Extrait du discours prononcé par Denis de Rougemont à l’inauguration du Centre (mai 1951)a
Notre programme n’est pas systématique, et il n’est pas non plus rigide. Il reste ouvert à l’événement. J’oserais dire qu’à certains égards, il est moins décisif en soi que l’existence même de ce Centre, par où j’entends que le principal, c’est qu’il y ait en Europe un lieu consacré à l’esprit, où des hommes travaillant en équipe vouent leurs efforts à l’union de l’Europe, c’est-à-dire au service d’une cause qui se confond aujourd’hui avec celle des hommes libres.
Car en fin de compte, pourquoi faut-il sauver▶ l’Europe ? Non point pour l’opposer aux grandes nations nouvelles, non point pour élargir l’esprit nationaliste aux dimensions du continent, non par orgueil ou par satisfaction de nous-mêmes, et encore moins avec le fol espoir d’apaiser à jamais tous nos conflits, mais au contraire : pour maintenir les risques de la liberté, qui ont fait la vraie grandeur de l’homme européen, et pour ◀sauver, en face de la terre des masses, et de la terre des machines, et des terres immenses de la fatalité, une Europe qui demeure la terre des hommes.