nous frotter les yeux… Peut-être, quand nos r
710
r que ce témoignage sur les générations nouvelles
et
leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans l
711
pourvues d’une sombre grandeur, des surréalistes,
et
en même temps par cette solution universelle, la foi, il résume en lu
712
sume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur
et
la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop
713
e qui fait la grandeur et la misère de l’époque —
et
qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, où sa jeunes
714
ration nouvelle » avec une intelligente sympathie
et
un sens rare des directions générales. « Hamlétisme », pouvoir aigu d
715
ant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout
et
pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’absolu à la fois my
716
rocédant d’un goût de l’absolu à la fois mystique
et
anarchique : ce sont bien les grands traits de notre inquiétude. (Mai
717
tion de créer des dilemmes irréductibles, suprême
et
inconsciente ruse d’un inquiet qui veut le rester ? Ces deux solution
718
foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce,
et
régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’
719
ablement les exigences conjointes de l’inquiétude
et
de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore…
720
étude (Perrin, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, avril 1927, p. 563-564.
721
une puissance étrangère s’est emparée de mon être
et
a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire d
722
on échappé des Enfers — auxquels je crois encore,
et
pas seulement pour le pittoresque. — Attrape ! Il n’existe pas de t
723
lendide comme un éclat de rire de condamné à mort
et
à l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, t
724
s plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux
et
des plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les anges écœurés
725
élodramatique, d’une voix torturée, hurle au pape
et
au diable un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, ann
726
omprends pas ». On dit : « Je ne comprends pas »,
et
l’on pense : « C’est donc incompréhensible ». On dit : « C’est incomp
727
nsible ». On dit : « C’est incompréhensible ! » —
et
l’on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’
728
se de la loi sociale, patriotique, religieuse (?)
et
ci-devant morale qui protège votre paresse à concevoir en esprit. Ces
729
is mots vous ont délivré du plus absurde malaise,
et
vous rallumez votre cigare. Vous vous êtes assuré que la porte ferme
730
chambre du ciel. À travers l’amour ou la poésie —
et
d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantôm
731
dorables du désir, — quelques hommes y pénètrent,
et
le goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffri
732
mépris de l’honneur, le mot de Cambronne prodigué
et
des phrases d’un fascinant éclat : « Ô grand Rêve, au matin pâle des
733
de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs
et
labiles à l’immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de
734
e des tentatives de libération les plus violentes
et
belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, de bravades et de f
735
gré tant de maladresses dédaigneuses, de bravades
et
de faciles tricheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de l’Abs
736
se rendaient sans cesse à l’échelle de l’infini,
et
cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le sort commun
737
eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine,
et
vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle est née dans un caf
738
sse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens,
et
dire qu’elle est née dans un café de Paris. « Je n’attends rien du mo
739
rien de rien. » Riez-en donc, pantins officiels,
et
vous repus, et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre la voix
740
» Riez-en donc, pantins officiels, et vous repus,
et
vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre la voix d’un mystique.
741
omètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance.
Et
voici Aragon revêtu d’une dignité tragique qu’il trouverait sans dout
742
la part de littérature que renferme cette œuvre,
et
qui fait, en dépit des prétentions désobligeantes de l’auteur, son in
743
véritablement désespéré. Un Musset moins frivole
et
plus pervers, moins sentimental et plus sensuel, moins spirituel et p
744
moins frivole et plus pervers, moins sentimental
et
plus sensuel, moins spirituel et plus cinglant. Au lieu de vin doux,
745
oins sentimental et plus sensuel, moins spirituel
et
plus cinglant. Au lieu de vin doux, on nous sert des cocktails (un Mu
746
un Musset, seulement transposé dans notre siècle
et
chez qui tout est devenu de quelques degrés plus violent, plus acerbe
747
lus violent, plus acerbe, plus profond. En somme,
et
avant tout, un écrivain, un bel écrivain, comme on dit. Et qui sait t
748
tout, un écrivain, un bel écrivain, comme on dit.
Et
qui sait tirer un admirable parti littéraire de son tempérament vif,
749
parti littéraire de son tempérament vif, insolent
et
ombrageux. « J’appartiens à la grande race des torrents. » Une belle
750
pourrait l’oser dire comme Aragon sans ridicule.
Et
ce que je prenais pour le ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt un
751
ottisme assez fréquent dans les cafés littéraires
et
dont il serait le premier à s’amuser ? Février 1927. Relu Une vague
752
’amuser ? Février 1927. Relu Une vague de rêves
et
la préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plu
753
torique — mais la plus belle, — ce qui tressaille
et
m’atteint au vif, c’est tout de même un désespoir en quoi je ne vais
754
manuels de littérature — : « Un mysticisme creux
et
affamé est le contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou
755
tout de même moins misérable que Clément Vautel —
et
si ce nom revient sous ma plume, comme une mouche qu’on n’a jamais fi
756
nous tromper sur ce qu’il y a de profond en nous,
et
elle ne manque guère à ce devoir sacré. » (Edmond Jaloux.) Entre un
757
mes revus. Mais je suis vos travaux avec intérêt,
et
il m’a paru que depuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je me
758
-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres
et
de choses à aimer, et vous savez ce que cela suppose. Comprenez-moi :
759
aire, beaucoup trop d’êtres et de choses à aimer,
et
vous savez ce que cela suppose. Comprenez-moi : submergés, absolument
760
, sans se demander jamais si cela ne condamne pas
et
la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « hériti
761
mander jamais si cela ne condamne pas et la santé
et
la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la gr
762
a santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras
et
autres « héritiers de la grande tradition gréco-latine » pour assigne
763
fois dévote, phraseuse, sèche, d’humeur acariâtre
et
réactionnaire. Vous tracez des frontières géographiques à la raison ?
764
vos principes. Avec l’esprit contre votre raison.
Et
avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À bas le clair génie français. »
765
anifestation de ce divorce radical entre l’époque
et
les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule
766
parer du concept de l’esprit celui de Révolution.
Et
j’entends ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-
767
notre petite révolution à nous, dans tel domaine.
Et
c’est même ceci que je ne puis pardonner aux surréalistes : qu’ils ai
768
, Montaigne, Descartes, Schiller, Voltaire, etc.,
et
tout ce qui leur correspond dans l’ordre politique par exemple. Parce
769
s libérer de cette manie française, la politique,
et
ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter a
770
vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue
et
de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vo
771
n si authentiquement, si déplorablement français.
Et
puisque nous en sommes au surréalisme, ce produit parisien qui, comme
772
ivre ailleurs… Mais non, il y aurait trop à dire,
et
puis l’on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon,
773
que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton
et
leurs amis alternativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de dé
774
de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments.
Et
puis surtout, l’heure est venue de clore des discussions énervantes o
775
uit sans cesse par la quatrième dimension. Aragon
et
les surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et
776
auront raison même encore s’ils ont tort, envers
et
contre toutes les critiques qu’on pourrait leur adresser, parce que c
777
ls appellent la mort, parce qu’ils ont la passion
et
l’incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des entreprene
778
nd principe de violence commandait à nos mœurs. …
et
nous portant dans nos actions à la limite de nos forces, notre joie p
779
e qui prétendait nous empêcher de vivre, de rêver
et
de souffrir : culte du moi avec ses recettes garanties, chapelets d’o
780
apelets d’optimisme, tyranniques évidences, ordre
et
désordre, principes de Descartes, mathématiques aux pinces de crabe,
781
— on ne m’y prendra plus ! — morales américaines
et
hygiéniques en tous genres, instruction publique, situations acquises
782
es, sièges faits, autorités fondées sur la gloire
et
la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des êtres, mais le
783
fondées sur la gloire et la sénilité, etc., etc.
Et
certes ce n’étaient pas des êtres, mais leurs abstractions que nous h
784
s que nous. Nous nous connaissions dans les coins
et
nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévus de nous
785
que cette révolution ne demandait qu’à s’asseoir
et
que son siège était fait. Nous aimions la Révolution qui nous perdrai
786
ous aimions la Révolution qui nous perdrait corps
et
biens dans sa grandeur comme une femme merveilleuse nous perdrait cor
787
comme une femme merveilleuse nous perdrait corps
et
âme dans l’ivresse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de to
788
cherchions cette Révolution de toutes nos forces
et
séductions, comme on cherche cette femme à travers toutes les femmes.
789
Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeune.
Et
: encore un qui rue dans les brancards, c’est très bellettrien. Un di
790
avons tous fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ?
Et
puis l’aiguille divague vers des souvenirs, quand nous allions tous d
791
quand nous allions tous deux, ces bonnes farces,
et
aussi pourtant des histoires de copains qui ont mal tourné, on pensai
792
eunesse, mais voyons des affaires plus sérieuses.
Et
tout est dit. Ah ! c’est vrai, il allait oublier, il y a encore cette
793
s, surréalisme ? — Baptisé il y a cinq ou six ans
et
mort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la jambe, pardon e
794
noce, écrire un livre de tendances très modernes.
Et
des gens pour se gausser quand nous écrivons Révolution, et nous offr
795
s pour se gausser quand nous écrivons Révolution,
et
nous offrir un billet (simple course) pour Moscou, ou encore pour dem
796
ur demander à qui, enfin, à quoi nous en voulons,
et
finalement nous écraser par l’évidence définitive de notre absurdité.
797
é. Car l’homme « s’est fait une vérité changeante
et
toujours évidente, de laquelle il se demande vainement pourquoi il n’
798
d’éclairs qui nous atteignent sans cesse au cœur
et
nous revêtent miraculeusement d’aigrettes de folies et de joies ; n’a
799
us revêtent miraculeusement d’aigrettes de folies
et
de joies ; n’allez pas nous toucher, nous sommes dangereux. Un orage
800
rever sur le monde. Aigles d’amours, oiseaux doux
et
cruels, nous parlerons vos langues aériennes. On n’acceptera plus que
801
ir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8.
Et
malgré certaines théories bien superficielles et hâtives, comme cette
802
Et malgré certaines théories bien superficielles
et
hâtives, comme cette prétention à la libération par le Rêve. « La lib
803
berté commence où naît le merveilleux. » Au vrai,
et
surtout pour un homme qui élit Freud « président de la République du
804
rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ;
et
ce n’est pas se libérer que de brasser ces chaînes sonores. 9. Lettr
805
9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe
et
les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répan
806
Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie
et
mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière vie
807
épandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford
et
Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennent des France et d
808
es riches. Très loin derrière viennent des France
et
des Bordeaux. 12. Proust excepté, et dans un domaine plus étroit, qu
809
des France et des Bordeaux. 12. Proust excepté,
et
dans un domaine plus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13. Le
810
avec maîtresse. École savait le mythe du voyage,
et
qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Elle était donc venue.
811
renons. » On lui offrit immédiatement un fauteuil
et
un violon, pour qu’il en joue, au printemps, s’il savait … R.S.V.P
812
a dans le salon de la duchesse, lui baisa la main
et
l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, q
813
. Le duc riait sous une table, complètement ivre,
et
Bettina lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ?
814
la me donne encore plus de plaisir. » Le duc paya
et
s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’enterrement aura lieu sa
815
lomon le danseur triste baisa cette main cruelle…
et
quitta le bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un so
816
aces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons,
et
des violons déchirants dans sa tête… Mais le sommeil s’évaporait aux
817
pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouverte
et
des accords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis le silence se
818
. Il respire déjà l’odeur merveilleuse des objets
et
des êtres véritables. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers le
819
va s’ouvrir, qu’un monde s’est ouvert devant lui.
Et
l’eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’e
820
devant lui. Et l’eau n’est pas moins somptueuse.
Et
bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est une question d’amitié. Pourtant je
821
d’amitié. Pourtant je suis seul dès cette heure,
et
mes amis fuiront un lâche. Parce que je reviens seul. Mais moi, qui r
822
es à de certaines grandes dames où je préférais —
et
lui aussi — me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas le reten
823
s où je préférais — et lui aussi — me rendre seul
et
sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivr
824
, n’ignorent rien des courants les plus modernes,
et
sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation
825
extrémismes sont prônés comme vertus cardinales,
et
qui forme ailleurs le premier public des jeunes artistes, n’existant
826
odigue, s’il rentre au foyer dans une Rolls-Royce
et
fortune faite, tout le monde s’accorde à dire qu’on n’attendait pas m
827
lice que de paresse dans les jugements du public,
et
moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On ne m’en voudra pas de n
828
i dates de naissance, ni traits d’enfance géniaux
et
prophétiques, ni opinions de critiques autorisés. Du benjamin, Eugène
829
les fenêtres, dans une chambre peinte en bleu vif
et
ornée de surprenants batiks, il s’est livré pendant quelques années à
830
uelques années à des recherches un peu théoriques
et
abstraites. De cette époque datent des toiles comme le Souvenir de l’
831
des toiles comme le Souvenir de l’Évêché. Décors
et
personnages semblent d’une matière idéale. Tout est lisse et parfait.
832
ges semblent d’une matière idéale. Tout est lisse
et
parfait. Trop parfait seulement. Il manque à ces recompositions de la
833
isonnière qui regarde ailleurs… Qu’il sorte enfin
et
se mette à graver les scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière,
834
s scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière,
et
c’est merveille de constater combien l’épuration rigoriste de sa tech
835
n art très volontaire, qui connaît ses ressources
et
sait en user avec la sobriété qui produit le maximum d’expression. Ce
836
e qui permettra de reconnaître une de ses œuvres.
Et
aussi ce brin de comique un peu bizarre qu’il glisse si souvent là où
837
de s’astreindre à la voluptueuse rigueur latine,
et
qui tout en s’épurant dans des formes claires a su les renouveler. Il
838
quelques frileux, mais les autres sont soulagés.
Et
ne fût-ce qu’en prenant une initiative comme celle de Neuchâtel 1927
839
eur, mais il taille ce visage dans une pâte riche
et
un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme
840
o ou de Fiesole, il peint Florence avec des roses
et
des jaunes jamais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes qui le pr
841
de des yeux de Japonais d’une ironie mélancolique
et
qui voient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours l’air de song
842
sa seconde patrie si la peinture est sa première
et
Neuchâtel la troisième… Il y a par Eugène Bouvier quelque chose de no
843
uliers chemins d’accès. Ce qui d’abord vous prend
et
vous retient dans un tableau de Bouvier, c’est toujours une sorte de
844
; que l’on consente en effet à telle déformation,
et
tout devient satisfaisant. Ce lyrique, ce mystique exige pour être co
845
gne entre deux pluies. Il aime ces heures où ciel
et
onde se mêlent, et sait rendre mieux que personne la liquidité d’un l
846
es. Il aime ces heures où ciel et onde se mêlent,
et
sait rendre mieux que personne la liquidité d’un lac, certaines atmos
847
iquidité d’un lac, certaines atmosphères délavées
et
sourdes. « Temps couvert, calme, légères précipitations » annonce le
848
cènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops
et
d’Ensor ; pensait-on… Déjà il avait des disciples (Madeleine Woog, G.
849
ment s’éloigne pour entonner une chanson à boire.
Et
sa technique auparavant volontairement maigre se faisait trop lâche.
850
rt est rendu à lui-même. Il atteint son équilibre
et
sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas e
851
hesse de lueurs sur une matière traitée largement
et
d’une abondance très sûrement ordonnée. Je crois qu’on doit beaucoup
852
pour s’en assurer. La tête large, aux yeux clairs
et
assurés, le cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du po
853
, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids
et
nulle lourdeur, tout cela communique une impression de puissance domp
854
la communique une impression de puissance domptée
et
qui semble se faire une volupté de la discipline qu’elle s’impose. Et
855
re une volupté de la discipline qu’elle s’impose.
Et
voilà qui fait encore plus « Renaissance » : le costume est drapé ave
856
e devant le visage. Aurèle tient un livre ouvert,
et
ce n’est pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure
857
ées à vendre des couleurs, à encadrer des glaces.
Et
plaise aux dieux que les visages qui s’y reflèteront soient aussi bea
858
ant le sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari).
Et
puis voici François Barraud, le plus jeune des frères. Il vient appor
859
dans l’utilisation du clair-obscur qui simplifie
et
renforce l’expression. Décidément ces trois frères sont une école. Dé
860
yaume d’Utopie. André Evard va nous y introduire,
et
nous ne saurions trouver guide plus pittoresque. Celui-ci s’était éga
861
ez la même route que nous ? À la bonne heure ! ».
Et
l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on apprend peu à peu des
862
re ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous.
Et
l’on apprend peu à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a
863
sserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix
et
d’oranges. Il administre une feuille religieuse. Il déniche à Paris d
864
rge de mystère. Que va-t-il se passer là-dedans ?
Et
ces roses sont le signe de quel occulte prodige ? Intrigué, vous repr
865
u traditionnelle, d’un style pourtant assez large
et
que n’entravait pas son scrupule réaliste. ⁂ Mais voici dans son cost
866
emblée dans ses statues à un beau style dépouillé
et
hardi. Mais il y avait quelque lourdeur dans des morceaux comme le Jo
867
équilibre entre le réalisme imposé par les sujets
et
un style qui sait rester ample, d’une simplicité non dépourvue de pui
868
tisheim ; que Vincent Vincent, peintre, romancier
et
critique d’art, compose des coussins, des couvertures de livres, des
869
livres, des étoffes, d’une somptueuse fantaisie ;
et
qu’Alice Perrenoud combine de petits tableaux en papiers découpés, av
870
ités, se trouvent former un mouvement actif déjà,
et
dont Neuchâtel 1927 sera la première manifestation collective. Est-i
871
part, des œuvres aussi différentes par leur objet
et
le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili,
872
ent toutes une recherche de la simplicité savante
et
de la perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse q
873
int si nous n’avions fait qu’affirmer l’existence
et
la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est t
874
s’est trop souvent plu à dire si âpre, prosaïque
et
d’une maigre végétation artistique. Pays où l’on préfère la netteté u
875
Lecache, Jacob (mai 1927)ah Voici un livre dur
et
sans grâces, qui ne manque pas d’une beauté assez brutale, pour nous
876
pas d’une beauté assez brutale, pour nous choquer
et
s’imposer pourtant. M. Lecache présente le problème juif avec une obs
877
arais. Le père est un tailleur, biblique, austère
et
probe, qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob, l’aîné se révo
878
e ses origines. Le vieux père s’effondre de honte
et
de douleur. « On vend de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob
879
prend une âpre rapidité avec l’ascension de Jacob
et
ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes et de vulgarités pou
880
ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes
et
de vulgarités pour les derniers chapitres, denses, violents, et dont
881
és pour les derniers chapitres, denses, violents,
et
dont le profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jac
882
d’être plus fort que cette bourgeoisie fatiguée,
et
de suivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et
883
tin que vous m’avez assigné à force de m’humilier
et
de me craindre. » ah. « Bernard Lecache : Jacob (NRF, Paris) », Bib
884
: Jacob (NRF, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 689-690.
885
ude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain,
et
par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à une conce
886
ait bientôt considérer toute joie comme illusoire
et
livre l’individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avo
887
te joie comme illusoire et livre l’individu pieds
et
poings liés à l’obsession qu’il voulait avouer pour s’en délivrer peu
888
encore l’« élan mortel » que décrivait Mon Corps
et
Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre o
889
re ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit
et
nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; ma
890
; mais qu’elle s’acharne sur le détail dégoûtant
et
mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’auteur n
891
dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois,
et
l’on voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière po
892
e n’aime guère ce style abstrait, semé de redites
et
d’expressions toutes faites qui trahissent une écriture hâtive. Mais
893
dans l’œuvre de René Crevel un sens de la douleur
et
un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. « René Crevel : La
894
icile (S. Kra, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 690.
895
a douleurak, ce sont de belles syllabes sereines,
et
dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusemen
896
même, de laqué, d’élégant, de « bien français » ;
et
le mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental qu
897
us sentimental que cruel. « J’ai la beauté facile
et
c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique, mais au filet si a
898
e de la douleur (NRF) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’
899
udesse. « Il s’examine jusqu’au ventre de sa mère
et
cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonné à mal » (
900
a mère et cognoit que dès lors il a esté corrompu
et
infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’est pas beau, mais on
901
cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect
et
adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’est pas beau, mais on y sent un
902
-t-il avec une franchise qui la rend sympathique.
Et
puis, tout de même, on est bien heureux de rencontrer chez les jeunes
903
e point le sens de l’époque, une vision si claire
et
si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales po
904
redonner quelque vitalité à notre civilisation, —
et
je sais bien que c’est là un des signes de sa décadence. Il y a du ch
905
a du chirurgien chez ce soldat devenu « scribe »
et
qui s’en exaspère. Souvent maladroit, incertain, brutal : mais faison
906
voici un homme d’aujourd’hui, presque sans pose,
et
décidé à mépriser le bluff. al. « Pierre Drieu la Rochelle : La Sui
907
dées (Au Sans Pareil) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, mai 1927, p. 694.
908
Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)m …
et
je jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on m’a appris à voler. Ari
909
). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga
et
une eau minérale devant son étrange convive, celui-ci prit la parole
910
ans, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu
et
le corps se fige à mesure que l’esprit s’établit sur ses positions. O
911
arda longuement. » Mes parents me savaient vierge
et
c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout
912
e qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois
et
bêtement heureux. Le lendemain était le premier jour du printemps. Le
913
e bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait,
et
nous étions très jolis de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de
914
ui m’aimait, et nous étions très jolis de bonheur
et
d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savai
915
après un silence vertigineux. Il vit mon sourire
et
pleura. Alors une rage s’empara de mon corps tout entier, je criai un
916
tout entier, je criai un juron, claquai la porte
et
courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à la gare,
917
écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit
et
je partais dans une direction quelconque. Il advint que ce fut celle
918
on pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode
et
la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant u
919
terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa,
et
une femme en robe bleue légère qui me regarda un instant, si doucemen
920
d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière
et
que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’ouvris firen
921
oyait la mer, des bateaux, des nuages, une avenue
et
ses autos rouges, tout un couchant de grand port de la Méditerranée.
922
si envie de pleurer, à cause du soir trop limpide
et
trop vaste, comme un avenir de bonheur fiévreux — celui justement que
923
ue, toutes les offres du hasard, ce poète immoral
et
malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de l’Europe centrale — régio
924
un monde sans vieilles filles, sans capitalistes
et
sans gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz : Les millions que
925
al avec l’économique, qu’une expression nouvelle,
et
non dénuée d’ironie, de mon mépris pour ce qu’ils appellent, ridicule
926
ur la gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée
et
prit un temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique
927
ivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel
et
de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à j
928
er, très souvent ignoré d’elles-mêmes auparavant,
et
pas toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété éta
929
ropriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires
et
des plus généralement répandus, j’ai vite fait de classer mon monde d
930
observations théoriques que je tiens pour vraies,
et
j’en vérifie les manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreu
931
rodigalité d’épreuves, contre-épreuves, variantes
et
enjolivures où je vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dir
932
eait à émettre une opinion, même la plus générale
et
la moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas lais
933
elle m’apparaît comme un divertissement perpétuel
et
dénué d’inquiétude. Et cela n’est pas sans me charmer, croyez-moi. Ca
934
n divertissement perpétuel et dénué d’inquiétude.
Et
cela n’est pas sans me charmer, croyez-moi. Car, enfin, si je suis ic
935
pas dire inconscience ! qui s’attache à vos faits
et
gestes. L’on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farc
936
euvent avoir de « bien jeune », de banal presque,
et
, pis, d’agréablement paradoxal. Seulement, pour quiconque est aussi p
937
olté » prend une saveur de raillerie assez amère.
Et
peut-être apprendrez-vous à découvrir derrière certaines de mes plais
938
evue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur
et
qu’elles n’engagent pas sa responsabilité. (N. de la R.) »
939
ntiques : le goût du suicide, l’habitude de boire
et
de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réal
940
a réalité, l’exaltation maladive de l’imagination
et
de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes
941
s ses formes : raison, jugement, simple bon sens,
et
l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui s
942
rise, les valeurs auront retrouvé leur stabilité,
et
comme M. Albert Muret dont le Journal de Genève parlait naguère, tu
943
t entraîner assez naturellement chez des jeunes «
et
qui pensent » ce goût de l’évasion caractéristique de tous les « vice
944
la révolution russe… cet autre fait de la guerre…
et
puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison utilitaire au
945
ver Patsy, l’Irlandaise perdue par cet improbable
et
sympathique Paterne. Sous le fallacieux prétexte d’une flânerie de sa
946
vous découvrez dans ses fantoches une malicieuse
et
fine psychologie. Mais à ce mot, son visage s’assombrit un peu. « Tou
947
e son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit,
et
qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et p
948
rer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés.
Et
puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, car voici «
949
lisse un grand souffle oblique plein de fraîcheur
et
de pardon. » am. « Pierre Girard : Connaissez mieux le cœur des fem
950
es (Simon Kra, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, juillet 1927, p. 114-115.
951
si je dis : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ;
et
sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur
952
i cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable
et
ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils trouvent
953
rs : on voit trop qu’ils trouvent ça pittoresque.
Et
le plaisir d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en
954
plaisir d’être nu devant un public supposé dévot,
et
qui n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de l’impossibilité
955
supposé dévot, et qui n’ose en croire sa pudeur,
et
qui doute enfin de l’impossibilité des miracles ! Quelles voluptés pl
956
ité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles
et
plus aiguës ? On vaincra jusqu’à sa gueule de bois pour en faire des
957
’eau un goût étrange. L’eau est incolore, inodore
et
sans saveur. Mais fraîche. Ainsi, jusque dans votre mépris pour le pi
958
’allez pas me surprendre par-derrière. Une fois —
et
ce n’est pas que je m’en vante, — j’ai tué un amour naissant, à force
959
’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café
et
de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le fli
960
ses déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église
et
les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ai
961
our dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris
et
cette attente également exagérés. Vous savez bien que nous cherchons
962
ttérature nous est un moyen seulement d’atteindre
et
de préparer d’autres choses, d’autres actions, ou des états intérieur
963
puissance15. Il faudrait des choses plus lourdes
et
plus irrésistibles, percutantes. Qui vous échappent en vous blessant.
964
n, comme le goût d’une pierre rêche sur ta langue
et
grinçante sous ta dent. Des souplesses qui se retournent brusquement
965
ent. Des souplesses qui se retournent brusquement
et
vous renversent. Des présences tellement intenses que tout se fond ca
966
unicable qu’il deviendrait inutile de la publier.
Et
même, en passant à la limite, on peut imaginer que si elle était réal
967
haine de cette esthétique ou de ce sens social, —
et
voilà qu’ils perdent même la problématique utilité de liaison qui éta
968
états de crise afin de retrouver son équilibre —
et
dont on tire parfois quelque plaisir, plus rarement, de quoi se payer
969
tit voyage. C’est l’aveu d’une faiblesse secrète.
Et
c’est une réaction de défense. On cherche un mot, une phrase, pour tu
970
réalité dont la connaissance devient douloureuse
et
troublante. Ainsi la conscience tue la connaissance. (« Connaissance
971
ue. Il ne s’agit pas de la connaissance abstraite
et
rationnelle dont le monde moderne se contente, et qui tend à remplace
972
et rationnelle dont le monde moderne se contente,
et
qui tend à remplacer, grâce à la mentalité scolaire et primaire en pa
973
i tend à remplacer, grâce à la mentalité scolaire
et
primaire en particulier, toute connaissance véritable du monde.) Litt
974
’avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif.
Et
cela fournit un merveilleux sujet de conversation, au café. Dans un s
975
irme que je n’y échapperai pas plus qu’un autre :
et
qu’un beau soir il faille écrire pour vivre, possible ; mais, pour sû
976
a exprimé : « On publie pour chercher des hommes,
et
rien de plus. » Chercher des hommes ! Ah ! cher ami, nous ne sommes p
977
n’est-ce pas, à poursuivre une quête de l’esprit.
Et
vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines douloureuses
978
ales, ou menaces pour leurs instables certitudes,
et
qui nous font un péché de notre acceptation des réalités spirituelles
979
’elle soit le langage chiffré de notre inquiétude
et
de nos naissantes certitudes, le seul langage peut-être qui nous perm
980
belle histoire, une autre très belle histoire ». (
Et
vous verriez à quoi cela peut servir, une citation.) Mais non, cher a
981
de monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert
et
de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman
982
ris. Cambronne (général), 1770-1842. Louis Aragon
et
Paul Éluard, hommes de lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, d
983
2. Louis Aragon et Paul Éluard, hommes de lettres
et
poètes surréalistes. Paul Valéry, de l’Académie française. Narcisse,
984
nes ». Leurs amours sont des pastiches de Morand,
et
ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». o. « La
985
jours (juillet 1927)p Ces « cahiers politiques
et
littéraires »17, rédigés par Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont
986
et littéraires »17, rédigés par Drieu la Rochelle
et
Emmanuel Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule re
987
langue française où l’on dise la vérité librement
et
pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir citer, faute de place
988
de haine, entre les athées de l’antidémocratisme
et
les athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les
989
u Capitalisme quand il est conscient de soi-même,
et
les athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à
990
onscient de soi-même, et les athées du Socialisme
et
du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’achèvement d’un certain m
991
tain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère
et
dénuée de tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les homme
992
contre le joug atrocement positiviste des Maurras
et
des Mussolini, des Lénine et des Ford. Alors les hommes hurleront un
993
itiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine
et
des Ford. Alors les hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous
994
lerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient
et
de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d
995
radition — en ceci au moins. Nous nous retirons :
et
ce n’est pas que nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que l’ind
996
qui peuvent échapper à un jeune homme moins grave
et
qui manifeste franchement sa jeunesse. (« Vous vous souciez vraiment
997
qu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance
et
stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun re
998
nnue d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs
et
l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie d
999
lentendus viennent de là. Nous sommes assez sages
et
assez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter les conséquences.
1000
es assez sages et assez fous pour ne pas en gémir
et
pour en accepter les conséquences. Et puis, de temps à autre, voici q
1001
as en gémir et pour en accepter les conséquences.
Et
puis, de temps à autre, voici que nous parvient un signe d’amitié qui
1002
ouvertes qui nous consolèrent de tout le reste.
Et
maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année, renaissant
1003
nt de tout le reste. Et maintenant voici Genève
et
son mystère. Car chaque année, renaissant des décombres où s’anéantir
1004
naissant des décombres où s’anéantirent l’honneur
et
la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance av
1005
Central de Genève ? Tout est possible : la guerre
et
la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil
1006
réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN,
et
même Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle. Et puis, ils on
1007
s, Lounatcharsky, la SDN, et même Edmond Gillard,
et
même, et surtout, un miracle. Et puis, ils ont des vieux un peu là, d
1008
charsky, la SDN, et même Edmond Gillard, et même,
et
surtout, un miracle. Et puis, ils ont des vieux un peu là, du grand A
1009
Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle.
Et
puis, ils ont des vieux un peu là, du grand Arthur-Alfred-Albert au n
1010
ins grand Tanner. (On a fait ses preuves, quoi !)
Et
puis, qui sait, peut-être sauront-ils rallier le dernier disciple du
1011
rallier le dernier disciple du Bienheureux Jean…
Et
puis, en voilà assez pour ranimer la curiosité des plus blasés. Lecte
1012
ve. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions
et
ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de nos péchés. Ils s
1013
rge le poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres.
Et
nous y tenons, ah ! comme nous y tenons ! q. « Adieu au lecteur »,
1014
ntes réminiscences, des évocations intérieures, —
et
dans l’abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circons
1015
irconstances d’une aventure ancienne. Entre hier
et
demain : Une femme « encore jeune » se souvient d’un danseur de ses 2
1016
ent troubler de ravissantes amours d’adolescents.
Et
c’est Un vieil été. Cette nouvelle, très supérieure aux deux autres,
1017
sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence
et
regrets, un ton qui permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi d
1018
rtaine. C’est un art de détails ; mais si délicat
et
d’une si subtile convenance avec son objet qu’il en saisit sans mièvr
1019
ns mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble
et
l’insidieuse mélancolie. Un détail piqué adroitement, papillon dont f
1020
ie, de la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ;
et
voici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’auteur lui-même
1021
amours (Plon, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, août 1927, p. 244-245.
1022
dmond Jaloux. C’est un recueil de divers articles
et
essais, dont certains — le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux
1023
parler mieux que personne des poètes scandinaves
et
des romantiques allemands parce qu’il partage avec eux ce goût du rêv
1024
hie morale, mais une sorte de synthèse de l’homme
et
de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai,
1025
Rilke y apparaît comme une de ces âmes mystiques
et
raffinées telles qu’on en découvre chez certaines femmes et l’on y vo
1026
es telles qu’on en découvre chez certaines femmes
et
l’on y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bi
1027
illeux piège sentimental à la raison raisonnante.
Et
qu’il nous mène un peu plus loin que la sempiternelle « stratégie lit
1028
e (Émile-Paul, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1927, p. 787-788.
1029
ommande, une Promenade dans le Midi. Récit alerte
et
familier (un brin pédant et un brin vulgaire par endroits, mais pour
1030
le Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant
et
un brin vulgaire par endroits, mais pour rire), des difficultés, hési
1031
, le malaise d’écrire. Bopp est très intelligent.
Et
plein de verve, et pas embarrassé du tout pour vous lâcher un beau pa
1032
re. Bopp est très intelligent. Et plein de verve,
et
pas embarrassé du tout pour vous lâcher un beau pavé mathématique au
1033
façons parfois bien désobligeantes de voir juste.
Et
quand son bonhomme se plaint de ce que son œuvre lui apparaît en même
1034
aît en même temps que « fatale », « si arbitraire
et
si facultative », je me dis qu’il n’en saurait être autrement tant qu
1035
bord dans ces 50 pages. Beaucoup sont excellentes
et
leur facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est le combat d’un
1036
esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent
et
les joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (p
1037
uses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui.
Et
aussi (presque imperceptible, mais ici décisive), une secrète complai
1038
ance du Livre, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1927, p. 791.
1039
dité d’un semblable système. » Musset. Une rose
et
un journal oubliés sur le marbre vulgaire d’une table de café. Je ven
1040
gaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir
et
de commander une consommation. Comme d’habitude, un peu après six heu
1041
d’une vie honnête de type courant. Pour dix sous
et
le prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les
1042
is je suis pris dans l’absurde réseau des lignes,
et
cette mécanique me restitue chaque fois un peu plus de lassitude, un
1043
ée me gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (
Et
je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le tambour livra
1044
si belle rose.) Le tambour livra un homme élégant
et
tragique, qui se tint un moment immobile, cherchant une table, puis s
1045
une table, puis s’avança lentement vers la mienne
et
s’assit sans paraître me voir. Une grande figure aux joues mates, aux
1046
oues mates, aux yeux clairs. Il déplia le journal
et
se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quan
1047
e les pages d’annonces. On m’apporta une liqueur.
Et
quand j’eus fini de boire, mes pensées plus rapides s’en allèrent un
1048
s plus rapides s’en allèrent un peu vers l’avenir
et
j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite automobi
1049
r ses traits. Puis il reprit les dés brusquement,
et
me fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise
1050
La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés
et
les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une légère ex
1051
. Je gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai
et
je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement.
1052
eurs du bar me remplissaient d’une joie inconnue.
Et
je me refusais sans cesse aux questions qu’en moi-même posait ma rais
1053
erais à tout coup. L’étranger se mit à discourir.
Et
dans mon ivresse, ses paroles peignaient des tableaux mouvants où je
1054
, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer,
et
tu te réjouissais, parce que tu n’as pas beaucoup d’imagination, et q
1055
is, parce que tu n’as pas beaucoup d’imagination,
et
que tu es un pauvre vaudevilliste qui use à tort et à travers de situ
1056
que tu es un pauvre vaudevilliste qui use à tort
et
à travers de situations complètement démodées et d’intrigues usées ju
1057
et à travers de situations complètement démodées
et
d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre,
1058
ce de bonheur qu’ils croient lié à la possession,
et
que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le-bonheur. En so
1059
tous ces gens qui perdent leur vie à la gagner9,
et
leur façon inexplicable de lier des valeurs morales aux cours de bour
1060
anuels scolaires. Les voler, pour leur apprendre.
Et
leur manie aussi de situer le paradis dans la classe d’impôts immédia
1061
plaisirs, avec assurance contre faillites morales
et
douleurs d’amour — ô vertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inven
1062
se morale inconcevable, temples de leurs paresses
et
de leurs lâchetés, glorification de leur impuissance à concevoir un a
1063
e bonheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman
et
l’Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre, perdre ; et
1064
marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre, perdre ;
et
c’est toujours à qui perd gagne ! Sauter follement d’une destinée dan
1065
ême joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue
et
part sitôt que je vais m’endormir, ah ! galope, caracole, éclabousse,
1066
ont jamais rien, écoutez-les, comme ils me jugent
et
leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça les dérange terribl
1067
d ils n’ont plus que des baisers au goût d’adieu,
et
l’avenir où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort.
1068
r où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue
et
la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un
1069
ons. Les lustres doraient un brouillard de fumée,
et
la musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à not
1070
femme était assise à notre table, en robe rouge,
et
très fardée. Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour un der
1071
la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés,
et
partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi se mit à
1072
dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait
et
l’étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé
1073
l’étranger aussi se mit à me regarder bizarrement
et
j’étais possédé de joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser l
1074
regarder bizarrement et j’étais possédé de joies
et
de peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la
1075
allut se lever, traverser le café dans la musique
et
la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient fo
1076
voyage. Je me sentis perdre pied délicieusement.
Et
de cette nuit peut-être, je ne saurai jamais rien… (sinon qu’au lende
1077
ertains soirs. Il faut pourtant rentrer chez moi,
et
ma femme m’embrasse et me regarde avec inquiétude, parce que je ne su
1078
pourtant rentrer chez moi, et ma femme m’embrasse
et
me regarde avec inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait le
1079
m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains.
Et
je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostrophe, souda
1080
s. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté.
Et
je t’apostrophe, soudain plein de mépris et de désespoir, ô vie sans
1081
heté. Et je t’apostrophe, soudain plein de mépris
et
de désespoir, ô vie sans faute, vie sans joie… Ah ! plus amère, plus
1082
(janvier 1928)aq C’est un livre sympathique ;
et
il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans
1083
res de Catherine-Paris cette magie des sensations
et
des rêves de l’enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pen
1084
te magie des sensations et des rêves de l’enfance
et
cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui faisaient dé
1085
prement romanesque, naissant des situations mêmes
et
non de dissertations lyriques à leur propos. Mais dans ce roman, il n
1086
Il y a encore la princesse, le témoin intelligent
et
un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette
1087
ltent à la fois le défaut de composition du livre
et
sa richesse. L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tou
1088
de liberté d’esprit, une pénétration de jugement
et
une ironie assez amère qui étonnent de la part d’une femme aussi femm
1089
uvailles spirituelles, malicieuses ou poétiques ;
et
ce n’est pas qu’il ne s’y glisse quelque préciosité ou quelques « poi
1090
réalise pas une synthèse plus organique du roman
et
des mémoires. Mais si son début permet de croire que le Perroquet Ver
1091
aris (Grasset, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, janvier 1928, p. 121-122.
1092
es les forces du temps y concourent obscurément ;
et
, pour peu que cela continue, pour peu que la bourgeoisie intellectuel
1093
s années. Mais peut-être est-il temps encore. Ici
et
là, quelques cris s’élèvent dans le désert d’une époque déjà presque
1094
lainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé
et
ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stérile et ma
1095
étisent, ceux qui jettent une imprécation stérile
et
magnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le
1096
imprécation stérile et magnifique contre l’époque
et
ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une
1097
admettre qu’une époque entière ait pu se tromper,
et
se tromper mortellement. Il suffit pourtant de regarder autour de nou
1098
nt. Il suffit pourtant de regarder autour de nous
et
d’en croire nos yeux. I. L’homme qui a réussi Je prends Henry Fo
1099
nds Henry Ford comme un symbole du monde moderne,
et
le meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du typ
1100
proché plus que lui du type idéal de l’industriel
et
du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa popularité unive
1101
a vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie
et
mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe son enfance à jouer avec
1102
. Il passe son enfance à jouer avec des outils, «
et
c’est avec des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il. Le plus
1103
achine de route, jusqu’au jour présent, ma grande
et
constante ambition a été de construire une bonne machine routière. »
1104
onde tôt après la Société des automobiles Ford, «
et
commence à réaliser son rêve, le type unique d’automobile utilitaire
1105
eu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour,
et
la possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus
1106
s usines, des salaires, des conditions de travail
et
de repos qu’il offre à ses ouvriers semblent bien apporter une soluti
1107
ne solution définitive aux problèmes du surmenage
et
du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas le droit humainement d
1108
des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie
et
mon œuvre une impression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’o
1109
éprouve toujours au récit de succès mirobolants,
et
le charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour
1110
la popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford
et
des livres qui les répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t
1111
ore de régler pacifiquement le conflit du capital
et
du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait récemment un économis
1112
re quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande
et
constante ambition ». Il semble que toute sa carrière — pensée, métho
1113
l’auto routière : naissance de sa passion froide
et
tenace. Il s’efforce d’en réaliser l’objet par ses propres moyens, à
1114
l’humanité par la possession d’automobiles Ford.
Et
, comme il est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditi
1115
rationnelles de la production, avec cette netteté
et
cette décision qu’une passion contenue peut donner à l’homme d’action
1116
s c’est ici que Ford montre le bout de l’oreille,
et
que son but réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir
1117
industriel comptait. La tromperie est préméditée.
Et
le scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycho
1118
de son instinct de préservation, d’autorégulation
et
d’alternances. Tel est ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui
1119
asie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat
et
de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparen
1120
at et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers
et
leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les prendre dan
1121
ction s’intensifie, plus il faut créer de besoins
et
de loisirs. Or, l’industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais
1122
rogressant. Mais la nature humaine a des limites.
Et
le temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusq
1123
er jusqu’à quel point Ford est conscient des buts
et
de l’avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe
1124
consiste à travailler pendant le temps convenable
et
à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablement tout en restant
1125
ail de sa vie privée. Cette liberté particulière,
et
cent autres pareilles, composent, au total, la grande Liberté idéale
1126
es, composent, au total, la grande Liberté idéale
et
mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Lib
1127
e d’huile dans les rouages, n’est-ce pas charmant
et
prometteur ? Et que dire de cette admirable simplification : « Sur qu
1128
es rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ?
Et
que dire de cette admirable simplification : « Sur quoi repose la soc
1129
n : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes
et
les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » «
1130
lus naïf matérialiste que nous avons affaire ici.
Et
ses prétentions « idéalistes » n’y changeront rien. D’ailleurs, voici
1131
nous ne concernent pas particulièrement les autos
et
les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel !
1132
issent sans réserve aux thèses de cet orgueilleux
et
naïf messianisme matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers la f
1133
nous nous absorbons trop dans ce que nous faisons
et
ne pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout not
1134
dirigés uniquement vers la production matérielle
et
vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais
1135
irer des conséquences, alors que Ford passe outre
et
se remet à discuter des points de technique. Il n’a pas senti qu’il t
1136
s forces spirituelles, le tout agrémenté d’humour
et
exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr l’adhésion du gros pu
1137
it prononcé définitivement le divorce de l’esprit
et
de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable err
1138
ligé à la révision des valeurs, la plus difficile
et
la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de
1139
: celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit
et
de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière
1140
» derrière lequel on se réfugie avec une paresse
et
une légèreté inouïes, c’est le signe d’une complicité avec un état de
1141
nce de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience.
Et
qui n’en pourrait citer un exemple individuel ? Nous savons assez en
1142
tinées à charmer les loisirs de personnes oisives
et
raffinées, réunies pour admirer mutuellement leur culture », dit Ford
1143
ur admirer mutuellement leur culture », dit Ford.
Et
tout est dit ! Le simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tr
1144
ens américain. On en fait quelque chose de jovial
et
d’alerte, quelque chose de très sympathique et pas dangereux du tout.
1145
al et d’alerte, quelque chose de très sympathique
et
pas dangereux du tout. On n’en fait pas une philosophie. Mais, sans q
1146
Une fois qu’on a compris à quel point le fordisme
et
l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « e
1147
en être, c’est-à-dire se soumettre à la technique
et
s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit, et tomber pre
1148
tir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
et
tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter la
1149
s un anarchisme stérile. 1° Accepter la technique
et
ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mouvement si rég
1150
mouvement si régulier qu’il en devient insensible
et
que la fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géo
1151
hiffres d’horlogerie calculé une fois pour toutes
et
qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures
1152
t l’usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence,
et
à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de plaisirs tarifé
1153
ement encore que son travail aux lois d’une offre
et
d’une demande sans rapport avec ses désirs réels, et dont il subit do
1154
d’une demande sans rapport avec ses désirs réels,
et
dont il subit docilement l’abstraite et commerciale nécessité. Ennui,
1155
rs réels, et dont il subit docilement l’abstraite
et
commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prière. Cela s’ap
1156
de la Nature, lié par les liens les plus subtils
et
les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêt
1157
us les autres membres de la Nature, choses, bêtes
et
anges, — le voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapabl
1158
pable d’en comprendre les correspondances divines
et
humaines, insensible même à sa déchéance, abandonné à la lutte tragiq
1159
ême à sa déchéance, abandonné à la lutte tragique
et
absurde des lois économiques et des exigences les plus rudimentaires
1160
la lutte tragique et absurde des lois économiques
et
des exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le cont
1161
Il a perdu le contact avec les choses naturelles,
et
par là même, avec les surnaturelles. Il en ressent une vague et inter
1162
, avec les surnaturelles. Il en ressent une vague
et
intermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur le compte de sa fa
1163
a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre
et
généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la li
1164
avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté
et
une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscie
1165
oi-même, la liberté et une certaine durée normale
et
capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses b
1166
use dans le plaisir, la conscience de ses besoins
et
de ses buts propres, humains et divins. Mauvais loisirs. Ford lui a d
1167
ce de ses besoins et de ses buts propres, humains
et
divins. Mauvais loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer la na
1168
a donné une auto pour admirer la nature entre 17
et
19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’envie. Mauva
1169
que, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière
et
parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révélé des exig
1170
ui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit,
et
ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelque sensibil
1171
oments de loisir, il a des exigences effectives ;
et
ces exigences sont en contradiction avec celles que le développement
1172
active de Dieu que nos savants nomment mysticisme
et
considèrent comme un « cas » très spécial, — on les écarte des engren
1173
anc-maçonnerie de quelques centaines d’individus.
Et
cette franc-maçonnerie sera bientôt traquée avec la dernière rigueur
1174
ôté. Mais du nôtre ? « Vous ne pouvez servir Dieu
et
Mammon », dit l’Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réaction
1175
me. Second pas : en poser les termes avec netteté
et
courage. Pour le reste, je pense que c’est une question de foi. 1.
1176
s livres les plus lus du grand public sont Ma vie
et
mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Da
1177
du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
et
Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue
1178
ngue allemande, son succès est encore plus grand,
et
de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’Amérique. 2. Victor Cambo
1179
. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie
et
mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926.
1180
5. 3. L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici
et
là, la révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme
1181
ée mystique en Russie. a. « Le péril Ford », Foi
et
Vie, Paris, n° 4, février 1928, p. 189-202.
1182
vec Gérard (24 mars 1928)l À Pierre Jeanneret
et
à son étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mai
1183
les dancings, un peuple de fêtards modérés, Juifs
et
ressortissants de la Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre
1184
ville une insécurité qui fait songer à la Russie
et
au sifflement des balles perdues d’une révolution. Sept heures du soi
1185
moment était venu d’arrêter le plan de la soirée,
et
cette promenade où il y avait juste assez de passants pour qu’on la s
1186
traire. Il est très vrai que les notions réaliste
et
idéaliste du monde ne sont séparées que par un léger décalage dans la
1187
er décalage dans la chronologie de nos sentiments
et
de nos actes. Donc, n’ayant pas renoncé à certaine idée que j’avais d
1188
d’hui le lien qui unissait dans mon esprit Vienne
et
Hoffmann : c’était le souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que
1189
euse des violons. Le diable sort des parois, noir
et
blanc, la ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbr
1190
éroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres
et
de la pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surna
1191
instants les accords d’une harmonie surnaturelle.
Et
tout cela chanté dans une langue que je comprends mal. Je me penche v
1192
un amour tragiquement mêlé à des forces inconnues
et
menaçantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille
1193
mprévisibles transfigurations, — l’heure anxieuse
et
mélancolique où l’on quitte ce visage aimé pour d’autres plus beaux p
1194
arce que c’est bien toi de nouveau qui m’appelles
et
qui vas me quitter… — C’est une chose singulière, prononce une voix,
1195
raison d’intervenir entre la réalité de ma vision
et
mon cerveau pris au défaut de sa carapace de principes et d’évidences
1196
erveau pris au défaut de sa carapace de principes
et
d’évidences opaques. Nous sortîmes de l’Opéra, Gérard de Nerval et mo
1197
aques. Nous sortîmes de l’Opéra, Gérard de Nerval
et
moi, sans nous être rien dit d’autre, comme des amis qui se connaisse
1198
e progresser. Gérard dut le prendre sous le bras,
et
les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De t
1199
e est une œuvre d’art qui demande un long effort,
et
les Viennois sont, par nature et par attitude, des gens fatigués. — P
1200
un long effort, et les Viennois sont, par nature
et
par attitude, des gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe l’a
1201
n retrouver la sensation jusque dans les choses —
et
c’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais je bavarde, je phi
1202
sens au monde. — Mais je bavarde, je philosophe,
et
vous allez me dire que c’est trop facile pour un homme retiré du mond
1203
eurs. C’était la petite bossue qui vend des roses
et
des œillets dans la rue de Carinthie. Gérard lui paya quelques œillet
1204
Vint à pas pressés une jeune femme, chapeau rouge
et
manteau de fourrure brune, inévitablement. Et ce qui se passa fut, hé
1205
uge et manteau de fourrure brune, inévitablement.
Et
ce qui se passa fut, hélas, non moins inévitable : la jeune femme ref
1206
imuler nous trahit ; elle finit donc par accepter
et
vint à nous avec un sourire du type le plus courant : « Vous êtes bie
1207
ndre chacun un bras, une femme pour deux hommes —
et
ce fut bien dans cette anecdote dont Gérard attendait évidemment quel
1208
que toutes dans cette ville, — du type que Gérard
et
Théo nommaient « biondo et grassotto », et qu’avec mes amis nous devi
1209
, — du type que Gérard et Théo nommaient « biondo
et
grassotto », et qu’avec mes amis nous devions baptiser en style vienn
1210
Gérard et Théo nommaient « biondo et grassotto »,
et
qu’avec mes amis nous devions baptiser en style viennois « Mehlspeis-
1211
us engouffrâmes dans un grand bruit de saxophones
et
de cors anglais jouant la Marche de Tannhäuser en tango, un Balkaniqu
1212
is se perdre ce sens des correspondances secrètes
et
spontanées du plaisir qui seules faisaient sa dignité humaine, parce
1213
vie aux “divertissements” entre 10 heures du soir
et
4 heures du matin, moyennant tant de schillings, dans un décor banal
1214
moyennant tant de schillings, dans un décor banal
et
imposé, avec des femmes qui élargissent des sourires à la mesure de v
1215
hant suffit à peine à toucher leurs sens fatigués
et
épaissis. Regardez ces yeux mornes, ou luisants de concupiscences élé
1216
-là qui danse en robe mauve, avec tant de gravité
et
de détachement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse
1217
s’asseoir auprès de nous. Gérard songeait, muet,
et
n’en buvait pas moins. « Pourquoi vous ne dites rien ? » fit-elle d’u
1218
mbe dépareillée, vous n’avez pas de ressemblance,
et
c’est ce qui vous perdra. » La pauvre fille ne comprenant pas, il y e
1219
t interrompre une comédie aux attitudes convenues
et
donner l’air bête aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la
1220
Gérard embrassa paternellement la belle effarée,
et
nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, laissé au vestiaire
1221
vestiaire, y était l’objet de vexations diverses
et
de curiosités grossières de la part des garçons. « Encore une proie i
1222
e lâchée pour l’ombre, dit Gérard d’un ton rêveur
et
malicieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est la plus douce à
1223
savez, je lance mes filets dans l’eau des nuits,
et
quelquefois j’en ramène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire
1224
’ai oublié mes clefs il y a très, très longtemps…
Et
pas de Lune ce soir, il serait dangereux de s’endormir. » Se penchant
1225
chant vers moi il prononça : « La nuit sera noire
et
blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe de cette phrase célè
1226
pensai qu’il arrive aux meilleurs de se répéter,
et
que c’était la première fois de la soirée que Gérard « faisait du Gér
1227
ignait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité
et
l’Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombre flatteuse aux
1228
is autour d’une petite table lumineuse, verdâtre,
et
Gérard, penché sur cet aquarium de rêves, discourt et décrit les imag
1229
érard, penché sur cet aquarium de rêves, discourt
et
décrit les images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge,
1230
uge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse,
et
Clarissa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du g
1231
tations. Gérard parle avec une liberté magnifique
et
angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’espace. Cent années et t
1232
ifique et angoissante. Il mêle tout dans le temps
et
l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette c
1233
mêle tout dans le temps et l’espace. Cent années
et
tous les visages aimés revivent dans cette coupe de songes avec toute
1234
’autre moitié sera toujours cachée, ainsi la Lune
et
sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en un instant dans cette v
1235
jours cachée, ainsi la Lune et sa moitié d’ombre.
Et
parce que tout revit en un instant dans cette vision, il connaît enfi
1236
e vision, il connaît enfin la substance véritable
et
unique de toutes ses amours, il communie avec quelque chose d’éternel
1237
alogies étourdissantes qui commencent à des dieux
et
finissent aux pierres précieuses en passant par toutes les formes ani
1238
e entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies,
et
peu à peu, de leurs moindres coïncidences. La fatigue calme son lyris
1239
indres coïncidences. La fatigue calme son lyrisme
et
son exaltation. Il semble se rapprocher de moi. Il me raconte de ces
1240
chaque minute d’une vie résume cette vie entière
et
fait allusion à tout ce qu’il y a sous le soleil, et même ailleurs. C
1241
fait allusion à tout ce qu’il y a sous le soleil,
et
même ailleurs. Croyez-moi, ce qu’il faudrait écrire, c’est une Vie si
1242
ec de gaz sans manchon qui éclairait la boutique,
et
que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveil
1243
ainsi chaque nuit, que l’animal devenait nerveux
et
que depuis quelques semaines, il avait dû le mettre au caviar. Il en
1244
au caviar. Il en demanda donc une petite portion
et
la fit prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs
1245
s à la moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter »
et
ailleurs « Wienerli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par le
1246
mes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux
et
mécaniques. Je reconnus des princes aux faces maigres qui ressemblaie
1247
ent à d’anciens Habsbourg, des comtes athlétiques
et
la silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld do
1248
assèrent à toute vitesse, m’éclaboussant de neige
et
de titres dépourvus de sens. Je dormais debout. 10. Quelque chose c
1249
nne avec Gérard », La Nouvelle Semaine artistique
et
littéraire, Neuchâtel, n° 7, 24 mars 1928, p. 105-108.
1250
es Verne passionne. Pour les autres, divertissant
et
spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules Verne qu’un précurseur ?
1251
est un créateur, dont les inventions se suffisent
et
suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les savants qui sont prophètes
1252
les poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout —
et
ce livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce
1253
d’évasion — où seuls les poètes savent se perdre.
Et
c’est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la
1254
ien descendent au fond des mers adorer la Liberté
et
jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a vérit
1255
ne a véritablement soumis la science à la poésie.
Et
l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus
1256
e désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (
et
dans la bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Ser
1257
œuvre (S. Kra, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, juin 1928, p. 768-769.
1258
celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément,
et
c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné et m’en sais plus dépourvu
1259
nt, et c’est naturel : je m’en avoue plus éloigné
et
m’en sais plus dépourvu si possible. Je ne demande aux écrivains que
1260
mier chapitre, variation sur un mot bien français
et
ses applications faciles à cent célébrités locales. (Quant à Goethe,
1261
style, à coups d’exemples qui méritent de l’être.
Et
l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes
1262
Traité du style (NRF) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, Genève, août 1928, p. 1034.
1263
Pierre Naville, La Révolution
et
les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréa
1264
ien M. Breton. Mais à condition d’aller plus loin
et
de prendre une connaissance positive de ce qu’il y a sous cette réali
1265
mmode mal de tant de gesticulations, de gros mots
et
de discours en très beau style contre un monde très laid dont ils n’o
1266
snobisme. at. « Pierre Naville : La Révolution
et
les intellectuels (NRF) », Bibliothèque universelle et Revue de Genèv
1267
s intellectuels (NRF) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, novembre 1928, p. 1410.
1268
orces caractéristiques du temps — argent, races —
et
ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organi
1269
s — et ses rares passions, qui sont la domination
et
la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu de
1270
nt la domination et la démolition, l’organisation
et
le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces
1271
sein même de la lutte qui met aux prises l’Europe
et
le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Te
1272
de l’Occident exprimait sous une forme abstraite
et
poétique. Mais cette fois tout est concrétisé en hommes, en meurtres,
1273
eurtres, en décrets. Qu’il décrive la vie intense
et
instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et mystérieux d’une
1274
instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien
et
mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpitation inquiétante de
1275
est plus nerveux, sans doute aussi plus sensible.
Et
il ne se borne pas à des effets pittoresques : ce récit coloré et pré
1276
e pas à des effets pittoresques : ce récit coloré
et
précis, admirablement objectif, est aussi, mais à coups de faits, une
1277
-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ;
et
cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout ce qui n’est p
1278
n désespoir sec, sans grimace. Cette intelligence
et
cette sensibilité ont quelque chose de trop aigu, de dangereux. Mais
1279
antes de l’heure, à les exprimer en un tel drame,
et
voici André Malraux au premier rang des romanciers contemporains. a
1280
Conquérants (Grasset) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1547-1548.
1281
décembre 1928)av L’histoire de Louis II exalte
et
déçoit l’imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès,
1282
mi des Lois — son expression amoureuse du silence
et
cet ensemble idéal d’étudiant assidu aux sociétés de musique… » Barrè
1283
bien indécise, que son échec même ne relève pas,
et
qui tire sa grandeur de celle du décor ? Guy de Pourtalès n’hésite pa
1284
e pas à baptiser son héros « prince de l’illusion
et
de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du
1285
rince rêveur n’est pas forcément prince du rêve ;
et
par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illu
1286
drait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre
et
qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez
1287
a su rehausser le tableau avec beaucoup d’adresse
et
de charme : Wagner et Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont
1288
eau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner
et
Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont le jeu donne aux nuan
1289
sants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur,
et
s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de
1290
r c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt
et
de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’
1291
e ou Hamlet-Roi (NRF) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1549.
1292
it se lie avec un inconnu qui se dit prince russe
et
entretient autour de sa vie le plus grand mystère. Cependant il aime
1293
Il subjugue le jeune Français par ces évocations
et
l’espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillen
1294
« petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public,
et
brusquement le mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du
1295
, et brusquement le mot éclate : menteur. Feintes
et
esquives adroites du « prince » qui disparaît, néanmoins. Enfin, le F
1296
pathétique confession qui doit expliquer sa mort
et
qui est aussi fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort
1297
né à une courte nouvelle, d’ailleurs assez dense,
et
dont le mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien
1298
assez dense, et dont le mérite est d’être simple
et
précise dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dan
1299
(dessins de Jacques Ernotte) (Éditions “Le Rouge
et
le Noir”) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déc
1300
Le Rouge et le Noir”) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, décembre 1928, p. 1553.
1301
Miroirs, ou Comment on perd Eurydice
et
soi-même » (décembre 1928)m « Remonte aux vrais regards ! Tire-to
1302
part. On lui a expliqué qu’il fallait la mériter
et
tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes, on lui conseille de
1303
îne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière page,
et
là déclare froidement ne pas exister. Non : il a remarqué que l’époqu
1304
yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière
et
de sentiments. Il découvre une sorte de rire au coin de sa bouche dan
1305
a bouche dans les moments de pire découragement ;
et
beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui l’intriguent à n’en pas fin
1306
rte quel passant, il se sent comme séparé de soi,
et
si profondément différent de cette apparence, qu’il doute de sa réali
1307
ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation
et
n’y trouve que le désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec s
1308
de reflets qui vont en diminuant vertigineusement
et
l’égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de super
1309
l’égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires
et
pas mal de superstitions. Enfin cette expérience folle le mène à une
1310
ir aussi qu’on ne comprend que ce qu’on dépasse ?
Et
qu’il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans l’homme moderne
1311
ertaines femmes. Un soir, après quelques alcools
et
un échange de pensées au même titre avec une amie d’une beauté de plu
1312
meurt dans une naissance. Stéphane naît à l’amour
et
à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ont envahi bruyamment,
1313
de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil
et
« la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane r
1314
mait. m. « Miroirs, ou Comment on perd Eurydice
et
soi-même », Cahiers de l’Anglore, Genève, n° 1, décembre 1928, p. 37-
1315
Sherwood Anderson, Mon père
et
moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désar
1316
Sherwood Anderson, Mon père et moi
et
Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et l
1317
e (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé
et
légèrement absurde en face d’un récit comme celui d’Anderson : voici
1318
qui raconte sa vie avec une émouvante simplicité
et
il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur
1319
ers tomes, où il décrit des scènes de son enfance
et
de sa jeunesse comme ouvrier. L’art d’Anderson est étonnant d’apparen
1320
simplicité. Le récit s’avance à une allure libre
et
tranquille, anglo-saxonne et peu à peu entraîne tout un branle-bas d’
1321
e à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne
et
peu à peu entraîne tout un branle-bas d’évocations hautes en couleur,
1322
en couleur, de rêves, de visages, tandis que ç[à]
et
là s’ouvrent des perspectives saisissantes sur l’époque. Anderson est
1323
t avant tout un poète, un homme qui aime inventer
et
que cela console des nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de l
1324
ricains. Avec cela, un réalisme, plein de verdeur
et
souvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient le couplet humani
1325
s sait encore parler de sa mère avec cette virile
et
religieuse tendresse ? C’est un Chinois, c’est un Américain qui vienn
1326
fortement en l’existence d’une espèce de secrète
et
à peu près universelle conspiration pour insister sur la laideur. “C’
1327
ses à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi
et
les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arr
1328
à tout, moi et les autres”, me disais-je parfois,
et
il y avait des moments où j’arrivais presque à me convaincre que si j
1329
ar-derrière d’un homme ou d’une femme quelconque,
et
disais “houu !” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me s
1330
secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais,
et
que nous nous en irions bras dessus, bras dessous en riant de nous-mê
1331
bras dessus, bras dessous en riant de nous-mêmes
et
de tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le s
1332
hommes vivant sous lui conservassent la virilité
et
le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan
1333
décadence ! ax. « Sherwood Anderson : Mon père
et
moi et Je suis un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et R
1334
nce ! ax. « Sherwood Anderson : Mon père et moi
et
Je suis un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universelle et Revue de
1335
un homme (Kra, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, janvier 1929, p. 123-124.
1336
Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles
et
les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime
1337
utations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible
et
légitime que dans la mesure où la poésie est compréhensible et légiti
1338
ue dans la mesure où la poésie est compréhensible
et
légitime. 4. Je suis de sang-froid, je dis : Belles-Lettres est essen
1339
ment que par des cris. 5. Avec toutes les erreurs
et
turpitudes que cela comporte, Belles-Lettres est une liberté. Une rud
1340
foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu,
et
s’ils n’ont pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.) 6. Peu
1341
Belles-Lettres est en agréable odeur à l’Éternel
et
à Satan pareillement. Et ceux qu’elle enivre entrent en état de grâce
1342
réable odeur à l’Éternel et à Satan pareillement.
Et
ceux qu’elle enivre entrent en état de grâce ou de blasphème, selon.
1343
te d’abord, n’est-ce point de se livrer, purement
et
simplement. 7. (Secret). r. « Belles-Lettres, c’est la clef des cha
1344
ance aux lents vertiges Quand la nuit s’effeuille
et
se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau des fleurs obscures
1345
Il naissait à son destin des rayons glissent
et
rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’étai
1346
nges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube
et
le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa nai
1347
Souvenirs d’enfance
et
de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)t Quand avec un air fi
1348
tera l’un des rares qui ont réussi à se connaître
et
que cela n’a point stérilisé : sa nature, il est vrai, s’y prêtait, p
1349
sa nature, il est vrai, s’y prêtait, peu complexe
et
comme réduite à deux dimensions ; la conscience ne pouvait y tuer un
1350
une clairvoyance singulière, mes propres limites,
et
j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’
1351
Mais on n’en demande pas tant dans les familles.
Et
qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits : ce n’est p
1352
st élégant. Mais comme tout cela manque de chair.
Et
de rêve. Est-ce qu’en ce temps-là on ne se nourrissait vraiment que d
1353
nourrissait vraiment que de petits mots d’esprit
et
de malices ? Noisettes et cornichons ? t. « Souvenirs d’enfance et
1354
de petits mots d’esprit et de malices ? Noisettes
et
cornichons ? t. « Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe
1355
settes et cornichons ? t. « Souvenirs d’enfance
et
de jeunesse, par Philippe Godet », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-
1356
agressive. La simple visite des cafés dans l’une
et
l’autre de ces capitales suffit à vous en donner la sensation : ce qu
1357
uvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres,
et
tout cela finira bien par s’arranger, comme au dernier acte d’une opé
1358
turel. Mais de quoi vivent ces bourgeois aimables
et
insipides, qui passent des après-midi entiers devant les deux verres
1359
es notes les plus aiguës d’une chanson populaire,
et
à l’autre extrémité de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le
1360
lients, le violoncelle répond de sa voix profonde
et
passionnée, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière po
1361
de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere,
et
sur toutes les portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers
1362
pour admirer un coussin aux curieux dessins noirs
et
blancs : il représente l’ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond
1363
’ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond noir
et
portant, en cœur noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris le
1364
tant vivement les trams qui sonnent avec frénésie
et
les petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nu
1365
asses, couvertes du haut en bas d’affiches rouges
et
jaunes et d’inscriptions cascadantes, à l’orientale (on pense au mot
1366
vertes du haut en bas d’affiches rouges et jaunes
et
d’inscriptions cascadantes, à l’orientale (on pense au mot bazar, qui
1367
orientale (on pense au mot bazar, qui sonne rouge
et
jaune aussi). Soudain se dresse une énorme maison de pierre brune, pu
1368
des lignes verticales, peinturlurée de bleu, d’or
et
de violet. Puis une rue de pierre grise toute boursouflée de prétenti
1369
is un palais gothique 1880, qui est le Parlement.
Et
voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pest par quatre
1370
e tombe en hautes falaises dans le Danube, froide
et
nue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit
1371
t nue, mais dans son flanc une grotte s’illumine,
et
la Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses ga
1372
y sourit. Le château royal avec son amiral régent
et
ses gardes blancs aux casques d’or s’avance en proue, dominant superb
1373
its palais à un étage, clos, secrets, abandonnés.
Et
des crémeries aux idylles démodées… Rentrons dans la ville un soir qu
1374
voix hongroises féminines suffit à votre bonheur
et
vous voyez bien que Mme Varshany est une grande artiste. Vous vous êt
1375
euple, seul en Europe, attend le retour d’un roi.
Et
vous voici transporté dans un bal costumé, parmi des gens qui parlent
1376
ent une langue totalement incompréhensible, rient
et
s’enivrent comme plus un Européen ne sait le faire, et dansent à tout
1377
enivrent comme plus un Européen ne sait le faire,
et
dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent tourbillon
1378
olles « czardas » qui deviennent tourbillonnantes
et
finissent en chutes ivres sur des divans couverts de coussins Rotherm
1379
es sur des divans couverts de coussins Rothermere
et
Grande Hongrie… Ivresse dans le malheur, passion et pauvreté, espoirs
1380
Grande Hongrie… Ivresse dans le malheur, passion
et
pauvreté, espoirs presque puérils et nostalgie des grandeurs de naguè
1381
eur, passion et pauvreté, espoirs presque puérils
et
nostalgie des grandeurs de naguère, tout cela compose un visage roman
1382
e naguère, tout cela compose un visage romantique
et
ardent dont le voyageur s’éprend malgré lui, malgré tout, comme d’une
1383
Il faut s’en approcher avec une douceur patiente,
et
le laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les
1384
mages (à peine quelques « motifs », objets usuels
et
usés, sur la nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, c
1385
lus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile
et
sache attendre que ton cœur se détache de toi comme une lourde pierre
1386
e rêverie », il se confond avec l’ombre du monde.
Et
l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’
1387
s leur réalité les choses dont elle s’est dégagée
et
qu’elle voit dans une autre lumière : « Tout semblait vivre au fond d
1388
; une phrase naturellement grave ; une voix douce
et
virile ; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essent
1389
naturellement grave ; une voix douce et virile ;
et
quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de la po
1390
tre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut,
et
cela fait un vacarme terrible. » ay. « Jules Supervielle : Saisir (
1391
vielle : Saisir (NRF) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, juin 1929, p. 762-763.
1392
rd d’un ruisseau, qu’il dort les portes ouvertes,
et
pendant des heures récite des odes grecques au murmure de l’eau ; la
1393
s, en sorte que plusieurs touches sonnent encore,
et
c’est là-dessus qu’il improvise, oh ! j’aimerais tant aller là-bas, c
1394
, cette folie m’apparaît comme une chose si douce
et
si grande… »11 Et Bettina terminant sa lettre sur Hölderlin : « Ce p
1395
araît comme une chose si douce et si grande… »11
Et
Bettina terminant sa lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cass
1396
’esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit
et
dont certains des plus purs d’entre nous se préparent à tenter le cli
1397
Cette langue de feu qui s’est posée sur Hölderlin
et
qui l’a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui
1398
fille qui rimait sagement des odes à la liberté…
Et
voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du chant prophétiq
1399
t voici dans sa vie cette double venue de l’amour
et
du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années dans le Gr
1400
le temps où le sens de son monologue entre terre
et
ciel lui échappe. Il jette encore quelques cris brisés : « Ô vieux dé
1401
une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne.
Et
durant trente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans la petite
1402
de ces corridors de vieille maison souabe, hauts
et
sombres, qui paraîtraient immenses s’ils n’étaient à demi encombrés d
1403
it… Alors vous devez connaître ces portraits ? — (
et
comme je considère un ravissant médaillon de marbre) — Ça, c’est Diot
1404
rce qu’il a aimé une femme, pour écrire Hypérion,
et
pour les gens d’ici, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » — Et
1405
ci, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » —
Et
puis plus tard on encadre les lettres des amants, on propose le coupl
1406
couple à l’admiration des écoliers en promenade,
et
le guide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle
1407
ui traîne sur l’appui ; le jardinet avec son banc
et
ses lilas fleuris qui trempent… Tout est familier, paisible au soleil
1408
pt ans dans cette chambre, avec le bruit de l’eau
et
cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvre… L’
1409
ngtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avril
et
mai et juin sont lointains, Je ne suis plus rien, je n’aime plus vi
1410
, si longtemps qu’elles ont fui. Avril et mai
et
juin sont lointains, Je ne suis plus rien, je n’aime plus vivre. I
1411
, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies
et
des collines basses, de l’autre côté de l’eau jaune et verte… Quel es
1412
s collines basses, de l’autre côté de l’eau jaune
et
verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » — et cet a
1413
est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » —
et
cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plainte »… Vivait-il
1414
er la chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs,
et
seulement de 2 à 4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et le
1415
à 4… Une rue étouffée entre des maisons pointues
et
les contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque
1416
: il leur fait de grandes révérences… La rumeur
et
le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous le
1417
re s’est mis à jouer des ringues charmantes, jazz
et
clarinette, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisina
1418
raft und Schönheit ! »). J’aime les bateaux plats
et
incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent pas bien ramer et
1419
des Daphnés dedans, qui ne savent pas bien ramer
et
qui lisent des magazines au fil de l’eau, ce qui est le comble des va
1420
ntalons trop courts, qui se promènent tout seuls…
Et
puis, il lui est arrivé quelque chose de terrible, où il a perdu son
1421
quelque chose de terrible, où il a perdu son âme.
Et
puis il n’est revenu qu’un vieux corps radotant. — Qu’en pensez-vous,
1422
t que mal finir. Ceux du bon sens hochent la tête
et
citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut fai
1423
atroce de cette fin d’après-midi, ces musiquettes
et
ces parfums de fleurs et d’eau… elle est tellement d’ailleurs… Faut-i
1424
ès-midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs
et
d’eau… elle est tellement d’ailleurs… Faut-il donc que l’un des deux
1425
de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli.
Et
pourtant, comme elle paraît ici bien établie, triomphante, à beau fix
1426
es choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie.
Et
l’amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’
1427
teur. Madame Gontard est la Diotima de l’Hypérion
et
des poèmes. n. « La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et
1428
« La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique
et
littéraire, Neuchâtel, n° 18, 15 juillet 1929, p. 354-356.
1429
paru l’année dernière — un livre assez troublant
et
qu’on a trop peu remarqué —, Jean Cassou revient à son romantisme, à
1430
arle à son chien en mourant, une fille qui chante
et
des enfants surtout, dès le début, puis plus tard encore, dans les so
1431
nes, — puis tous se perdent, comme des souvenirs,
et
l’on retrouve un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le te
1432
est un dévergondage sentimental, plein de malices
et
d’envies de pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les mais
1433
. Mais bien vite un intermède bouffon, impossible
et
d’une désopilante poésie nous replonge dans une atmosphère autre, où
1434
autre, où les personnages ont cet air un peu ivre
et
capable de n’importe quoi, cet air dangereux et tendre que prennent l
1435
e et capable de n’importe quoi, cet air dangereux
et
tendre que prennent les hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais mé
1436
mes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants,
et
seulement aux dernières pages du livre, un peu amers… On voudrait un
1437
éré. Mais voici déjà dans l’œuvre de Jean Cassou,
et
singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces petites merveilles qui
1438
s (Émile-Paul, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, août 1929, p. 248-249.
1439
le voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre
et
le parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient l
1440
le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads
et
la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus
1441
est, si l’on veut, la question d’Orient-Occident.
Et
pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’interprétation proposée
1442
aire contre l’interprétation proposée par Claudel
et
Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s’est montré partial en faisant de Rimb
1443
u sans pareil, Paris) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est i
1444
ieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire.
Et
d’autre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la
1445
beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda,
et
l’obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-même
1446
de ce qu’elle « mène loin… dans l’ordre moral ».
Et
quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui ne trahit pas.)
1447
si vieux que le monde. Mais M. Benda distinguera,
et
ils seront confondus. Car il y a un sophiste en M. Benda, un polémist
1448
de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir
et
classer choses et idées en catégories « rationnelles », c’est-à-dire
1449
eux que lui ne s’entend définir et classer choses
et
idées en catégories « rationnelles », c’est-à-dire fausses mais clair
1450
elle ne doit pas nous masquer l’audace tranquille
et
admirable de son point de vue radicalement antimoderne, parce que dés
1451
humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible.
Et
quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme
1452
en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite
et
de gauche, n’en apparaît que plus pur. « Noms de clowns qui me vienne
1453
iennent l’esprit : Julien Benda… », écrit Aragon.
Et
Daudet nous apprend que « le petit Benda est un fameux serin ». Mais
1454
Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927)
et
la réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. « Julien Benda : La Fin d
1455
in de l’Éternel (NRF) », Bibliothèque universelle
et
Revue de Genève, Genève, novembre 1929, p. 638-639.
1456
xpliquait le monstre, les chaires le dénonçaient,
et
les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauva
1457
des ailes qui donnent des rhumes à ton grand-père
et
sont en scandale aux meilleurs esprits ? Voici que tu t’apprêtes visi
1458
, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale,
et
ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qui vous désa
1459
e orientale. Aussitôt la discussion de reprendre,
et
l’on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombre
1460
— sans résultat —, il écrivit une adresse réelle,
et
mit la lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut un
1461
amie Joséphine. » — Le poète reprit son manuscrit
et
conclut : « L’inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suit
1462
ses : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard,
et
Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montr
1463
l’homme de tout ce que son ignorance respectait,
et
ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre
1464
tait, et ne lui donne à la place que des laideurs
et
de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafou
1465
utre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué
et
qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est p
1466
dessein est assez différent, moins philosophique
et
point du tout technique. J’apporte un témoignage personnel, une réact
1467
la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
et
sans doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je ressemble.
1468
libéraux ont admis, conformément à leurs maximes,
et
toléré malgré leur mauvaise humeur. Ce régime de punaises jaunâtres a
1469
naises jaunâtres aboutit à l’instruction publique
et
grâce à elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ;
1470
’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades
et
il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond mi
1471
pas un argument. Je demande le droit de démolir.
Et
me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de propose
1472
s, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient
et
organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à
1473
je m’attends à cent « réponses » de cette sorte.
Et
je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais rég
1474
e resservir ces arguments, bien que dûment prévus
et
réduits à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’aurai plus qu’
1475
ssie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright,
et
tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Rés
1476
ésumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque,
et
on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier. B. Réponse
1477
sont les partisans d’une démocratie progressiste
et
tolérante qui se livrent à ces excès de langage, je les renvoie en co
1478
anquillité avec laquelle ils brouillent les faits
et
les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libéra
1479
e de marquer ici la distinction classique du fait
et
du droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’instruction pu
1480
ci la distinction classique du fait et du droit ;
et
c’est pourquoi je considérerai d’abord l’instruction publique dans se
1481
poserai la question de savoir si tant de laideurs
et
d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de not
1482
t qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance
et
les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il
1483
tuteurs : Faire de ces belles analyses logiques,
et
grammaticales, où tout retombait droit… Et de ces beaux problèmes d’a
1484
iques, et grammaticales, où tout retombait droit…
Et
de ces beaux problèmes d’arithmétique où il fallait si soigneusement
1485
calculs du raisonnement, par une barre verticale,
et
où il y avait toujours des robinets qui coulaient pour emplir ou pour
1486
ui coulaient pour emplir ou pour vider un bassin (
et
souvent les deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupati
1487
der un bassin (et souvent les deux), (pour emplir
et
vider ensemble), (drôle d’occupation), (après combien d’heures…) ; et
1488
(drôle d’occupation), (après combien d’heures…) ;
et
il y avait toujours des appartements à meubler. Et on multipliait le
1489
t il y avait toujours des appartements à meubler.
Et
on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que
1490
e mauvaises notes dans nos carnets hebdomadaires,
et
une semonce à nous gâter toute une journée. Une journée d’enfance gât
1491
r toute une journée. Une journée d’enfance gâtée.
Et
d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’es
1492
ire faux, parce que les autres auront fait juste,
et
qui voudrait bien pleurer, et qui recommence à gratter son ardoise où
1493
auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer,
et
qui recommence à gratter son ardoise où sèchent des traînées de craie
1494
raie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent…
Et
c’est cela l’enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au so
1495
es petites guerres mystérieuses, avec des ennemis
et
des alliés imaginaires, des jeux en cachette, odeurs de peaux, comme
1496
omme dans un rêve, des matins de dimanche sonores
et
tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et
1497
cuiller d’huile de foie de morue avant le repas,
et
le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas,
1498
oir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff
et
Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la
1499
veries, des recoins, une longue aventure sérieuse
et
incertaine, un peu sale et un peu divine, baignée d’une très vague an
1500
ngue aventure sérieuse et incertaine, un peu sale
et
un peu divine, baignée d’une très vague angoisse que l’on fuyait avec
1501
minent mon enfance : les séances chez le dentiste
et
l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce
1502
’on en était. Cela m’attira des reproches acides,
et
naturellement, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même
1503
me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé
et
méfiant, sans cesse en garde contre moi-même à cause des autres desqu
1504
allait pas différer, profondément hypocrite donc,
et
le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les ho
1505
donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2
et
2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois
1506
c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne,
et
de plus, toutes choses égales d’ailleurs, dans un certain domaine, c’
1507
our m’habituer à cette idée. Je tenais cette clef
et
n’osais m’en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent r
1508
que tous les hommes doivent être égaux en tout ?
Et
la première réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démoc
1509
que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère
et
étende ses conquêtes. C’était découvrir notre asservissement. Je song
1510
tion jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz
et
les manuels des Frères ∴, par l’esprit petit-bourgeois, qui est une g
1511
urgeois, qui est une généralisation de l’avarice,
et
par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle
1512
on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte
et
de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arb
1513
onnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire
et
le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffran
1514
ur je compris que ce n’étaient que des principes.
Et
ce fut ma seconde découverte : ce monde simplifié, si évident, si par
1515
Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal
et
nécessaire — et qui était le seul pour lequel on nous préparait —, c’
1516
raissait comme l’achèvement idéal et nécessaire —
et
qui était le seul pour lequel on nous préparait —, c’était un système
1517
nablement organisé des esprits moyens, prosaïques
et
rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un
1518
nt de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité
et
le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d
1519
un fils d’ouvrier est l’égal d’un petit Dauphin —
et
même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier es
1520
oureusement ennuyeuses qui sont dans les livres —
et
nulle part ailleurs. Maigre nourriture pour nos rêves. Nous arrivions
1521
rrivions dans la vie avec des mentions honorables
et
une inconcevable gaucherie, c’est-à-dire avec des titres pour méprise
1522
es pour mépriser toute valeur simplement humaine,
et
une honte secrète qui exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Ma
1523
ne, et une honte secrète qui exaspérait ce mépris
et
le rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compres
1524
encore l’action. Je n’eus pas plus tôt découvert
et
nommé cet asservissement de l’esprit et ces mythes stériles, que je l
1525
découvert et nommé cet asservissement de l’esprit
et
ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de co
1526
rences sont les premières marques de la vie vécue
et
l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en
1527
er les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé.
Et
pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressembl
1528
vécue. Ce que je vais dire est sans doute injuste
et
faux dans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de l
1529
ini par son incompréhension méthodique des hommes
et
son mépris pour les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le r
1530
le n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus,
et
ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient sensible
1531
qui signent des manifestes en mauvais français —
et
je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au v
1532
vil. Au village, quand on vous parle avec respect
et
trémolo d’un môssieu très instruit, vous êtes presque certain qu’il s
1533
deux sous-types posthumes : l’artiste photographe
et
le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut fair
1534
éexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École,
et
attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attir
1535
Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement
et
tel qu’il se manifeste dans l’école primaire est un véritable virus d
1536
e primaire est un véritable virus de mesquinerie,
et
devrait être soigné au même titre que certaines autres maladies dites
1537
d’une façon frappante ce qu’il y a de schématique
et
de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est
1538
a porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron
et
d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empe
1539
goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
et
les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière
1540
habits des écoliers empeste encore mes souvenirs.
Et
la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un
1541
, ces devises… —, les estampes piquées, Numa Droz
et
ses crottes de mouches… Dans ce décor s’écoulent huit années de votre
1542
r s’écoulent huit années de votre vie, citoyens !
Et
vous pensez que c’est un grand progrès sur la Nature. Quelle peut bie
1543
n être la vertu éducatrice d’un tel milieu, moral
et
matériel ? L’école publique, telle que nous la voyons est semblable à
1544
Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité,
et
ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mai
1545
sons puisqu’elles me sont absolument personnelles
et
qu’elles ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est tem
1546
eux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave,
et
nous voici avec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur les br
1547
» qui dès lors deviennent obligatoires. La somme
et
l’arrangement des parties doivent être identiques pour tous les écoli
1548
t les huit années réglementaires de la scolarité,
et
englobe la totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une
1549
ser d’une ou deux feuilles de papier, d’un crayon
et
d’une règle (pour diviser la page en casiers rectangulaires, bien pro
1550
es à une composition française ? Question oiseuse
et
saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que l’on tînt compte des pos
1551
rience que nous ne comprenons pas la plaisanterie
et
que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants ne se plaignent
1552
sse l’esprit de ces enfants… — Mais on nous paye,
et
ils n’en meurent pas. Les examens Ce sont en principe des « con
1553
is qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité
et
la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné
1554
aminé) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité
et
la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre. Ce phénomè
1555
pas exigée de ceux qui établissent les programmes
et
les examens. « Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseig
1556
jusque sous la plume de divers maîtres primaires
et
secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’instruc
1557
de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens
et
à quoi l’on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qualité du tra
1558
té du travail, santé, liberté, sens de la justice
et
autres balivernes, instruction véritable et autres plaisanteries de g
1559
stice et autres balivernes, instruction véritable
et
autres plaisanteries de gros calibre, car à la vérité ce n’est pas d’
1560
De l’existence des programmes, qui est un fait,
et
de l’existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le
1561
ait songé à leur donner une extension universelle
et
un caractère obligatoire. L’école exige donc que les meilleurs ralent
1562
L’école exige donc que les meilleurs ralentissent
et
que les plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, d
1563
’attaque impitoyablement aux natures d’exception,
et
les réduit avec acharnement à son commun dénominateur4. Nos bourgeois
1564
rgeois assistent sans honte à ce crime quotidien,
et
se félicitent du régime des lumières et des compteurs à gaz. Mais ils
1565
uotidien, et se félicitent du régime des lumières
et
des compteurs à gaz. Mais ils se fâchent tout rouge quand on leur dit
1566
de l’étranger impartial, par sa culture intensive
et
extensive des veaux et des médiocres. Le gavage Moyen de réalis
1567
, par sa culture intensive et extensive des veaux
et
des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus
1568
elle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair
et
portatif des résultats actuels d’une science. Le bon sens voudrait qu
1569
aire consiste à faire tenir les enfants immobiles
et
muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite le
1570
ration absurde, une généralisation si schématique
et
superficielle que la discipline perd tout son sens éducatif et n’est
1571
lle que la discipline perd tout son sens éducatif
et
n’est plus qu’une entrave énervante, un système de vexations mesquine
1572
e vertu. La discipline primaire forme des gobeurs
et
des inertes, fournit des moutons aux partis et prédispose les citoyen
1573
rs et des inertes, fournit des moutons aux partis
et
prédispose les citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables
1574
s innombrables défense de, petites crottes noires
et
blanches qui marquent un peu partout le passage de l’État, et dont la
1575
qui marquent un peu partout le passage de l’État,
et
dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol de s’écri
1576
me, morgue bourgeoise, esprit de parti, arrivisme
et
parlementarisme. La culture de l’esprit démocratique telle qu’elle es
1577
telle qu’elle est comprise par les instituteurs —
et
elle ne peut être comprise autrement — est essentiellement négative.
1578
ple souverain qui ne manque pas d’en être flatté.
Et
puis, quelle est cette préparation à la vie qui commence par nous sou
1579
pas exiger qu’il soit tout de noblesse, de vertu
et
de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’il n’est que ridicule
1580
n peut s’étonner de voir qu’il n’est que ridicule
et
mesquinerie. Il y a là une préméditation de médiocrité que je ne puis
1581
agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir
et
enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que
1582
oyens ayant accompli de « fortes études primaires
et
secondaires » (témoignage suffisant de leurs aptitudes à la compromis
1583
urs aptitudes à la compromission sociale établie)
et
cueilli au passage un grade universitaire, prennent leur essor de ché
1584
jucher sur la flèche de l’édifice administratif.
Et
c’est ce qui s’appelle une belle carrière. Mais ces brillants météore
1585
collège ont été frappés de constater que la force
et
l’originalité de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’ann
1586
e inversion méthodique de toutes les lois divines
et
humaines. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissement de la race. D’
1587
nt du fait que l’école est publique, obligatoire,
et
soumise au contrôle de l’État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régi
1588
le régime — mais aussi ses conséquences absurdes
et
fatales, par exemple l’instruction publique. Ou bien vous combattez l
1589
lectuelle qui les conduit souvent à l’imbécillité
et
au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genève, Kündig, 191
1590
en général judicieuses, dictées par le bon sens7
et
retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. On a constaté
1591
élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ;
et
cela s’appelle de l’école pratique. Plus tard on fait apprendre à ces
1592
Plus tard on fait apprendre à ces mêmes enfants,
et
réciter par cœur et à rebours, les noms des rues et places de leur vi
1593
pprendre à ces mêmes enfants, et réciter par cœur
et
à rebours, les noms des rues et places de leur ville, comme s’ils éta
1594
réciter par cœur et à rebours, les noms des rues
et
places de leur ville, comme s’ils étaient tous destinés à la professi
1595
firmant : je siège ; un troisième lèvera la main,
et
dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout po
1596
sors ! ne traduise incontinent ce verbe en action
et
ne disparaisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur p
1597
nt » peut être la formule d’une tromperie subtile
et
plus grave que la brutalité primaire, parce qu’elle n’excite pas de r
1598
l’école nouvelle sont honnêtement scientifiques,
et
désintéressés. Mais l’enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je vou
1599
el qui pourrait bien un jour l’atteindre au cœur,
et
je vois tout ce que cela entraînerait, dans une ruine d’où renaîtrait
1600
ue, dont toute la personne était un enseignement,
et
qui n’avait pas des élèves, mais des disciples. Celui-là seul favoris
1601
de l’école libre, qui se moquent des programmes,
et
dont les classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon a
1602
rication en série de petits démocrates conscients
et
organisés. Je crains que ce malentendu ne soit décidément trop gros p
1603
tre que notre dilemme subsiste dans son intégrité
et
son urgence. 7. Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l
1604
e seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe
et
se perpétue ; de quel droit il nous écrase. La réponse est simple, te
1605
du droit de la Démocratie. L’instruction publique
et
la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. El
1606
ses. Elles sont nées en même temps. Elles ont cru
et
embelli d’un même mouvement. Morigéner l’une c’est faire pleurer l’au
1607
tous les banquets officiels par des orateurs émus
et
il y aurait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus la reconnaîtr
1608
ne fois dissipée la fumée des civets, des cigares
et
des idéologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ai l’honneur de
1609
saires se trouve correspondre à des faits patents
et
simples ; il serait vraiment dommage de priver ces Messieurs d’une au
1610
es — que cela n’irait pas sans quelque indécence.
Et
d’abord, il faut pouvoir lire, écrire et compter pour suivre la campa
1611
décence. Et d’abord, il faut pouvoir lire, écrire
et
compter pour suivre la campagne électorale, voter et truquer légaleme
1612
compter pour suivre la campagne électorale, voter
et
truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l
1613
lement les votes. Ensuite, il faut de l’histoire,
et
de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite,
1614
Enfin, il faut un nombre considérable de leçons,
et
le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendr
1615
le fois, sait bien que tout le reste est absurde.
Et
voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’Éc
1616
» comme ils disent avec une satisfaction sordide
et
mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’ins
1617
ent eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient —
et
je les excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a
1618
roposer aujourd’hui qu’on répande universellement
et
obligatoirement l’art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains
1619
pui intéressé d’un groupement politico-financier.
Et
il y aurait bien vite des députés pour célébrer les bienfaits sociaux
1620
l’institution, se manifeste encore de nos jours,
et
d’une façon non moins flagrante, dans ses suites normales. Je n’en ve
1621
actuelle, remplit suffisamment son rôle politique
et
social, qui est de fabriquer des électeurs (si possible radicaux, en
1622
tchener : une machine qui absorbait des gentlemen
et
rendait des tommies. La machine scolaire, elle, dévore des enfants to
1623
hine scolaire, elle, dévore des enfants tout vifs
et
rend des citoyens à l’œil torve. Durant l’opération, tous les crânes
1624
t l’opération, tous les crânes ont été décervelés
et
dotés d’une petite mécanique à quatre sous qui suffit à régler désorm
1625
arguments ne se mettent en branle qu’après coup.
Et
quand vous les démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitim
1626
tout, peu m’importent les idéologies politiques,
et
peu m’importerait que l’École soit une machine à fabriquer de la démo
1627
eur d’âme pour amorcer le dégel de ces principes,
et
ce peut être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de
1628
it. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens
et
d’information pour jouer au prophète, on nous promet de tous côtés de
1629
son ambition : soustraire les enfants à l’Église
et
à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des
1630
émocrates convaincus, partisans des « lumières »,
et
qui pourtant s’indignent de voir la morale actuelle s’attaquer, voyez
1631
vous ça, à la famille, « cette cellule sociale ».
Et
je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. C
1632
e collège au contraire est un milieu antinaturel,
et
les normes sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille
1633
ste nécessaire à l’équilibre d’une civilisation —
et
c’est l’aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à déve
1634
ente qui chasse ce ver solitaire du matérialisme.
Et
quand on m’aura démontré que les besoins de l’époque exigent une orga
1635
s supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz
et
du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en même temp
1636
tout ce qui lui donnerait l’envie de se libérer —
et
peut-être les moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’est-à-dire de démo
1637
aîné l’âme moderne dans ses collèges, l’y enferme
et
l’y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à ignorer bien plu
1638
ction publique contre le progrès Un beau titre.
Et
qui a meilleure façon que le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’av
1639
cela vous a un petit air démocratique, hé ! hé !…
et
d’ailleurs vous aimez les idées généreuses, n’est-ce pas ? J’en étais
1640
t j’ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre,
et
même que sa nature ne l’entraîne dans une direction tout opposée. C’e
1641
de progrès : encore faut-il le mettre en marche.
Et
où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le
1642
ction publique s’est arrêtée aux environs de 1880
et
depuis lors n’a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de con
1643
n’en continue pas moins de consommer, de ronfler
et
de tout empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que « l’instrumen
1644
ins de consommer, de ronfler et de tout empester.
Et
peu à peu le public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’est
1645
é de retirer brusquement ces sièges, farce connue
et
qui ridiculise à coup sûr sa victime. En fait de farces, vous allez f
1646
st destinée à légitimer par la force de l’inertie
et
à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depuis Numa Droz. Conservat
1647
tout ce qui est depuis Numa Droz. Conservatrice,
et
non pas réactionnaire, non, même pas. Car les forces de réaction coll
1648
plutôt une vase où s’enlise notre civilisation ;
et
où la Démocratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis q
1649
que le progrès consiste à dépasser la Démocratie.
Et
cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de l’humani
1650
n providentielle dans cet amour de la destruction
et
de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à bea
1651
encore que peu l’avouent. Car détruire, déblayer,
et
faire des signes dans le vide à des hasards gros de dangers, c’est pe
1652
dition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie
et
de grandeur que ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ailleurs les
1653
sprit est la jalousie rancie armée de pédantisme,
et
je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites ha
1654
, de la poussière, des petites habitudes sordides
et
de cette matière rarement « hygiénique » et qui définit notre âge : l
1655
dides et de cette matière rarement « hygiénique »
et
qui définit notre âge : la paperasse ? Réponse ? Petits étourdis. Rép
1656
ajorité des électeurs les considèrent comme tels.
Et
je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’aura fait remarquer que l
1657
il est temps qu’elles débordent ce cercle étroit
et
distingué. Il y a de grands balayages à faire, un grand courant d’air
1658
air à créer qui emportera toutes ces statistiques
et
ces journaux, il en restera toujours assez pour allumer des feux de j
1659
espirons. Mais déjà vous m’attendez à ce tournant
et
vous me sommez de dire comment, maintenant, je vais m’y prendre pour
1660
es postulats rationalistes. En vérité, démocratie
et
rationalisme ne sont que deux aspects, l’un politique, l’autre intell
1661
t le xixe elle est descendue dans la bourgeoisie
et
dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la
1662
devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison
et
les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimental
1663
s sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12
et
la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les
1664
e non seulement dans les principes démocratiques,
et
dans ceux de l’École, mais encore dans toute la conduite moderne de l
1665
duite moderne de la vie. C’est notre américanisme
et
c’est notre sécheresse sentimentale. Et c’est le grand empêchement in
1666
ricanisme et c’est notre sécheresse sentimentale.
Et
c’est le grand empêchement intérieur dont souffre notre imagination c
1667
n créatrice ; c’est lui qui stérilise nos utopies
et
les empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en
1668
s. Il s’agit donc en premier lieu de le démasquer
et
de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette
1669
d’imaginer, bénéficiant de notre colère jacobine
et
de cette formidable expérience négative qui aura duré deux siècles au
1670
sous toutes ses formes, traduit tout en relations
et
veut rendre toutes relations conscientes, c’est-à-dire, pour lui, cal
1671
emps vient où elles renaîtront à une vie nouvelle
et
plus complète, à un degré supérieur d’inconscience, si je puis dire.
1672
raison. Je crois que nous approchons de ce temps.
Et
que le véritable progrès veut qu’on s’attaque à tout ce qui entrave c
1673
me demande encore ce que je mettrais à la place.
Et
parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe grossièremen
1674
même très vaguement notre actuelle civilisation.
Et
même Diderot, même Rousseau, à la veille de la Révolution, soupçonnai
1675
s formidables que nous réserve le siècle à venir,
et
vous commencerez à comprendre que votre scepticisme à l’endroit de la
1676
forme sociale que nous appelons sans la connaître
et
qui s’élabore déjà secrètement, que ce mépris et ce scepticisme sont
1677
et qui s’élabore déjà secrètement, que ce mépris
et
ce scepticisme sont d’un ridicule écrasant, sous lequel vous ne tarde
1678
uit d’une mésalliance avec l’Avarice bourgeoise —
et
qui sans cesse déroge.
1679
Appendice. Utopie Un os à la meute. (
Et
figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rigoler, si ce
1680
est de savoir si nous serons des hommes de chair
et
d’esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra les ficelles, peu im
1681
lles, peu importe.) Les économistes (mot stupide)
et
les philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un p
1682
de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité
et
l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout c
1683
aurons épuisé toutes les combinaisons de vitesse
et
d’ennui à quoi présentement nous usons le plus clair de nos forces, —
1684
es, — le Poète dira un mot, ou bien fera un acte,
et
ces peuples de somnambules s’éveilleront du cauchemar où les plongent
1685
ait que dès maintenant se constituent ces élites,
et
cela ne se peut que si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le
1686
ourage d’être, malgré les mots14, des anarchistes
et
des utopistes. J’appelle anarchiste, tout ce qui est violemment et in
1687
J’appelle anarchiste, tout ce qui est violemment
et
intégralement humain. L’anarchie est un degré d’intensité dans la vie
1688
lement un homme libre qui a une foi (ou un amour)
et
qui s’y consacre. (Mais alors !… Je vois à votre mine stupidement ras
1689
le connaît mieux qu’eux qu’il y a vu des fissures
et
des possibilités nouvelles. Tenir compte du réel ne signifie pas s’y
1690
romantique suppose l’existence. Que faire ? Voir
et
penser juste d’abord. Simplement. Ensuite, soutenir cette opinion : l
1691
u non, M. W. Rosier, auteur de manuels d’histoire
et
de géographie bien connus, pour l’esprit le plus dangereusement plat
1692
oui, cela finira par créer un courant d’opinion.
Et
l’opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les jo
1693
eulent à propos de n’importe quoi, comme on sait,
et
ils auraient là l’occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien
1694
rédemption du journalisme, ce que je propose-là.
Et
c’est ainsi qu’on peut imaginer sans trop d’invraisemblance de petite
1695
déteste l’école a pourtant faim d’instruction15,
et
se croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux. Le peuple veut s
1696
s droits fondamentaux. Le peuple veut s’instruire
et
on lui bourre le crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire com
1697
e l’école est le plus gros obstacle à sa culture.
Et
c’est cela, préparer le terrain. D’autre part, il faut partir de ce q
1698
connaissances mortes. Une technique spirituelle.
Et
puis, qu’il en fasse ce qu’il voudra. Les Orientaux appellent yoga ce
1699
e culture des facultés physiques, intellectuelles
et
mystiques. Toute leur force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur
1700
les et mystiques. Toute leur force vient du yoga.
Et
tout le yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résu
1701
Si l’Occident comprenait cette vérité élémentaire
et
en tirait des conclusions immédiates, non seulement il serait sauvé d
1702
re, mais il recouvrerait la domination du monde16
et
non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’empêche de comprendre, ic
1703
’en citerai deux exemples : la discipline jésuite
et
le drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan
1704
l’on impose au corps une immobilité absolue. L’un
et
l’autre de ces exercices montrent que le candidat possède une énergie
1705
de une énergie suffisante pour aller plus loin, —
et
en même temps constituent des sources d’énergie nouvelle. Le parallèl
1706
it. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux
et
impopulaires. Tout comme ce qu’ils désignent d’ailleurs. Tant mieux.
1707
le nombre parce qu’elle le contient en puissance.
Et
c’est pourquoi l’aristocratie de l’esprit est nécessaire au bien publ
1708
diesse quelque chose comme l’instruction privée :
et
moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous.
1709
ésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes
et
tout un arc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent la blanche
1710
amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses
et
de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ? Ar
1711
attribuer à ses adversaires des intentions noires
et
consciemment criminelles. Ce travers a été développé jusqu’au ridicul
1712
ournaux, les cercles, les coulisses de parlements
et
autres potinières ne vivent que de semblables accusations. Du moment
1713
les accusations. Du moment que n’importe qui juge
et
contrôle n’importe quoi, il faut bien inventer des dessous pour redon
1714
sse, etc. » — Il semble qu’en attaquant ses idées
et
leurs réalisations ont ait porté atteinte à la dignité morale de ce M
1715
les premières victimes du système qu’il propagent
et
qui les fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur pr
1716
. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens
et
toute leur efficace que dans un système religieux. Pour quiconque a u
1717
ns un système religieux. Pour quiconque a une foi
et
la conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que rel
1718
eux. Mais les questions confessionnelles enrayent
et
faussent tout. Imaginez une culture spirituelle indépendante de toute
1719
ligieuse particulière. On peut faire des haltères
et
rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes at
1720
ourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes
et
philosophes : ces Messieurs n’apparaissent ici que pour impressionner
1721
main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine
et
sur ce besoin dans ses Articles pédagogiques encore très actuels, du
1722
ses : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard,
et
Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montr
1723
l’homme de tout ce que son ignorance respectait,
et
ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre
1724
tait, et ne lui donne à la place que des laideurs
et
de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafou
1725
utre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué
et
qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est p
1726
dessein est assez différent, moins philosophique
et
point du tout technique. J’apporte un témoignage personnel, une réact
1727
la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
et
sans doute celle de beaucoup d’autres à qui forcément, je ressemble.
1728
libéraux ont admis, conformément à leurs maximes,
et
toléré malgré leur mauvaise humeur. Ce régime de punaises jaunâtres a
1729
naises jaunâtres aboutit à l’instruction publique
et
grâce à elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ;
1730
’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades
et
il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond mi
1731
pas un argument. Je demande le droit de démolir.
Et
me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de propose
1732
s, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient
et
organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à
1733
je m’attends à cent « réponses » de cette sorte.
Et
je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais rég
1734
e resservir ces arguments, bien que dûment prévus
et
réduits à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’aurai plus qu’
1735
ssie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright,
et
tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Rés
1736
ésumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque,
et
on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier. B. Répons
1737
sont les partisans d’une démocratie progressiste
et
tolérante qui se livrent à ces excès de langage. Je les renvoie en co
1738
anquillité avec laquelle ils brouillent les faits
et
les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libéra
1739
e de marquer ici la distinction classique du fait
et
du droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’instruction pu
1740
ci la distinction classique du fait et du droit ;
et
c’est pourquoi je considérerai d’abord l’instruction publique dans se
1741
poserai la question de savoir si tant de laideurs
et
d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de not
1742
t qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance
et
les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il
1743
tuteurs : Faire de ces belles analyses logiques,
et
grammaticales, où tout retombait droit… Et de ces beaux problèmes d’a
1744
iques, et grammaticales, où tout retombait droit…
Et
de ces beaux problèmes d’arithmétique où il fallait si soigneusement
1745
calculs du raisonnement, par une barre verticale,
et
où il y avait toujours des robinets qui coulaient pour emplir ou pour
1746
ui coulaient pour emplir ou pour vider un bassin (
et
souvent les deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupati
1747
der un bassin (et souvent les deux), (pour emplir
et
vider ensemble), (drôle d’occupation), (après combien d’heures…) ; et
1748
(drôle d’occupation), (après combien d’heures…) ;
et
il y avait toujours des appartements à meubler. Et on multipliait le
1749
t il y avait toujours des appartements à meubler.
Et
on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que
1750
e mauvaises notes dans nos carnets hebdomadaires,
et
une semonce à nous gâter toute une journée. Une journée d’enfant gâté
1751
er toute une journée. Une journée d’enfant gâtée.
Et
d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’es
1752
ire faux, parce que les autres auront fait juste,
et
qui voudrait bien pleurer, et qui recommence à gratter son ardoise où
1753
auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer,
et
qui recommence à gratter son ardoise où sèchent des traînées de craie
1754
raie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent…
Et
c’est cela l’enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au so
1755
es petites guerres mystérieuses, avec des ennemis
et
des alliés imaginaires, des jeux en cachette, odeurs de peaux, comme
1756
omme dans un rêve, des matins de dimanche sonores
et
tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et
1757
cuiller d’huile de foie de morue avant le repas,
et
le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas,
1758
oir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff
et
Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la
1759
veries, des recoins, une longue aventure sérieuse
et
incertaine, un peu sale et un peu divine, baignée d’une très vague an
1760
ngue aventure sérieuse et incertaine, un peu sale
et
un peu divine, baignée d’une très vague angoisse que l’on fuyait avec
1761
minent mon enfance : les séances chez le dentiste
et
l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce
1762
’on en était. Cela m’attira des reproches acides,
et
naturellement, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même
1763
me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé
et
méfiant, sans cesse en garde contre moi-même à cause des autres desqu
1764
allait pas différer, profondément hypocrite donc,
et
le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les ho
1765
donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2
et
2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois
1766
c’est stérile, mais ça ne fait de mal à personne,
et
de plus, toutes choses égales d’ailleurs, dans un certain domaine, c’
1767
our m’habituer à cette idée. Je tenais cette clef
et
n’osais m’en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent r
1768
que tous les hommes doivent être égaux en tout ?
Et
la première réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démoc
1769
que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère
et
étende ses conquêtes. C’était découvrir notre asservissement. Je song
1770
urgeois, qui est une généralisation de l’avarice,
et
par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle
1771
on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte
et
de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arb
1772
onnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire
et
le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffran
1773
ur je compris que ce n’étaient que des principes.
Et
ce fut ma seconde découverte : ce monde simplifié, si évident, si par
1774
Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal
et
nécessaire — et qui était le seul pour lequel on nous préparait — c’é
1775
raissait comme l’achèvement idéal et nécessaire —
et
qui était le seul pour lequel on nous préparait — c’était un système
1776
nablement organisé des esprits moyens, prosaïques
et
rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un r
1777
nt de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité
et
le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d
1778
un fils d’ouvrier est l’égal d’un petit Dauphin —
et
même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier es
1779
oureusement ennuyeuses qui sont dans les livres —
et
nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des mentions hon
1780
rrivions dans la vie avec des mentions honorables
et
une inconcevable gaucherie, c’est-à-dire avec des titres pour méprise
1781
es pour mépriser toute valeur simplement humaine,
et
une honte secrète qui exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Ma
1782
ne, et une honte secrète qui exaspérait ce mépris
et
le rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compres
1783
encore l’action. Je n’eus pas plus tôt découvert
et
nommé cet asservissement de l’esprit et ces mythes stériles, que je l
1784
découvert et nommé cet asservissement de l’esprit
et
ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de co
1785
rences sont les premières marques de la vie vécue
et
l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en
1786
er les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé.
Et
pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressembl
1787
vécue. Ce que je vais dire est sans doute injuste
et
faux dans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de l
1788
ini par son incompréhension méthodique des hommes
et
son mépris pour les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le r
1789
le n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus,
et
ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient sensible
1790
qui signent des manifestes en mauvais français —
et
je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai
1791
éexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École,
et
attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attir
1792
Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement
et
tel qu’il se manifeste dans l’école primaire est un véritable virus d
1793
e primaire est un véritable virus de mesquinerie,
et
devrait être soigné au même titre que certaines autres maladies dites
1794
d’une façon frappante ce qu’il y a de schématique
et
de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est
1795
a porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron
et
d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empe
1796
goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
et
les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière
1797
habits des écoliers empeste encore mes souvenirs.
Et
la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un
1798
, ces devises… —, les estampes piquées, Numa Droz
et
ses crottes de mouches… Dans ce décor s’écoulent huit années de votre
1799
r s’écoulent huit années de votre vie, citoyens !
Et
vous pensez que c’est un grand progrès sur la Nature. Quelle peut bie
1800
n être la vertu éducatrice d’un tel milieu, moral
et
matériel ? L’école publique, telle que nous la voyons est semblable à
1801
Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité,
et
ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mai