Enquête sur l’▶enseignement civique dans ◀les▶ pays européens [Avant-propos] (mai 1963)cu
◀L’▶enquête dont nous publions aujourd’hui ◀l’▶analyse avait pour objectif bien défini ◀d’▶étudier ◀le▶ terrain sur lequel allait se développer ◀la▶ Campagne ◀d’▶éducation civique européenne.
◀Les▶ considérations conduisant à ◀l’▶idée ◀d’▶une telle campagne avaient été souvent exposées dans ◀les▶ publications du CEC, notamment dans ◀le▶ Guide européen ◀de▶ ◀l’▶enseignant (1958) et dans ◀le▶ Guide européen ◀de▶ ◀l’▶enseignement civique (1960-1961) établis en collaboration avec ◀l’▶Association européenne des enseignants. Nous écrivions notamment en 1960 :
Si maintenant nous voulons faire ◀l’▶Europe, c’est-à-dire fédérer nos peuples et ◀les▶ doter ◀d’▶institutions communes, il est bien clair que cette fédération ne tombera pas du ciel, et ne sera pas non plus instaurée par des moyens dictatoriaux : ◀les▶ échecs ◀de▶ Napoléon et ◀d’▶Hitler ◀l’▶ont bien fait voir. ◀L’▶union ◀de▶ ◀l’▶Europe suppose en fait ◀les▶ mêmes exigences que ◀la▶ démocratie : elle doit être voulue et comprise par ◀la▶ majorité des habitants ◀de▶ ◀l’▶Europe. Sinon, il est probable qu’elle se fera tout de même — elle est déjà en train de se faire — mais elle n’aura que ◀le▶ nom ◀d’▶une démocratie, que ◀le▶ nom ◀d’▶une fédération ; elle sera en réalité une super-société anonyme, gouvernée comme toutes ◀les▶ S.A. du monde, non point par ◀les▶ actionnaires mais par un groupe ◀d’▶administrateurs délégués, ◀de▶ directeurs généraux et ◀de▶ fonctionnaires, au mieux technocrates. ◀Le▶ problème urgent qui se pose est donc celui ◀de▶ ◀la▶ promotion ◀d’▶un civisme européen.
Au terme ◀d’▶un colloque universitaire qui se tint à Genève en mai 1961 sous ◀les▶ auspices ◀de▶ ◀la▶ Journée européenne des écoles, des Communautés économiques européennes et du CEC, ◀la▶ formation ◀d’▶un groupe ad hoc fut décidée, en vue de lancer ◀la▶ Campagne. ◀Le▶ colloque venait en effet ◀de▶ constater non seulement ◀l’▶état retardataire et démodé ◀de▶ ◀l’▶instruction civique dans presque tous nos pays, mais encore ◀la▶ quasi-inexistence des perspectives européennes dans cet enseignement. Un vaste effort s’imposait donc ◀de▶ toute urgence. Il exigeait ◀la▶ coopération ◀de▶ tous ◀les▶ organismes préoccupés ◀d’▶éducation européenne et travaillant déjà dans ce domaine : Conseil de l’Europe*, Communautés ◀de▶ Bruxelles*, Journée européenne des écoles, AEDE, Fondation européenne ◀de▶ ◀la▶ culture, et Centre européen de la culture*55.
Constitué ◀de▶ représentants ◀de▶ tous ces organismes et ◀de▶ hauts fonctionnaires ◀de▶ plusieurs ministères ◀de▶ ◀l’▶Éducation, ◀le▶ groupe ad hoc tint sa première séance à Genève ◀les▶ 5 et 6 janvier 1962. Il élabora ◀le▶ plan général ◀d’▶une Campagne ◀d’▶éducation civique européenne et son horaire pour ◀les▶ années 1962 et 1963. ◀Le▶ plan comportait ◀les▶ étapes suivantes :
1. Enquête auprès des ministères ◀de▶ ◀l’▶Éducation ◀de▶ tous ◀les▶ pays ◀d’▶Europe, sur ◀l’▶état ◀de▶ ◀l’▶instruction civique et ◀les▶ possibilités ◀d’▶y introduire une éducation européenne.
2. Réunion ◀d’▶un séminaire international pour examiner ◀les▶ méthodes ◀de▶ ◀la▶ campagne.
3. Élaboration ◀d’▶un guide du maître.
4. Stages internationaux ◀de▶ formation européenne des enseignants.
5. Stages régionaux et nationaux, dirigés par ◀les▶ participants aux stages précédents.
6. Création ◀d’▶un Centre européen ◀de▶ documentation pédagogique au CEC.
7. Rédaction ◀d’▶un mémorandum aux ministères, sur ◀la▶ base des réponses à ◀l’▶enquête.
◀Le▶ questionnaire préparé par Mme A. Ducimetière et mis au point par ◀le▶ groupe ad hoc put être envoyé aux ministères dès ◀la▶ mi-janvier 1962. ◀Le▶ séminaire sur ◀les▶ méthodes eut lieu au mois ◀de▶ mai, à Royaumont, et donna ◀l’▶impulsion nécessaire à ◀la▶ Campagne. Il établit ◀le▶ plan du Guide du maître actuellement en cours ◀de▶ rédaction (pour paraître en 1964) et ◀le▶ programme ◀de▶ plusieurs stages internationaux. Le premier ◀de▶ ces stages se tint à Bruxelles en début janvier 1963 sous ◀les▶ auspices et avec ◀l’▶appui du gouvernement belge. (Son compte rendu fera ◀l’▶objet ◀d’▶une publication, par ◀les▶ soins du ministère ◀de▶ ◀l’▶Éducation nationale et ◀de▶ ◀la▶ culture.) Deux autres stages vont avoir lieu en 1963, à Tutzing (mai) et à Zurich (octobre).
Entre-temps, ◀les▶ réponses à ◀l’▶enquête étaient parvenues au CEC, dans ◀les▶ délais prévus, à quelques semaines près.
Comme il fallait s’y attendre, ces réponses font ressortir surtout ◀les▶ lacunes et ◀l’▶insuffisance ◀de▶ ◀l’▶enseignement civique dans la plupart de nos pays. Elles définissent ◀d’▶une manière très concrète ◀la▶ nature des obstacles à surmonter, et quelques-uns des moyens immédiats à mettre en œuvre : cours ◀de▶ formation des maîtres, documentation, leçons types, échange ◀d’▶expériences. Bref, elles confirment ◀l’▶ampleur des tâches à accomplir et dessinent quelques voies ◀d’▶approche. Il reste à trouver, ou à former, ◀les▶ hommes qui se chargeront ◀de▶ ces tâches, et ◀les▶ moyens financiers nécessaires. Ces derniers devraient être empruntés, à mon avis, au budget ◀d’▶une défense nationale bien comprise (comprenant donc ◀le▶ moral ◀d’▶un pays, son tonus civique), mais il est clair qu’on ne pouvait s’attendre à trouver pareille suggestion dans ◀les▶ réponses officielles. Nous sommes encore, sur ce chapitre, loin de compte.
Ce qui est plus rassurant, c’est ◀la▶ bonne volonté manifestée par tous ◀les▶ ministères à l’égard d’une action européenne dans ◀le▶ domaine ◀de▶ ◀l’▶éducation. Cette réaction positive, sans réserve, est particulièrement frappante dans des pays qui, jusqu’ici, se sont tenus à ◀l’▶écart ◀de▶ ◀l’▶entreprise des Six, voire même du Conseil de l’Europe. Partout, on dit attendre une aide européenne, pour résoudre des tâches nationales, et qui étaient même, naguère, ◀le▶ domaine réservé des influences ◀les▶ plus nationalistes.
Insuffisances flagrantes mais franchement reconnues, ouverture déclarée sur un avenir européen, telles sont ◀les▶ deux conclusions majeures qui me paraissent résulter ◀de▶ notre enquête. C’est dire que ◀la▶ Campagne ◀d’▶éducation civique était nécessaire, et qu’elle est possible, mais qu’il lui reste à susciter ◀d’▶immenses ressources, ou plutôt à mobiliser ◀les▶ volontés qui suffiraient sans doute à réunir ces ressources.