1 1924, Articles divers (1924–1930). M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)
1 herlant, le sport et les jésuites (9 février 1924) a M. de Montherlant est considéré par plusieurs comme l’un des hérit
2 rément purement littéraire : une leçon d’énergie. Il se pique de n’avoir pas connu, jusqu’à ce jour au moins, cette inquié
3 ittéraire : une leçon d’énergie. Il se pique de n’ avoir pas connu, jusqu’à ce jour au moins, cette inquiétude libératrice que
4 la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a bravement affirmé son unité. Car le te
5 s son premier livre, il s’est montré tout entier, il a bravement affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes
6 on premier livre, il s’est montré tout entier, il a bravement affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes g
7 quée encore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appelle symbol
8 esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et elle a donné naissance à la doctrine de M. de Montherlant, qui en est sort
9 tisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et elle a donné naissance à la doctrine de M. de Montherlant, qui en est sortie
10 de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t- il , se disputent le monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le m
11 utre philosophie est celle de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nati
12 r M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce qu’ il importe de sauvegarder, avant tout autre principe. Jusqu’ici, rien d’
13 arquons toutefois cette séparation, que Maurras n’ a pas faite aussi franchement, du catholicisme et du christianisme, le
14 n’est décidément pas philosophe. Peut-être ne lui a-t -il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le co
15 t décidément pas philosophe. Peut-être ne lui a-t- il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collè
16 manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a sai
17 nqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi
18 llège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’ a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes
19 es et chaud de l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d
20 chaud de l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’ a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une
21 de l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon
22 façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t -il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres du guerrier et du bou
23 n obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t- il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres du guerrier et du bourge
24 autres du guerrier et du bourgeois. Dernièrement, il abandonna le stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœur
25 où nous vivons tous. Écœuré du désordre général, il cherche des remèdes, et nous tend les premiers qui lui tombent sous l
26 ent être administrés ensemble. L’opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours
27 être administrés ensemble. L’opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours d
28 faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’ a pas été sans quelques tours de passe-passe de logique, admirablement
29 . « On se fait son unité comme on peut », avoue-t- il franchement. Il me semble bien paradoxal de vouloir unir dans une mêm
30 on unité comme on peut », avoue-t-il franchement. Il me semble bien paradoxal de vouloir unir dans une même philosophie la
31 erlant est justement un des premiers Français qui ait compris que le but du sport n’est pas la performance, mais le style e
32 eut oublier la partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable : « Ces simplifications valent ce que va
33 on idées générales, et j’avoue bien volontiers qu’ il n’est pas une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde 
34 désignés… ». Voici passer un coureur : « À peine a-t -il touché la piste d’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à
35 ignés… ». Voici passer un coureur : « À peine a-t- il touché la piste d’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à so
36 ’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre terre et ciel. Ma
37 e et posée, est pleine du désir de l’air. Danse-t- il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que le corps en
38 accepte une règle ; on l’assimile, à tel point qu’ elle n’est plus une entrave à la violence animale déchaînée dans le corps
39 . Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je demande qu’on me soit dévo
40 qu’on m’aime. Je demande qu’on me soit dévoué. » Ils disent : « Tu es notre capitaine. » Ces choses ne sont pas dites en v
41 n peut retenir, c’est la méthode, car je crois qu’ elle sert mieux la démocratie que l’Église romaine, quoi qu’en pense M. de
42 pense M. de Montherlant. Et voici, ô paradoxe, qu’ il rejoint Kant, Kant qui écrit : « C’est sur des maximes, non sur la di
43  C’est sur des maximes, non sur la discipline, qu’ il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus,
44 es filles assez fortes pour pouvoir tout lire, et il n’y aura plus besoin de roman catholique. » C’est ce qu’on pourrait a
45 es assez fortes pour pouvoir tout lire, et il n’y aura plus besoin de roman catholique. » C’est ce qu’on pourrait appeler un
46 e. Ainsi l’athlète à l’entraînement ne s’épuise-t- il pas à combattre certaines faiblesses : il développe ses qualités, le
47 puise-t-il pas à combattre certaines faiblesses : il développe ses qualités, le reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Month
48 e s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le stade, se rendra mieux compte à distance de la contradictio
49 bâtie son œuvre. L’intéressant sera de voir ce qu’ il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin
50 etenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales 
51 catholique. Et son lyrisme, encore un peu brutal, il saura le dompter, et atteindre au classicisme véritable. Voici un con
52 tructeur, un entraîneur, et qui joue franc jeu. S’ il faut lutter contre lui, nous savons qu’il observera les règles. Saluo
53 jeu. S’il faut lutter contre lui, nous savons qu’ il observera les règles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le m
54 ntherlant légitime une telle « simplification ». a . Rougemont Denis de, « [Compte rendu] M. de Montherlant, le sport et
2 1924, Articles divers (1924–1930). Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)
55 cisme de David et d’Ingres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une exploration merveilleuse dans l
56 s à leur point de départ. Mais leurs recherches n’ ont pas été vaines. Ils en reviennent chargés de chefs-d’œuvre, et plus c
57 part. Mais leurs recherches n’ont pas été vaines. Ils en reviennent chargés de chefs-d’œuvre, et plus conscients de leurs m
58 (contrairement à ce que pense souvent le public), ils préparent l’avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évi
59 nt l’avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de la peinture moderne avec une netteté
60 ief remarquable. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la fa
61 intre. Souhaitons d’entendre encore M. Meili. Est- il besoin de souligner l’importance de telles prises de contact entre ar
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
62 Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925) a Henry de Montherlant, héritier d’une tradition chevaleresque, mène
63 eaucoup d’antérieures protestations belliqueuses. Il nous montre « des Français qui pensent ces carnages inévitables, avec
64 titude est responsable de ces carnages ». Naguère il était des premiers ; il s’affirme aujourd’hui des seconds. C’est pour
65 e ces carnages ». Naguère il était des premiers ; il s’affirme aujourd’hui des seconds. C’est pour avoir contemplé Verdun,
66 il s’affirme aujourd’hui des seconds. C’est pour avoir contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de la mort. Mais alors
67 gendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ ils trouvaient au front. D’une phrase, il justifie son livre : « Ranimons
68 e vie » qu’ils trouvaient au front. D’une phrase, il justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour les vouloir éviter,
69 irent » du front dans notre paix lassée, ne prend- elle pas une pathétique signification ? Pourtant ici encore transparaît un
70 ontraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’ il appelle, c’est autre chose que l’absence de guerre, c’est une paix qu
71 travaillerait le levain des vertus guerrières. «  Il faut que la paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souven
72 paix, c’est vers de plus sereines exaltations qu’ il va porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’aventure antiqu
73 sereines exaltations qu’il va porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rom
74 ent lorsqu’on parle de cette œuvre : je ne sais s’ il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou da
75 dans la guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t- il pas offrir ainsi les romans « intéressants » ou « curieux » ; le « gr
76 sme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vérité » qui brûle
77 and, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’ il lui faudra livrer au « feu de vérité » qui brûle dans son temple inté
78 e vérité » qui brûle dans son temple intérieur, s’ il veut rester digne de son rôle et vraiment le coryphée d’une génératio
79 , flamme d’une pureté si rare en notre siècle, qu’ elle paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’av
80 ie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie. a . Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Chant fu
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
81 a significative pauvreté idéologique et morale qu’ il révèle. Le style brillant et elliptique qui tend à devenir notre ponc
82 a pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement les principes de sa « révolution » semblent au con
83 e philosophie ou de psychanalyse. Ces principes ? Ils se laissent hélas résumer en un court article de dictionnaire : « Sur
84 ue ou morale. » (p. 42). Le surréalisme ne serait- il donc qu’une sorte de méthode des textes généralisée ? Point du tout !
85 méthode des textes généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est la seule attitude littéraire aujourd’hui concevable.
86 textes généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’ il est la seule attitude littéraire aujourd’hui concevable. Mais par que
87 icheries plus ou moins conscientes M. Breton peut- il préconiser l’existence d’une littérature fondée sur de tels principes
88 enait, qui écrivit : « Quand les livres se liront- ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se compr
89 s des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront- ils individuellement ? » Que M. Breton donne des « recettes pour faire un
90 sie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient- elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncidence entre l’unive
91 voir que M. Breton serait un très curieux poète s’ il ne s’efforçait de donner raison aux 75 pages où il voulut nous persua
92 l ne s’efforçait de donner raison aux 75 pages où il voulut nous persuader que tout poème doit être une dictée non corrigé
93 tte mystification : la plupart des surréalistes n’ ont rien à dire, mais savent admirablement parler. Ils érigent donc en do
94 nt rien à dire, mais savent admirablement parler. Ils érigent donc en doctrine leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée h
95 Ils érigent donc en doctrine leur impuissance. «  Il n’y a pas de pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de
96 igent donc en doctrine leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaph
97 pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient- ils de métaphores comme d’autres de raisonnements. Plaisante ironie, si c
98 otestation contre nos poncifs intellectuels. Mais elle risque bien de nous en rendre un peu plus esclaves. Car depuis Freud
99 dre un peu plus esclaves. Car depuis Freud — dont ils se réclament imprudemment, — on sait ce que c’est que la « liberté »
100 s, c’est que — pour reprendre un mot de Cocteau — ils « embaument de vieilles anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridic
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
101 vrage publié en France sur Van Gogh, depuis 1922. Il contient pourtant des vues assez neuves. M. Colin s’est contenté de n
102 s le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de ces jeunes gens prétentieux et sincères qui se
103 ents. Le miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer.
104 le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement d’Arles, jusqu’au jour où cette
105 nsomption frénétique terrassant un corps minable, il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de
106 et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’avoir rien caché des médiocrités de cette
107 ur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’ avoir rien caché des médiocrités de cette vie : les reproductions qui suive
108 motif à l’admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’a pas cherch
109 harger la « vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’ a pas cherché à expliquer ce miracle. Il nous laisse à notre émotion de
110 M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce miracle. Il nous laisse à notre émotion devant le spectacle d’une œuvre qui ne du
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
111 r scientifique, « Prix Goncourt », curieux homme. Il se livre à des travaux de précision : il calcule un plan, un poème. I
112 x homme. Il se livre à des travaux de précision : il calcule un plan, un poème. Il écrit un livre sur Einstein, des articl
113 vaux de précision : il calcule un plan, un poème. Il écrit un livre sur Einstein, des articles sur Valéry, St John Perse.
114 la liquidation des questions traitées est rapide, elle est complète aussi. On s’étonne de ce que Fabre, disciple de Valéry,
115 e telle platitude est presque indispensable, mais il s’en permet d’autres qui le sont moins. On n’écrit pas un roman en tr
116 inertie du peuple qui donnait tant de mal lorsqu’ il fallait l’éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit so
117 ramagnou voit son œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir les foules : déjà elles huent sa modératio
118 ; il tente en vain de ressaisir les foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-devant des troupes accou
119 es foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-devant des troupes accourues, il meurt en clamant la p
120 s il va se jeter au-devant des troupes accourues, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand r
121 accourues, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergu
122 le richesse psychologique. En fermant le livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il 
123 En fermant le livre on a presque l’impression qu’ il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’absence de s
124 fermant le livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’absence de sty
125 sion qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t- il  ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour
126 ues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œuvre d’ailleurs, il reste que le Tarramagnou est un livre émouvant, d’une saine puissance
127 nou est un livre émouvant, d’une saine puissance. Il reste que Lucien Fabre a tenté, et en somme, réussi, une entreprise b
128 d’une saine puissance. Il reste que Lucien Fabre a tenté, et en somme, réussi, une entreprise bien téméraire de nos jour
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
129 our provoquer cette confrontation seulement qu’on a imaginé un péril oriental, car il semble bien que dans le domaine de
130 seulement qu’on a imaginé un péril oriental, car il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que p
131 renouveau, c’est à quelques savants européens qu’ il le devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarra
132 e et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’enquête des Cahiers du Mois donne un fort inté
133 sentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’ as qu’une valeur de symbole », a dit A. Breton. C’est de cet Orient qu’i
134 Orient…, toi qui n’as qu’une valeur de symbole », a dit A. Breton. C’est de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger
135 ymbole », a dit A. Breton. C’est de cet Orient qu’ il s’agit, et Jean Schlumberger le définit encore : « … tout ce qui est
136 rabie, Indes et Chine sous une dénomination qui n’ a de sens que par rapport à l’Europe. Il serait vain de tenter un class
137 ation qui n’a de sens que par rapport à l’Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’une extraord
138 sance de choix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attribuent cette supériorité a
139 tes ces opinions ; et ceux qui avouent n’en point avoir , sincérité trop rare… Presque toutes les réponses, conclusions ou int
140 utes les réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des do
141 ’éducation historique des peuples chrétiens qui n’ ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre la re
142 on historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre la religion
143 qui, eux, apportent des documents, savent de quoi ils parlent, ils se récusent lorsqu’il s’agit de conclure. Un écrivain gr
144 ortent des documents, savent de quoi ils parlent, ils se récusent lorsqu’il s’agit de conclure. Un écrivain grec, M. Embiri
145 avent de quoi ils parlent, ils se récusent lorsqu’ il s’agit de conclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé la formu
146 agit de conclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que les autres entendent vaguement p
147 ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la première fois le rôle de l’Europe « conscie
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
148 t un héros de Mauriac. C’est un « homme seul » qu’ a peint « par le dedans » M. Jean Prévost, en un saisissant raccourci p
149 st fait de plusieurs fous qui s’annulent », écrit- il . Ce fou qui veut être soi purement, qui veut éliminer de soi tout ce
150 érieur, — ce fou que nous portons tous en nous, —  il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablemen
151 r, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’ a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement da
152 us, — il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouv
153  il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’ a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve êt
154 un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme tout
155 st terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’en est pas moins probante. Une œuvre d’art que ce petit livre ? C’e
156 ration ; mais, puissante de sûreté et d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théorème de Spinoza. Une ironie
157 n ; mais, puissante de sûreté et d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théorème de Spinoza. Une ironie d
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Almanach 1925 (septembre 1925)
158 dition Fischer passait pour « la centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
159 gite l’Allemagne nouvelle — et peut-être parce qu’ il sait en sortir parfois — M. Otto Flakei a gardé son bon sens et son s
160 rce qu’il sait en sortir parfois — M. Otto Flakei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses
161 gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir quel
162 l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’ il vient de parcourir quelque superficialité, du moins faut-il le louer
163 e parcourir quelque superficialité, du moins faut- il le louer d’avoir conservé une vision générale de notre temps et un év
164 elque superficialité, du moins faut-il le louer d’ avoir conservé une vision générale de notre temps et un évident besoin d’im
165 oman sans exposer et discuter toutes les idées qu’ elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leurs actions sont
166 et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et désolant à celui qui, revenu de l’é
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
167 œuvre « d’importance européenne », croyez-vous qu’ il aille s’abandonner à l’émotion communicative de qui découvre un somme
168 xemplaires ne suscitent un intérêt très profond : elles nous transportent au cœur de préoccupations des plus modernes, problè
169 être celui d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t- il pas que les personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels,
170 réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volonté d’être ou de ne pas être…
171 e ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ ils veulent être, subissent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de
172 dello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ ils sont, le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno
173 esque inhumaine torture et conduit au crime. Et s’ ils s’imposent comme types, c’est encore et uniquement par leur obsédante
174 impression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation
175 sion de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de bar
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
176 nsée française (octobre 1925)k Peut-être n’est- il pas trop tard pour parler du Vinet de M. Seillière, de ce nouveau cha
177 Vinet de M. Seillière, de ce nouveau chapitre qu’ il vient d’ajouter à sa grande étude sur les rapports du christianisme e
178 ns l’époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme
179 iellement chrétien sur le mysticisme naturiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’imagine son étonnement à déc
180 ur ce qui concerne le Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à son propre corps de doctrines
181 qui concerne le Vinet juge des romantiques, il n’ a pas eu trop de peine à l’annexer à son propre corps de doctrines crit
182 oncerne le Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à son propre corps de doctrines critiques.
183 nes critiques. Dirai-je pourtant que je crains qu’ il n’ait été incité parfois, et presque inconsciemment, à gauchir légère
184 ritiques. Dirai-je pourtant que je crains qu’il n’ ait été incité parfois, et presque inconsciemment, à gauchir légèrement l
185 sans gêner M. Seillière. C’est peut-être pourquoi il insiste sur le fait que Vinet se déclarait « un chrétien sans épithèt
186 se déclarait « un chrétien sans épithète ». Croit- il éluder ainsi le protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’e
187 éluder ainsi le protestantisme de Vinet ? Ne voit- il pas que rien n’est plus protestant qu’une telle attitude ? Mais ces r
188 n dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’ avait trouvé. Mais sa position purement chrétienne — un mysticisme de cadre
189 isme exaspérés, pour notre nouveau mal du siècle, il n’est peut-être pas de pensée plus vivante, ni de plus tonique que ce
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
190 nges pour assembler un sourire ». Comme Max Jacob il lui arrive de situer une anecdote purement poétique dans un monde qu’
191 r une anecdote purement poétique dans un monde qu’ il s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile : la description du m
192 que dans un monde qu’il s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile : la description du monde qu’il invente nous lasse
193 l est parfois facile : la description du monde qu’ il invente nous lasse quand elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourta
194 scription du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l
195 ez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seuleme
196 e l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t -il influence ou seulement co-génération ? Pour peu qu’ils sortent des
197 ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t- il influence ou seulement co-génération ? Pour peu qu’ils sortent des ca
198 nfluence ou seulement co-génération ? Pour peu qu’ ils sortent des cafés littéraires, nos poètes respirent le même air du te
199 Leur originalité se retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine
200 manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’air dur des pampas. « L
201 e, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’univers int
202 s les étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que son lyrisme cosmique. On
14 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
203 tte libération, un Yeats, un A.E., bien d’autres, ont su payer de leur personne. Effet, puisque l’héroïsme d’une révolution
204 que d’ailleurs Mlle Simone Téry ne fait pas. Car elle veut éviter l’emballement et conserver dans l’admiration son sens cri
205 et ses commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit
206 s commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit d
15 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
207 rète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t- elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses é
208 avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné de beaux exemples du parti que peut tirer le nouveau romantisme
209 t tirer le nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épopée dans Prikaz, cette traduction françai
210 s commençons aujourd’hui un roman bien différent, a vu la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une vill
211 romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions de petits. V
212 les trois Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église,
213 femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) : Ils s’embrassaient comme des gens qui auraient eu faim toute leur vie… Ma
214 Anglais) : Ils s’embrassaient comme des gens qui auraient eu faim toute leur vie… Markovitch, derrière sa vitre, tremblait si f
215 : Ils s’embrassaient comme des gens qui auraient eu faim toute leur vie… Markovitch, derrière sa vitre, tremblait si fort
216 rkovitch, derrière sa vitre, tremblait si fort qu’ il avait peur de trébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la
217 vitch, derrière sa vitre, tremblait si fort qu’il avait peur de trébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin po
218 ’il avait peur de trébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec l
219 lumière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa fenêtre, se tra
220 ière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna ju
221 ment. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle le plus éloigné du rédui
222 olant sa patrie. Une effroyable acceptation, mais elle peut se muer instantanément en révolte. Aucun cadre logique ne déterm
223 dre logique ne détermine l’avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’âme russe : mais des possi
224 ique ne détermine l’avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’âme russe : mais des possibilité
225 d’explosion. Le géant russe est un enfant : va-t- il rire, va-t-il pleurer ? m’embrasser ou me tuer ? Il sent autour de lu
226 Le géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t- il pleurer ? m’embrasser ou me tuer ? Il sent autour de lui quelque chos
227 rire, va-t-il pleurer ? m’embrasser ou me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il le r
228 de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le
229 t l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’ il est encore ébahi du fracas, le juif survient avec une méthode simplif
230 ages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ ils créent en nous : Markovitch par exemple, ou Sémyonov, un cynique secr
16 1926, Articles divers (1924–1930). Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)
231 des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet de façon particulièrement frappante la com
232 es. Primitivement, le Saint est un homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’il serve. Mais très vite on étend l’appe
233 un homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’ il serve. Mais très vite on étend l’appellation de saint à ceux qui par
234 souplesse dont fait preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’adapter des traditions antiques au dogme en formation. Au Mo
235 é en Christ. — Comment l’Église catholique réagit- elle  ? En codifiant l’état de choses antérieur. Donc l’Église continue à f
236 ontinue à faire des saints, tandis que ce terme n’ a plus qu’un sens relatif pour nous protestants. Est-ce là nous juger ?
237 là nous juger ? Les catholiques nous reprochent d’ avoir méconnu l’élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans
238 dèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’ il existe divers ordres de sainteté ». Cette mère qui s’est sacrifiée au
239 te, comme ce missionnaire et cette diaconesse ? S’ il n’y a pas de saints protestants, il existe des saints dans le protest
240 me ce missionnaire et cette diaconesse ? S’il n’y a pas de saints protestants, il existe des saints dans le protestantism
241 iaconesse ? S’il n’y a pas de saints protestants, il existe des saints dans le protestantisme. Mais il n’est pas de fin au
242 il existe des saints dans le protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La sainteté parfaite ne commence
243 imites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a pas de saints, mais il f
244 s ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est l’enseignemen
245 ns, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est l’enseignement de J
246 de saint véritable. Il n’y a pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est l’enseignement de Jésus, telle est la pens
247 t l’enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’ a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque pour louer co
248 estantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupu
249 ule protestant, qui ne peut être un danger lorsqu’ il n’est, comme ici, que la loyauté d’un esprit animé par une foi agissa
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
250 époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’on court
251 fini, et l’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bonheur possible ou désirable subissent cette
252 ressaisissement profond et la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète quelques chefs, montre
253 els. Il y a encore les hommes politiques, mais on a si souvent l’impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre
254 politiques, mais on a si souvent l’impression qu’ ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux, jouerait aussi b
255 ssi mal. Quant aux meneurs de l’opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer. Je parle en géné
256 nion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un Romier, un
257 us les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à la place ? Nos penseurs, nos écri
258 ttre qui à la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela devient frappant dans les générations nouv
259 à l’action, c’est encore pour cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortifiant, je ne sais quelle excitation, quelle révél
260 vélation ou quel oubli. C’est un dilettantisme qu’ ils ont peut-être appris dans Barrès. Il leur manque une certitude fonciè
261 tion ou quel oubli. C’est un dilettantisme qu’ils ont peut-être appris dans Barrès. Il leur manque une certitude foncière,
262 tantisme qu’ils ont peut-être appris dans Barrès. Il leur manque une certitude foncière, une foi en la valeur de l’action.
263 une foi en la valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que l’époque réclame 1. C’est
264 à leurs tentatives morales, si singulières soient- elles — dont le grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur.
265 s dans le chaos des idées et des doctrines, et qu’ il n’existe pas d’esprit du siècle, hors un certain « confusionnisme ».
266  : c’est une unité d’inquiétude. Barrès et Gide : ils ont construit des édifices très différents de style, et dont les faça
267 ’est une unité d’inquiétude. Barrès et Gide : ils ont construit des édifices très différents de style, et dont les façades
268 vec une profonde conviction ; par vertu. Ce qui n’ a rien d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs aut
269 viction ; par vertu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est
270 ci la conception même de la littérature, telle qu’ elle apparaît chez les émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il fau
271 les émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’ il faut préciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans la littératu
272 uvrir des possibilités neuves, — pour le libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines historiques d’une c
273 e s’y appliqua dans un de ses derniers articles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus
274 le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le
275 ndamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, puisqu’elle seule perme
276 vain de dire qu’une époque s’est trompée, puisqu’ elle seule permet la suivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face d
277 être l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français pour pousser à bout l’expérience
278 l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’ a pas fallu longtemps aux Français pour pousser à bout l’expérience3. I
279 de sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé. Dégoût, parce qu’on se connaît trop, et que plus rien ne
280 ela fait à Dieu », disait Drieu la Rochelle. Mais il faudra bien se remettre à manger, tout de même nous avons un corps, e
281 udra bien se remettre à manger, tout de même nous avons un corps, et c’est très beau, Breton, de crier « Révolution toujours 
282 ntaires la matière de quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de l’âme o
283 pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de l’âme où s’éveille un désenchantement
284 phlets par quoi il se raccroche au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de l’âme où s’éveille un désenchantement qu
285 des derniers venus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans
286 derniers venus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’ a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la b
287 point d’y percevoir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin la cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’un
288 te des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révélation : « C’est peut
289 des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révélation : « C’est peut-ê
290 s : la perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révélation : « C’est peut-être que je suis médiocre
291 suis médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’ il est trop attaché encore à se regarder chercher, absorbant son attenti
292 ant son attention dans une sincérité si voulue qu’ elle va parfois à l’encontre de son dessein. ⁂ Décidément nous sommes mala
293 isolé, commenté par ceux qui le portent en eux qu’ il en paraît plus incurable. Ces jeunes gens n’en finissent pas de peind
294 n’en finissent pas de peindre leur déséquilibre. Il serait temps de faire la critique des méthodes et des façons de vivre
295 des façons de vivre autant que de penser qui les ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout dan
296 ments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ ils découvrent en eux est non seulement légitime à leurs yeux, mais « tab
297 on et folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’emportent, il est plus facile
298 st clair que les tendances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser que de constru
299 ’est justement de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettr
300 cte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’ avais goûté à l’alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous chériss
301 es à mépriser les longues vies heureuses que nous avions jusqu’alors enviées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les
302 réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent acheté au prix d’un martyre… Cette lassitude facile à juger du dehors
303 pour marquer l’aboutissement d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, l
304 e gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer. La plupart des r
305 tuite que prétendent mener les surréalistes, il n’ a fallu que le temps pour une folie de s’emballer. La plupart des roman
306 ose ; à la merci des circonstances extérieures qu’ il méprise toutes également ; n’attendant rien que de ses impulsions et
307 cidité parfois douloureuse ses propres actes dont il s’étonne mais qu’il se garde de juger5. Il y a véritablement une litt
308 ureuse ses propres actes dont il s’étonne mais qu’ il se garde de juger5. Il y a véritablement une littérature de l’acte gr
309 lité qu’on renoncera à la vertu, sous prétexte qu’ elle pousse à l’orgueil ; c’est par sincérité qu’on mentira, puisque parfo
310 n excès toute chose, au-delà de toutes limites. «  Il n’y a que les excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette f
311 toute chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que les excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur
312 jusqu’à ses dernières conséquences suppose qu’on ait perdu le sens des ensembles rationnels. Nous ne pensons plus par ense
313 des actes, rêves éveillés, tout cela ne dérive-t- il pas d’une fatigue immense. Nous voyons se fausser le rythme des jours
314 pe une civilisation mécanicienne. (Les machines n’ ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus i
315 s de notre psychologie. Images des surréalistes — ils l’indiquent eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique et symbo
316 re d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadisme, tro
317 gues est cet état presque inhumain de celui qui n’ a pas dormi et qui « assiste » à sa vie, à ses sensations, à ses automa
318 elle d’aujourd’hui, parce que nous sommes à bout. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier l’immense effort pour se li
319 ne génération de cobayes » remarque Paul Morand.) Il faut agir, ou bien être agi. Donner une conscience à l’époque, ou se
320 ner une conscience à l’époque, ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’oubli — (mais avant de s’y perdre, quelle
321 es, quels Niagaras 9 !) Quelques jeunes hommes l’ ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils sav
322 garas 9 !) Quelques jeunes hommes l’ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils savent que pour
323 sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas la cultu
324 nt pas de la Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas la culture ; sans autre parti pris
325 res de langage et maîtres de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’il
326 et maîtres de leurs corps exercés, ils savent qu’ il n’y a de pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a de lib
327 tres de leurs corps exercés, ils savent qu’il n’y a de pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a de liberté q
328 a de pensée valable qu’assujettie à son objet, qu’ il n’y a de liberté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur
329 nsée valable qu’assujettie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur effor
330 lles ; et leur effort est de retrouver ces lois ; ils ne craignent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de les améliore
331 nouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur a l’eau claire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’attente
332 leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ ils s’en vont « épiant toutes les émotions de l’âme, et lui multipliant s
333 ui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une foi nouvelle ; mais
334 dont sortira peut-être une foi nouvelle ; mais qu’ ils sachent, quand viendra le moment, détourner les yeux de leur recherch
335 de leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ ils osent se faire violence pour se hisser dans la lumière. « Il vaut mie
336 faire violence pour se hisser dans la lumière. «  Il vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les grands traits d
337 présence, non de nous-mêmes, mais de Dieu. » 1. Il ne s’agit pas d’exiger des poètes qu’ils écrivent des odes civiques.
338 u. » 1. Il ne s’agit pas d’exiger des poètes qu’ ils écrivent des odes civiques. Mais que nos moralistes — presque tous le
339 t de penser en fonction du temps présent, soit qu’ ils veuillent en améliorer les conditions, ou les transformer totalement.
340 s ? Peut-être. En tout cas je vois bien le mal qu’ ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’est une man
341 Peut-être. En tout cas je vois bien le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’est une manière
342 gir sur l’époque, c’est une manière d’agir contre elle . 2. « La crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’ét
343 ise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. «  Il s’était développé en nous un goût furieux de l’expérience humaine. »
344 ahiers du Mois, et peut-être Drieu la Rochelle, s’ il voulait…) o. Rougemont Denis de, « Adieu, beau désordre… (Notes sur
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)
345 a mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, intense et tragiqu
346 tant d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il l’a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un so
347 d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il l’ a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe,
348 aisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hésité entre plusieurs styles de roman. Un chapitre d’observation psy
349 tous les actes une signification plus profonde. ( Il serait aisé de montrer quel parti Jouve a su tirer des complexes de f
350 onde. (Il serait aisé de montrer quel parti Jouve a su tirer des complexes de famille freudiens, ou d’analyses de démence
351 s tout cela est sublimé dans un monde poétique où il paraît inconvenant d’introduire le jargon de la science moderne.) Si
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
352 6)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques autres plais
353 aux prises avec une petite cité patricienne dont il devra portraiturer les gentilshommes archéologiques et les vieilles d
354 te de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur l’ ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui eût
355 éologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui eût gagné à être mise en action plutôt qu’en commentaires. Le talent de M
20 1926, Articles divers (1924–1930). Conférences d’Aubonne (7 avril 1926)
356 s à Sainte-Croix, mais à Aubonne. Un plein succès a répondu à cette innovation. Le sujet de la première partie des confér
357 iences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer un travail prom
358 deux ouvriers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlère
359 x ouvriers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent
360 ouvriers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’
361 issionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse l’ avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans tou
362 de partis, avec une passion contenue d’hommes qui ont vu, qui ont souffert, et qui ne se payent plus de mots ni d’utopies,
363 vec une passion contenue d’hommes qui ont vu, qui ont souffert, et qui ne se payent plus de mots ni d’utopies, Clerville, J
364 e mots ni d’utopies, Clerville, Janson et Brémond ont su arracher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour les placer v
365 trois jours, cela peut paraître excessif à qui n’ a pas connu l’atmosphère particulière à ces rencontres. Rien de plus aé
366 éré, au moral comme au physique. Chacun dit ce qu’ il pense sans se préoccuper d’être bien pensant et les Romands recouvren
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
367 avec la muse, parce que c’est dimanche, parce qu’ il pleut et qu’on s’ennuie. Si la vie est bête à pleurer, sourire est mo
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
368 plètement résolu dès les premières pages, mais qu’ il faut louer Mme Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai-je que l’abu
369 emières pages, mais qu’il faut louer Mme Rivier d’ avoir posé courageusement. Dirai-je que l’abus des points d’exclamation — t
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
370 t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’ il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son
371 Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvr
372 étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de criti
373 e Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait- il préciser ce qu’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre l’éca
374 nnel, etc.) Sans doute faudrait-il préciser ce qu’ il entend par ordre, et montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne
375 re, et montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour aller vite qu
376 volonté de construire jusque dans le grabuge, qu’ il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau
377 ’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’ il se veuille poète. Il ne l’est jamais moins qu’en vers. Sa plus incont
378 e] malheur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce
379 sse de beaucoup les limites de cette école, et qu’ il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices po
380 de beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiq
381 ’audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles les plus étonnants sont ceux de
382 t bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’ il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obscur et de la
383 r la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une machine luisante et tou
384 e précision, d’élégance mécanique et de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait, et
385 s le même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Barrès, sur Wagner, sur que
386 je le crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal
387 e grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles sont sans parfum, ne se faneront pas. t. Rougemont Denis de, « [Co
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
388 sont encore à des symboles équivoques et, quoi qu’ ils en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’art,
389 ues et, quoi qu’ils en disent, « artistiqués », —  ils n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Cre
390 ue de sa génération. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, av
391 sa génération. Terrible aveu d’impuissance, il n’ a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec s
392 la triste profession est de détruire le désir qu’ elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je le redirai, t
393 le désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à m
394 dont la pauvreté le rejette dans une angoisse qu’ il nomme « élan mortel ». Cette inversion de tout ce qui est constructif
395 e désordre. Une intelligence parvenue au point où elle « ne semble avoir rien d’autre à faire que son propre procès », une
396 ntelligence parvenue au point où elle « ne semble avoir rien d’autre à faire que son propre procès », une intelligence qui s
397 ectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de plus effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force e
398 s cœurs sans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait -il le courage de prier… u. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Re
399 s sans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait- il le courage de prier… u. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René
25 1926, Articles divers (1924–1930). L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)
400 nt — mais oui, M. Journet — et je ne crois pas qu’ il puisse se produire ailleurs qu’en terre romande. C’est l’esprit de li
401 és de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâché » pas mal de préjugés en matières sociales. Mais ce qui
402 les. Mais ce qui est peut-être plus important, on eut l’impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, q
403 s objections que chacun se faisait à part soi, qu’ ils incarnaient les voix contradictoires d’un débat que tous menaient en
404 ine forêt, où Henriod debout sur un tronc coupé n’ eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir l’équilibre des discuss
405 , vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’ avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la b
406 i on l’avait attendu pour le manifester ! — et qu’ il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir to
407 re de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ ai pas dit dans ces quelques notes. 3. Il suffit encore : f 2.50, nom
408 que je n’ai pas dit dans ces quelques notes. 3. Il suffit encore : f 2.50, nom et adresse. f. Rougemont Denis de, « L’
26 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
409 u aux charmes troubles et inhumains de la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau. Or « la g
410 est aujourd’hui une catastrophe menaçante pour n’ avoir pas été animée de l’esprit de géométrie… Elle use et conduit lentemen
411 n’avoir pas été animée de l’esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des milliers d’êtres humains ». Elle
412 lentement l’usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux conditions nouvelles de travail ou de repos, n
413 image puissante qui actionne notre esprit » après avoir été créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de
414 vilisation sous cet aspect comme sous les autres, il nous faut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l’esprit et
415 n en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’ avoir trouvé la formule même de tant d’aspirations modernes. Voici sans auc
416 pre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ ont osé. Créer un espace architectural lumineux à la place de nos cités c
27 1926, Articles divers (1924–1930). Confession tendancieuse (mai 1926)
417 ficiellement : nous comprenons que nos œuvres, si elles furent faites à l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans la
418 — ici, je tape du pied —, ces désirs, ce corps… J’ ai un passé à moi, un milieu, des amis, ce tic. Mais encore, tant d’autr
419 irez qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaître. Reste le
420 le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’on
421 asard, jusqu’au jour où l’on me fit comprendre qu’ il n’est que le jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. I
422 e sauter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta qu’une fatigue profonde ; je devins si faible et démuni,
423 détenir un secret très simple, et un peu narquois ils me considéraient avec une pitié curieuse : je me sentis nu, tout le m
424 d de tous les plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui, cette incapacité à jouir de mes victoires, à ple
425 e force aveugle de violence s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna sur les stades où je connus quelle confiance sourde au
426 squement les éléments désaccordés de ce moi que j’ avais tant choyé. « Maintenant, m’écriai-je — c’était un des premiers jours
427 e voici devant quelques problèmes dont je sais qu’ il est absolument vain de prétendre les résoudre, mais que je dois feind
428 rétendre les résoudre, mais que je dois feindre d’ avoir résolus : c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la base.
429 i s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la base. J’ aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a que ce but de me
430 arde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’ a que ce but de me rendre mieux apte à vivre pleinement. En priant, je
431 nt. En priant, je m’arrête parfois, heureux : « J’ ai donc la foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne fau
432 i ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’ il ne faut pas attendre immobile dans sa prière, qu’une révélation vienn
433 re arriverai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’ il est une révélation, c’est en me rendant plus parfait que je lui prépa
434 lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout en moi. Je ne suis digne que par ce
435 peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les cultiver pour cela se
436 n’entends pas tous les cultiver pour cela seul qu’ ils sont naturels : la nature est un champ de luttes, de tendances vers l
437 s’oppose au perfectionnement de l’esprit, puisqu’ elle ne permet que des associations suivant les directions de moindre rési
438 is d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’un ensemble social et dans la m
439 oyer à sa sauvegarde ou à sa transformation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on. L’avouerai-je, quand je médite sur un
440 t s’élever. Puis enfin la marée de mes désirs. Qu’ ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l’emportent d’un flot fou ! R
441 ésirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ ils l’emportent d’un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’é
442 er, c’est se surpasser). J’entends des phrases qu’ il ne faut pas encore comprendre — tout est si fragile —, mais je sais q
443 écrire des idées qui m’aideront. Une fois écrites elles prennent un caractère de certitude qu’elles n’avaient pas encore en m
444 rites elles prennent un caractère de certitude qu’ elles n’avaient pas encore en moi. C’est en quoi ma sincérité est tendancie
445 les prennent un caractère de certitude qu’elles n’ avaient pas encore en moi. C’est en quoi ma sincérité est tendancieuse. 5. Q
446 ème, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre les excommunications
28 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
447 qu’en publiant ce recueil d’essais, M. Fernandez a donné la première œuvre importante du mouvement de construction et de
448 s d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’ il voudrait inaugurer « ne se contenterait pas d’étudier les œuvres pour
449 ais tâcherait d’épouser le dynamisme spirituel qu’ elle révèle, puis de les situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a to
450 les situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voic
451 nivers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’ il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voici enfin un critique q
452 eprises par les générations précédentes. Parce qu’ elles se sont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne les condamne pa
453 s se sont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne les condamne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé
454 é catholique ; mais tenant compte de leur effort, il puise dans l’échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse
455 ses essais sur Proust, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la
456 morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais l’œuvre de Gide,
457 ne autre me paraît liée à cette confusion. Mais s’ il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différent
458 tiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute communication dir
459 un moyen de connaissance personnelle. Après quoi il écrit : « II y a, en fait, deux manières de se connaître, à savoir se
460 issance personnelle. Après quoi il écrit : « II y a , en fait, deux manières de se connaître, à savoir se concevoir et s’e
461 oir et s’essayer. » Fort bien, mais l’œuvre n’est- elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis amorcer ici une
462 me paraît encore ambiguë : on peut se demander s’ il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne
463 raiment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’ il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleu
464 ’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’ il y décèle. Le meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa t
465 ité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’ il définit sa propre théorie de la « garantie des sentiments », où l’on
466  » — que la psychologie freudienne et proustienne a porté à un point si dangereux, il nous propose l’expérience d’un Newm
467 e et proustienne a porté à un point si dangereux, il nous propose l’expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et
468 les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la v
469 théorie assez proche du cubisme littéraire, et qu’ il serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter les confusions qui s
470 le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’ a pas ménagé les critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme
471 es à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfois agaçant de pressentir sous l’expression trop technique ou
472 philosophes, et trop philosophe aux littérateurs. Il manque à M. Fernandez un certain recul par rapport à ses idées, on le
473 n peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche que son livre manifeste une belle unité de pensée, et qu’il
474 livre manifeste une belle unité de pensée, et qu’ il propose quelques directions très nettes de synthèse. Avec une œuvre c
29 1926, Articles divers (1924–1930). Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)
475 e sens envahi par un rythme impérieux au point qu’ il faut que certaines voix en moi taisent leur protestation, étouffées p
476 aussi. Le sujet était périlleux : si particulier, il prêtait à des abus de pittoresque, de couleur locale, de détails tech
477 tions nécessaires, défauts auxquels Montherlant n’ a pas toujours échappé, mais qu’il domine dans l’ensemble et entraîne d
478 els Montherlant n’a pas toujours échappé, mais qu’ il domine dans l’ensemble et entraîne dans l’allure puissante à la fois
479 uissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent parlé d’excès de lyrisme à propos des premiers ouvrages de Mo
480 a vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’ il est poète qu’il peut atteindre à pareille intensité de réalisme. Une
481 t n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’ il peut atteindre à pareille intensité de réalisme. Une perpétuelle palp
482 vie anime ce livre et lui donne un rythme tel qu’ il s’accorde d’emblée avec ce qu’il y a de plus bondissant en nous ; en
483 récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’ elle . Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut la dominer… : on ne
484 e sent la bête en même temps qu’elle. Et parce qu’ il sait ce qu’elle va faire, il peut la dominer… : on ne vainc vraiment
485 en même temps qu’elle. Et parce qu’il sait ce qu’ elle va faire, il peut la dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aim
486 qu’elle. Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut la dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les vic
487 le horreur sacrée. Voici Alban devant une bête qu’ il devra combattre le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’a
488 re le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’apostrophait ainsi tout bas, sur un ton révérenciel, et comme on dé
489 ière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un reflet bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de l’inconnu. N
490 complissant sa destinée. Quelques secondes encore elle cligna des yeux et on vit sa respiration. Puis ses pattes se tendiren
491 t d’un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime
492 e l’homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et
493 ent naturel ce cri de sagesse orgueilleuse : « Qu’ avons -nous besoin d’un autre amour que celui que nous donnons ? » ⁂ Il est
494 d’un autre amour que celui que nous donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’E
495 défauts qui tueraient tout autre que lui. Certes, il ne soulève directement aucun des grands problèmes de l’heure. La viol
496 d avec la vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit- il d’Alban — (de lui-même) — il n’« accroche » pas à ce qui est triste o
497 en, ni logicien, dit-il d’Alban — (de lui-même) — il n’« accroche » pas à ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idé
498 mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas di
499 la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échapp
500 ntales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’il est po
501 agique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chan
502 il le chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’ il est poète : le chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’une tell
503 Mais c’est parce qu’il est poète : le chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’une telle attitude agace des gens qui
504 hent en gémissant ». Mais cette personnalité dont il manifeste avec une magnifique insolence les forces créatrices, ne vau
505 gnifique insolence les forces créatrices, ne vaut- elle pas d’être élevée en témoignage pour notre exaltation ? Comme la vue
506 à force d’y vouloir trouver un sens, ne vaudrait- il pas autant s’abandonner parfois à ces forces obscures qui nous replac
507 ontractée, par la grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages viennent à l’appui de la th
508 la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ ai pas la place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraient
30 1926, Journal de Genève, articles (1926–1982). Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)
509 Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926) a Il y a dans le monde intellectuel une « Question d’Orient » dont o
510 des ruines prochaines de nos cités mécaniciennes, ils rallument le mirage d’un Orient paradisiaque d’où nous viendraient un
511 us la sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions sur quoi se fondent ces poétiques es
512 de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’ il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destin
513 rs des plus tenaces de ces confusions. M. de Traz a visité l’Égypte, ses habitants, ses tombeaux et son passé, en curieux
514 lucide, avec une sorte d’acharnement, comme seul il sait l’être aujourd’hui sans que cela nuise en rien à un don de sympa
515 , ni le journal plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs en Orient, mais une suite de coups d’œil aigus
516 aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous l’ avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à certaines pages
517 ’est ce qui donne à ses notations tout leur prix. Elles ne nous renseignent pas sur une partie orientale de lui-même, comme c
518 uvent le cas, mais bien sur l’Orient. Encore faut- il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des
519 me mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individus, et comme type
520 de Traz ne pouvait trouver mieux que lui-même. S’ il dit des Égyptiens : « Le mensonge, autant qu’une politesse, leur para
521 qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’ il qualifie de « religion du fil de l’eau », ou de « prodigieux stupéfia
522 attrait du christianisme est dans l’inquiétude qu’ il nous inflige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse, dit-il des rêveu
523 sme est dans l’inquiétude qu’il nous inflige ». «  Ils mettent leur âme en veilleuse, dit-il des rêveurs orientaux. De leur
524 flige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse, dit- il des rêveurs orientaux. De leur immense paresse, jusqu’à leur mysticis
525 à leur mysticisme, partout c’est une démission qu’ ils désirent. Du difficile oubli de soi-même nous avons fait une vertu. E
526 ils désirent. Du difficile oubli de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils l’ont rendu facile et en ont fait un plaisir
527 oubli de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils l’ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je
528 de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils l’ ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je trouv
529 fait une vertu. Eux, ils l’ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je trouve si juste : « Ce qui d
530 t menaçant ? Malgré l’« anxiété mélancolique » qu’ il éprouve à se sentir si loin de l’Oriental, les conclusions de M. de T
531 une matière si complexe — sont plutôt optimistes. Il ne paraît pas croire à un péril oriental très pressant, ni surtout qu
532 péril oriental très pressant, ni surtout que nous ayons à chercher là-bas notre salut. « La seule leçon à attendre des musulm
533 a nôtre. » La place me manque pour parler comme j’ aurais voulu le faire des deux autres parties du volume, d’une importance mo
534 ar un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est- il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’u
535 aine amertume, où de Traz quitte le ton mesuré qu’ il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois un peu gêné cette
536 ré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’ a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait sentir parto
537 parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’ il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion du « Prince
538 s, mais sans jamais s’y perdre ou se confondre en elles , révèle sa personnalité peut-être mieux que ne le feraient une suite
539 uite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il apparaît, ici, comme le type du voyageur intelligent, qui n’accepte d
540 morceaux attestent la délicatesse, mais parce qu’ il sait y trouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysem
541 . Le Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a . Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Robert de Traz, Le Dépaysement
31 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
542 prairies espagnoles pleines de simple grandeur, j’ ai supporté mille fastidieux détails techniques et des délires taurologi
543 ires taurologiques avec lesquels, pour communier, il faudrait sans doute être né sous le signe du Taureau. Mais il sera pa
544 sans doute être né sous le signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beaucoup de défauts bien agaçants pour sa
545 ts bien agaçants pour sa souveraine désinvolture. Elle est tonique comme le spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout
546 tonique comme le spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’admire dans ces Bestiaires, presque malgré leur suje
547 ité aux taureaux braves et simplets d’esprit ! Qu’ ils paissent éternellement dans les prairies célestes, pour avoir donné u
548 nt éternellement dans les prairies célestes, pour avoir donné une grande gloire aux jeunes hommes ! » Mais ce jeune homme qui
549 la nonchalance des vrais puissants, je compte qu’ il saura fonder sa gloire future sur des valeurs plus humaines. x. Ro
32 1926, Articles divers (1924–1930). Soir de Florence (13 novembre 1926)
550 sente au couchant, dans ce corridor de lumière où elle accueille le ciel — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’es
551 lumière où elle accueille le ciel — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est, des collines fluides et roses. De l
552 revenaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’y en eut presque plus. Nous étions seuls sur le pavé qui exhalait s
553 t au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’y en eut presque plus. Nous étions seuls sur le pavé qui exhalait sa chaleur,
554 t arrêtée tout près de l’eau. Mais ce n’est pas d’ elle que vient cette chanson jamais entendue qui nous accompagne depuis un
555 é dans une beauté que saluent tant de souvenirs n’ a d’autre nom que celui de l’instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ain
556 silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’ a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes m
557 la vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air et musiques sour
558 ne barre droite au travers d’un tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va l’âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que
559 de sommeil. Une lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fle
560 nes. Il y avait la vie des hommes pour demain, et il était beau d’y songer un peu avant de nous abandonner à l’oubli luxue
561 tous les bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par personne et les devantures ne ch
33 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)
562 c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’ il trouve une sorte d’unité vivante dans le rythme des désirs jamais sim
563 aire sourire, on le sent ; pourtant l’on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un talent, charmant, glacé, spirituelle
34 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
564 Colling, L’Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop
565 able… Mais ce cœur fatigué se reprend à souffrir, il ne sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette d
35 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
566 Chinois et sympathiser avec son idéal de culture. Il n’y a pas là deux points de vue irréductibles, du moins M. Malraux a
567 et sympathiser avec son idéal de culture. Il n’y a pas là deux points de vue irréductibles, du moins M. Malraux a fait p
568 points de vue irréductibles, du moins M. Malraux a fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne le paraissent point.
569 lraux a fait parler son Chinois de telle façon qu’ ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui sembla
570 ord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’est- il pas de position plus périlleuse, puisqu’elle risque de ne laisser sub
571 n’est-il pas de position plus périlleuse, puisqu’ elle risque de ne laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de la des
36 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
572 Avant-propos (décembre 1926) a b Une mauvaise humeur qui flotte dans l’air nous proposerait de dé
573 lus que jamais, et plus que jamais, nous semble-t- il , notre revue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, no
574 et plus que jamais, nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nou
575 u à refuser de nous affirmer avec une netteté qui a pu paraître parfois quelque peu impertinente. Le fait est que nous ép
576 ais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ ils offrent et de les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’
577 ’ils offrent et de les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! », et de se dé
578 oi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de
579 t, peut-être, la considération du « déluge » peut- elle faire réfléchir utilement sur ses causes…   Nous ne proposerons pas,
580 pressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est
581 ns de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons -nous dit, c’est à la fois notre but et notre excuse en publiant cette
582 c’est que vous le saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que notre revue reste cette chose unique
583 n peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que notre revue reste cette chose unique et indéfinissable, comm
584 e par la grâce d’une volonté sans doute divine… a . Rougemont Denis de, « Avant-propos », Revue de Belles-Lettres, Laus
37 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
585 mythe prendre corps parmi les ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchie dont on ne veut pas a
586 ertu d’une anarchie dont on ne veut pas avouer qu’ elle est plus nécessaire — provisoirement — que satisfaisante pour l’espri
587 probité intellectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dé
588 s fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est- elle consentement immédiat à toute impulsion spontanée (Gide), ou « perpét
589 ou « perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ elle est » (Rivière), ou encore refus de choisir, volonté de tout conserve
590 ’est pas encore mêlé de l’affaire. Au reste, on n’ a pas attendu les éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien co
591 n personnage de tableau se mettre à décrire ce qu’ il voit autour de lui — et l’étonnement indigné du spectateur. Pour parl
592 arler avec un peu de clairvoyance de ce dont nous avons vécu jusqu’à tel jour de notre jeunesse, il faudrait pouvoir sauter h
593 us avons vécu jusqu’à tel jour de notre jeunesse, il faudrait pouvoir sauter hors de soi. Seule, une méthode d’observation
594 ant Fleurissoire « pour rien » ne songeait pas qu’ il allait faire école. Le fait est que ce geste symbolique a déclenché t
595 faire école. Le fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littéraire, celui-là même qui aboutit nag
596 enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent- ils chaque fois qu’ils ne comprennent pas. Il faudrait s’entendre. Et, ic
597 ire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ ils ne comprennent pas. Il faudrait s’entendre. Et, ici encore, prenons g
598 larent-ils chaque fois qu’ils ne comprennent pas. Il faudrait s’entendre. Et, ici encore, prenons garde de confondre le pl
599 action peut paraître gratuite au lecteur parce qu’ il ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a p
600 as tout sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamai
601 sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que
602 lativement à un système restreint de références. Il résulte de semblables considérations, dans le domaine de la morale, q
603 r à l’acte gratuit une valeur morale en disant qu’ il révèle ce qu’il y a de plus secret dans la personnalité. Ce serait un
604 peu gratuite que possible, d’un Julien Sorel, est- elle moins révélatrice du fond de l’âme humaine ? Que si l’on s’étonne de
605 vive, un élan vers certain but précis. Ou bien j’ aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l
606 faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’ a retenu d’accomplir ce que l’élan appelait.   Second exemple. — J’épr
607 us ou moins fortement des sentiments que je crois avoir éprouvés à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —, je parviens
608 les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou
609 c’est bien le second. La qualité des souvenirs qu’ il me livre me renseigne assez exactement, non sur mon passé, mais sur l
610 on sur mon passé, mais sur le moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la vérité sur soi » en se
611 , d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livre
612 le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recu
613 mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ ai cru que je pourrais me regarder sans rien toucher en moi. En réalité,
614 tion de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps
615 de ces ravages du sincérisme. Dans la solitude qu’ il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher quelque raison de
616 Dans la solitude qu’il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher quelque raison de vivre, il voulait se voir le
617 il était venu y chercher quelque raison de vivre, il voulait se voir le plus purement (« cette curiosité donnée comme rais
618 t ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’ il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristesse qui rôde dans
619 i rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui. J’ ai dit : ravages du sincérisme. C’est plus exactement faillite qu’il fau
620 du sincérisme. C’est plus exactement faillite qu’ il faudrait. Faillite de toute introspection, en littérature et en moral
621 moral : je me compose plus laid que nature. Faut- il conclure avec Gide : « L’analyse psychologique a perdu pour moi tout
622 il conclure avec Gide : « L’analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’homme é
623 our où je me suis avisé que l’homme éprouve ce qu’ il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l’analyse nous crée, el
624 r. » Non. Car à supposer que l’analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon certaines lois où se r
625 ertaines lois où se retrouve notre individualité. Elle nous crée tels que nous tendons à être (plutôt inférieurs, en vertu d
626 « un perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi le gage d’un enrichissement,
627 el effort pour créer son âme telle qu’elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi le gage d’un enrichissement, d’une con
628 e cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’ il faut penser2. Il ne s’en suit pas que contenue dans des limites assez
629 n Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il ne s’en suit pas que contenue dans des limites assez étroites empiriq
630 une différence. Pourquoi les romanciers modernes ont -ils tant de mal à créer des personnages ? C’est parce qu’une sorte de
631 différence. Pourquoi les romanciers modernes ont- ils tant de mal à créer des personnages ? C’est parce qu’une sorte de sin
632 e montre clairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes qui pourraient entraîner des effets imprévisibles, «
633 nt, et, bientôt, incapacité d’agir efficacement. ( Il faut, pour sauter, une confiance dans l’élan qui échappe à toute anal
634 sonnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’ a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, mo
635 F. Raub. La sincérité obstinée d’un Rivière n’ a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop s
636 t sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devient dès lors impossible de faire rien qui ne soit sincère. Peut-o
637 propres mensonges ? Peut-être juste assez pour qu’ ils vous aident3 — mais jamais au point d’oublier la vérité qu’on désirai
638 is au point d’oublier la vérité qu’on désirait qu’ ils cachent pour un moment. « L’art est un mensonge, mais un bon artiste
639 s menteur », dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes les pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet
640 ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de l’indétermination violente qu’est la sincérité
641 es paraphraser serait d’une ingratitude insigne — ils marquent au reste fort bien les jalons de cette recherche) : Puissie
642 nt à toute intervention qui altérerait leur moi ; ils ne souhaitent que d’être leur propre témoin, intelligent mais immobil
643 nt en tant que personnes. Comment se trouveraient- ils , n’existant pas ? (François Mauriac.) La valeur morale de M. Godeau s
644 de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’ il souffrirait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi la valeur m
645 ard. Ainsi la valeur morale d’un homme équivalait- elle à l’illusion qu’il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel J
646 morale d’un homme équivalait-elle à l’illusion qu’ il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhandeau.) Ce qu’o
647 is si le personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jou
648 stre à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’intensité d’un sentiment intime,
649 ................................ Le vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein de ma triste luc
650 ry. Certes, du sein de ma triste lucidité, je t’ avais déjà invoquée, hypocrisie consolante et libératrice. Mais tu m’offrai
651 e fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ ai mieux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une symphonie de joies émanait
652 n particulière, ne pouvait non plus s’imaginer qu’ elle en pût être privée. Alors, acquiesçant vivement à l’invite que je sou
653 lus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’ elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que momentanément je
654 de laisser — et des baisers à tous les vents — qu’ il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilation, non pas ce
655 laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilation, non pas ce but
656 isie envers soi-même une volonté — si profonde qu’ elle n’a pas besoin de s’expliciter pour être efficace — qui m’interdit de
657 vers soi-même une volonté — si profonde qu’elle n’ a pas besoin de s’expliciter pour être efficace — qui m’interdit de nom
658 de nommer ce dont je ne veux plus souffrir. (Car il n’est peut-être qu’une espèce de souffrance véritablement insupportab
659 premier exemple, ce serait le récit des gestes qu’ il m’aurait fait commettre. Manifester est plus sincère qu’analyser. 2.
660 er exemple, ce serait le récit des gestes qu’il m’ aurait fait commettre. Manifester est plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleu
661 ans notre langage statique. 3. « Et certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’affirmation prouve moins une certit
38 1927, Articles divers (1924–1930). Dés ou la clef des champs (1927)
662 i donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fon
663 e grande figure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta
664 d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’ eus fini de boire, mes pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers l’a
665 jaquettes de couleur pour ma femme… Mais l’homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il en retira
666 on journal. Soudain, portant la main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il c
667 nt la main à son gilet, il en retira trois dés qu’ il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision paru
668 dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis il reprit les dés b
669 compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis il reprit les dés brusquement, et me fixant avec un léger sourire : — Jo
670 ixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t- il . La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans
671 idité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une légère exaltation : — Vous avez gagn
672 nouveau, puis avec une légère exaltation : — Vous avez gagné, c’est admirable, ah ! mon Dieu, je vous remercie, Monsieur… Il
673 rable, ah ! mon Dieu, je vous remercie, Monsieur… Il saisit son journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d
674 e vous remercie, Monsieur… Il saisit son journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’une agitation visible.
675 pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment. Nous fixâmes comme enjeu nos consommatio
676 fixâmes comme enjeu nos consommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma
677 passionnées. Mais bientôt : — « Destin, s’écria-t- il , tu pourrais me remercier. Vois quels chemins de perdition j’ouvre sa
678 ion j’ouvre sans cesse à ta course aveugle ; tu n’ aurais pas trouvé ça tout seul, avec tes airs pessimistes. De nouveau, d’un
679 pour durer, et tu te réjouissais, parce que tu n’ as pas beaucoup d’imagination, et que tu es un pauvre vaudevilliste qui
680 allais me cramponner à cette espèce de bonheur qu’ ils croient lié à la possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme
681 cours de bourse. « Heureux quoique pauvre » comme ils disent dans leurs manuels scolaires. Les voler, pour leur apprendre.
682 asse d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient que leur vie garantît un 5 % régulier de plaisirs, avec as
683 rs d’amour — ô vertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé les caisses d’épargne, monuments d’une bassesse morale in
684 ’amour — ô vertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé les caisses d’épargne, monuments d’une bassesse morale inconc
685 issance à concevoir un autre bonheur que celui qu’ ils ont reçu de papa-maman et l’Habitude, leur marraine aux dents jaunes.
686 nce à concevoir un autre bonheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et l’Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah 
687 is m’endormir, ah ! galope, caracole, éclabousse, ils n’y comprendront jamais rien, écoutez-les, comme ils me jugent et leu
688 n’y comprendront jamais rien, écoutez-les, comme ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça les dé
689 isère qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que des baisers au goût d’adieu, et l’avenir où se mêlent
690 qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ ont plus que des baisers au goût d’adieu, et l’avenir où se mêlent incert
691 incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de
692 ise à notre table, en robe rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors
693 ’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et
694 arrement et j’étais possédé de joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des c
695 e saurai jamais rien… (sinon qu’au lendemain je n’ avais plus un sou). Je n’ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je songe à
696 non qu’au lendemain je n’avais plus un sou). Je n’ ai jamais revu l’étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-
697 ais cela ne suffit plus à m’en délivrer. Ma vie m’ a repris, je ne suis pas heureux. Je sais très bien que je devrais tent
698 ue chose. Je suis plein de rêves, certains soirs. Il faut pourtant rentrer chez moi, et ma femme m’embrasse et me regarde
699 rce que je ne suis plus tout à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant
39 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
700 magnifiques et hagardes pourraient enthousiasmer il leur réserve mieux encore : après une kyrielle d’injures qui ne font
701 nation d’autres fois si prestigieuse du poète : «  Ils m’ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort c
702 d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux qu
703 te : « Ils m’ont suivi, les imbéciles », ricane-t- il  ; et sans rire : « À mort ceux qui paraphrasent ce que je dis ». Il y
704 plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie iné
705 s à la grande race des torrents ». Génie inégal s’ il en fut, voici parmi trop de talents intéressants, un écrivain qui s’i
706 des qualités et des défauts pareillement énormes. Il faut remonter loin dans notre littérature pour trouver semblable domi
707 e domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec des bizarrerie
708 vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l’hallucination du décor des capitales, créatrice d’un merveilleux de
709 n des plus significatifs du romantisme nouveau. J’ ai nommé Rousseau, Nerval Musset : mais voyez un Rousseau sans tendresse
40 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)
710 rbain, premier du nom dans sa famille, laquelle n’ avait compté jusqu’alors que d’authentiques avocats et un chapelier dont to
711 et un chapelier dont tous s’accordaient à dire qu’ il ne péchait que par excès de bonne humeur printanière, Urbain donc, pr
712 garçon d’une race entre toutes bénie — par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait. L’étoi
713 cintillement pudiquement dissimulé. Vers 1 heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d’Urbain, et
714 . « Éternité désaffectée, c’est bien dommage, dit- il en s’étirant ; le printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et no
715 ant considérables, au sens étymologique du terme. Il loucha vers le néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’il jeta,
716 s le néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’ il jeta, puis, après un grand coup de pied dans le vide symbolique des s
717 symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-dire qu’ il fit un pas dans une direction quelconque. L’étoile pleurait, sentimen
41 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Dans le Style (janvier 1927)
718 vier 1927, l’information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de
42 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
719 de feindre encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de la Maladère pour se dépre
720 e meurtrir l’un l’autre. Pourtant, jusqu’au bout, il semble qu’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié de la saison s
721 issiper le charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’eux-mêmes pour que ce mo
722 de qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ ils se soient délivrés d’eux-mêmes pour que ce mot, ce geste, soient poss
723  : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d’une incurable adolescence, d’un défaitisme sentimental qui
724 n’est qu’à force de discrétion dans les moyens qu’ il parvient à une certaine puissance de l’effet, aux dernières pages. Il
725 rtaine puissance de l’effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harmonie entre le climat des senti
726 des sentiments et celui des campagnes désolées où ils se développent. Paysages tristes et sans violence, autour de ces être
727 res dont la détresse est d’autant plus cruelle qu’ elle est contenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé le livre de B
43 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
728 ur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfaction qu’ elle leur laisse. Montclar est l’auteur de vers de jeunesse auxquels il ne
729 ontclar est l’auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on comprend que ce journal bientôt les rejoindra
730 aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’ il manifeste en toute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous le re
731 de ? heureux ? » pour lui, comme pour Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueu
732 lus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour qu’ il ira demander la souffrance indispensable au perfectionnement de son â
733 notre plaisir, un peu plus viennois que naturel s’ il parle de choses d’art comme on fait dans Proust, si les passions qu’i
734 art comme on fait dans Proust, si les passions qu’ il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidiennes. Il se con
735 sont ici tant soit peu russes, et là, gidiennes. Il se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de
736 stingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se connaît avec une sorte de froideur que l’on dirait désintéressée s
737 orte de froideur que l’on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de souligner, plus que ses succès, certaines faibl
738 froideur que l’on dirait désintéressée si elle n’ avait pour effet de souligner, plus que ses succès, certaines faiblesses qu
739 ner, plus que ses succès, certaines faiblesses qu’ il recherche secrètement, parce que de ces « ratages » naît le perpétuel
740 la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’ il consent, non sans une imperceptible satisfaction, l’aveu d’une fondam
741 où souvent l’on finit. Et peut-être l’amour n’est- il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n’a pas exténué
742 le qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n’ a pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle, et peut-être tendre,
743 près seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules
744 ée. Seules la souffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me semble, d’insister sur c
745 e secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il est juste, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de
746 flation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’ elle ne laisse point oublier que ce livre d’une résonance si humaine, est
747 vue de Genève, Genève, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans doute un morceau de phrase dans l’édition originale.
44 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
748 iste, mais vrai. » (Les journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un peu prétentieux de vous écrir
749 tant plus que vous n’y croirez pas — et pourtant… Il faut aussi que je vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre : l
750 — et pourtant… Il faut aussi que je vous dise qu’ il fait très froid dans ma chambre : le feu n’a pas pris, et d’ailleurs
751 qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’ a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuillez ne pa
752 phrase quelque allusion de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, comme on di
753 es. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus do
754 t que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ai déc
755 s mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ai découvert que vous existiez
756 je vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ ai découvert que vous existiez en moi, à certain désagrément que j’eus d
757 vous existiez en moi, à certain désagrément que j’ eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de l
758 eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais de
759 rage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’ avais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en
760 de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plu
761 amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une foi
762 nt les miens plus d’une fois pendant une danse qu’ il fit avec vous, mais vous les détourniez soudain comme pour vous arrac
763 airs sombres vous effrayaient sans doute plus qu’ ils ne vous attiraient. Mais, maintenant, je pense que ces regards croisé
764 s, maintenant, je pense que ces regards croisés n’ avaient aucune signification et que mon anxiété seule leur prêtait quelque in
765 de vous. Mon ami me fit un signe discret, et déjà il se préparait à vous rendre attentive à ma présence… Mais, alors, je n
766 Même, je fus obligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon dé
767 ue, pesant comme l’envie d’un sommeil sans fin… J’ avais soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube par
768 ophones. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait la nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma ta
769 , comme une femme nue dans une chambre étroite… J’ ai dormi quelques heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par la crai
770 s aimer. En sortant du bal, au vestiaire, je vous avais entendue donner un rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans la
771 ndue donner un rendez-vous au thé du Printemps. J’ ai rôdé dans la joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser
772 ant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, je pourrai lui dire très vi
773 isais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’ elle , je pourrai lui dire très vite quelques mots si bouleversants qu’avan
774 e la croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trouver peut-être assise en
775 a croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trouver peut-être assise en face de
776 autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ ai cru vous reconnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’avai
777 aître dans la foule qui se précipitait, mais je n’ avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais par vous v
778 femme révélait soudain un trait de votre visage. Il aurait fallu courir après celle-là qui venait de tourner à l’angle de
779 mme révélait soudain un trait de votre visage. Il aurait fallu courir après celle-là qui venait de tourner à l’angle de cette
780 i venait de tourner à l’angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps, vous pouviez paraître enfin o
781 l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune femme qui s’ét
782 rieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune femme qui s’était penché
783 aurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je descendis derrière elle.
784 frôlant, sans me regarder. Je descendis derrière elle . Mais tout de suite des parapluies la dérobèrent à mes yeux. Une bouc
785 avides, implorants. Oh ! toutes les femmes que j’ ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À minuit, telleme
786 l. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’ ai marché plusieurs heures avant de retrouver ma rue. Il doit être maint
787 arché plusieurs heures avant de retrouver ma rue. Il doit être maintenant 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans
788 atin. Premiers appels d’autos dans la ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigineusement, par
789 orrespond à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette décepti
790 is encore évoquer votre visage. Peut-être ne vous ai -je pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de ma destruction, c
791 ance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus qu’un glissement gris, sans fin… Il faudrait que je dorme 
792 e que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus qu’un glissement gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : il n
793 u, il n’y a plus qu’un glissement gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : il n’y aurait plus rien. 4. Encore un qui v
794 sement gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : il n’y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne vous dirai
795 gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : il n’y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne vous dirai pas son nom
45 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
796 une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’ il n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c
797 te d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d
798 ir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus ou moins consciemment concerté la possibilité. Orphée, par exemp
799 phée, par exemple, serait un poète surréaliste. «  Il faut jeter une bombe, dit-il, il faut obtenir un scandale. Il faut un
800 poète surréaliste. « Il faut jeter une bombe, dit- il , il faut obtenir un scandale. Il faut un de ces orages qui rafraîchis
801 e surréaliste. « Il faut jeter une bombe, dit-il, il faut obtenir un scandale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent
802 r une bombe, dit-il, il faut obtenir un scandale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traque
803 faut un de ces orages qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire a
804 t cette phrase, c’est un cheval savant qui la lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est pas u
805 Enfers. » — « Ce n’est pas une phrase, s’écrie-t- il , c’est un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de la mort. » Or
806 mme dictées de l’inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quelques préoccupations assez simples
807 a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a-t -on dit5. Certes, cette pièce n’est pas dépourvue de certaines des qua
808 agnebin (non pas Elie) pensait à quelqu’un lorsqu’ il écrivit certains vers qu’on peut lire plus haut : Les anges véritabl
809 t de se lancer sur la corde raide. Je suis sûr qu’ il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques
810 Je ne saurais même indiquer aucun endroit par où elle pèche contre les principes chers à l’auteur du Secret professionnel e
811 é dramatique qui cerne le mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exactement ce qu’il voulait. Et pou
812 le mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exactement ce qu’il voulait. Et pourtant cette admirable m
813 emble que Cocteau ait réalisé là exactement ce qu’ il voulait. Et pourtant cette admirable machine ne m’inquiète guère : je
814 dmirable machine ne m’inquiète guère : je sais qu’ elle le conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dép
815 m’inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépassent, feignons d
816 phée, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau,
817 le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’ a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’es
818 teur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’ il faut reprocher à Cocteau, c’est d’avoir réussi complètement une pièce
819 somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’est d’ avoir réussi complètement une pièce, prouvant une fois de plus que l’atmosp
820 atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon peut-être cette indispensable « part d
821 ès la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de roses dans du cristal taillé, selon toutes le
822 s règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.   (Tout de même, Cocteau est un poète :
823 M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l’amour conjugal ». Vraiment, nous
46 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’autre œil (février 1927)
824 fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut faire quelque chose. Nous devons, nous pouvo
825 « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut faire quelque chose. Nous devons, nous pouvons faire quelque cho
826 onsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’ il s’agit de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper
827 nt en hurlant : « Bas-toi là, bas-toi là ! »… Est- il plus atroce spectacle que celui d’une maîtresse jadis belle et disert
828 calembours… Pénétrés d’horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent une créature évadée d
829 ellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent une créature évadée d’anciens rêves qui hantait les lim
830 s rêves qui hantait les limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinématoma. Naissance de Cinématoma
831 commis au soin d’engendrer cet adorable monstre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu et le contemplent un certain te
832 io né entre deux cafés-nature, et presque sans qu’ il s’en soit rendu compte. Clerc entrevoit un projet à deux faces. Lugin
833 es. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’ a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagn
834  la Montagne » ne saura venir au prophète, même s’ il se nomme Mossoul. Pourtant, au milieu de ce paludesque et stérile con
835 , une idée de génie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « L
836 tte martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revint juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point
837 rassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M. Grosclaude son fils
838 et cent doigts dans deux lits. Combien cela fait- il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s
839 les neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase, la vie. 6. R
47 1927, Articles divers (1924–1930). Conférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)
840 ntroversés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’U
841 de l’Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux divers points de vue auxquels on a pu se placer pou
842 ait allusion aux divers points de vue auxquels on a pu se placer pour juger la révocation. M. Esmonin, lui, se place au p
843 t un des actes les plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de l’édit, vict
844 vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de
845 e facilement convaincre. D’ailleurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’édit par mille arguties juridiques. Et le
846 ans une lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutio
847 Évangile ». Et les persécutions contre ceux qui n’ ont commis d’autre crime que de « déplaire au roi » vont reprendre de plu
848 s. M. Esmonin s’abstient d’en faire un tableau qu’ il suppose présent à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le
849 u’il suppose présent à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16
850 us réjouir de retrouver bientôt dans l’ouvrage qu’ il va consacrer à Louis XIV l’exposé si dénué de parti pris, si libre et
48 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
851 Edmond Jaloux, Ô toi que j’ eusse aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre l’exemple rare d’un ho
852 emple rare d’un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans sa maturité, des jeunes générations, en sorte que l’e
853 rte que l’espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement dont lui-même s’est plu à relever
854 les indices chez ses jeunes contemporains, et qu’ il vient appuyer de son autorité de critique et surtout de son expérienc
855 se plaisent nos jeunes poètes cosmopolites, mais il garde une certaine discrétion, cet air de rêverie d’un homme qui en s
856 rêverie d’un homme qui en sait long… Et, certes, il faut être un peu mage pour porter tant de richesses avec cette mélanc
857 l’un de ses personnages pour remercier ; (pouvait- il mieux trouver qu’un René Dubardeau pour cette ambassade). Parfois l’o
858 e Jaloux. Et peut-être que la comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le trouver un peu froid, n’a
859 tesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces
860 Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces co
861 Morand, mais elle a dû le trouver un peu froid, n’ aura pas été tentée de lui faire ces confidences qu’elle livre si facileme
862 ra pas été tentée de lui faire ces confidences qu’ elle livre si facilement au héros plus confiant et secrètement incertain d
863 femme qui incarne aussitôt à ses yeux tout ce qu’ il attend de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jam
864 attend de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime u
865 onfidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une petite maison de provi
866 me on aime une petite maison de province quand on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’image d’Irène Rezzovitch
867 gagne la puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, e
868 l lui écrit de longues lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé,
869 tres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’ elle l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une
870 ans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’ aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vision pr
871 le l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé
872 ans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé là un sujet qui convient admirablement à son art, où s’unissen
873 aison ignore ou tyrannise aveuglément, car « nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous tromper sur tout ce qui est p
874 s tromper sur tout ce qui est profond en nous, et elle ne manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril d’un ré
875 mer et celui du roman lyrique, par l’équilibre qu’ il maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’être secret du
876 nconscients : l’époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire éclater dans un cadre très
877 nt dessinés un de ces drames tout intérieurs dont il dit : « Personne ne peut juger du drame qui se joue entre deux êtres,
878 as la fin ni le sens véritable, mais seulement qu’ elles ont fait souffrir. Rendez-vous manqués, lettres perdues, aveux incomp
879 fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir. Rendez-vous manqués, lettres perdues, aveux incompris,
880 touche pour peindre un personnage épisodique : «  Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle
881 s de, « [Compte rendu] Edmond Jaloux, Ô toi que j’ eusse aimée…  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars
49 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
882 cle (mars 1927)n Surprendre est peu de chose, il faut transplanter. Max Jacob. Ce soir-là, le programme comprenait :
883 e cadavre encore tout chaud ». Affreux. Aussi : «  Elle mourut. » On voit que cette bande est antérieure à l’époque du long b
884 ons rapides. Un chasseur, toujours sur son toit ; il tire sur l’œuf d’où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclata
885 onnes et suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois
886 renversé, maisons obliques, montagnes russes. (J’ ai regretté que René Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin l
887 t.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous les personna
888 le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pousser en disant : « C’
889 danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que c’est cochon ! » Mais le mome
890 que c’est cochon ! » Mais le moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, murmure : « On va tous deven
891 certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’ a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il f
892 ous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’ il faut, approuve et dit : « C’est bien ça, c’est comme quand on rêve. »
893 ualifié : c’est peut-être le premier film où l’on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le geste
894 geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse
895 e, et se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’est une question d
896 is ce sont là critiques de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans les films de René Clair un sens du miracle assez bo
897 une sorcière transforme un homme en chien, cela n’ a rien d’étonnant au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne s
898 ’est une réalité aussi réelle que celle dont nous avons convenu et que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » n
899 e n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il reste qu’un film comme Entr’acte est une aide puissante. Nous faisons
50 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
900 Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)ag Il faut souhaiter que ce témoignage sur les générations nouvelles et leu
901 le équilibre, les tendances que ses contemporains ont poussées à l’extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. S
902 ême temps par cette solution universelle, la foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l
903 fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’ il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, où sa jeunesse ne
904 nte, où sa jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit la « génération nouvelle » avec une intelligente sympathie et
905 aits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t -il trop négligé le rôle extérieur, que je crois décisif, des conditio
906 de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t- il trop négligé le rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions
907 décisif, des conditions de la vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l’inquiétude », M. Rops consid
908 ites qui s’offrent aux jeunes gens d’aujourd’hui. Il constate que l’une (celle de Gide) ne fait que différer notre inquiét
909 e paraît sans remède. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’ a-t -il pas cédé à la tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprê
910 raît sans remède. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’a-t- il pas cédé à la tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprême
911 r en deux mots : inquiétude ou foi. Dès lors sont- elles vraiment les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qu
912 nquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est- elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase qui formule admirablement les e
913 conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » ag. Rougemont Den
914 inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » ag. Rougemont Denis de, « [Compte
51 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
915 puissance étrangère s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire dés
916 saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’ elle peut faire désormais vibrer à sa fantaisie, même si cela doit m’anéan
917 pas seulement pour le pittoresque. — Attrape !   Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’existe que des systèmes pour f
918  Attrape !   Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’existe que des systèmes pour faire taire en nous l’appel vertigineu
919 mais c’est pour détourner nos regards de cela qu’ il faut bien nommer le Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés,
920 faut bien nommer le Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de la sainteté, seules vous no
921 ire de condamné à mort et à l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges les plus b
922 as de meilleur remède contre Dieu. Monsieur, vous avez dit : « C’est incompréhensible ! » — avec une indignation où j’admire
923 aresse à concevoir en esprit. Ces trois mots vous ont délivré du plus absurde malaise, et vous rallumez votre cigare. Vous
924 les s’efforcent — mais déjà c’est de plus loin qu’ il les nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par
925 — mais déjà c’est de plus loin qu’il les nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses rires scand
926 abiles à l’immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique littéraire ! Nous sommes ici en présence d’un
927 euses, de bravades et de faciles tricheries8 — qu’ ait connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanati
928 tisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. «  Il s’agit de rendre impraticables quelques portes de sortie » ou comprom
929 réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent acheté au prix d’un martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à
930 de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions -nous accepté le sort communément heureux de nos contemporains qui ont
931 sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Auguste Comte cette tranquillité de rejeter définitivement
932 eut duper. Depuis certaines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine,
933 er. Depuis certaines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine, et vo
934 ines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine, et vous aurez beau rir
935 ression plus haute de l’angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle est née dans un café de Paris.
936 , et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’ elle est née dans un café de Paris. « Je n’attends rien du monde, je n’att
937 a notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’ elle puisse en aucun cas servir d’argument à un homme. » Voilà qui nous fa
938 n’est pas à genoux qu’on attendra : pour que cela eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas la tête en bas par rappo
939 enoux qu’on attendra : pour que cela eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas la tête en bas par rapport au soleil
940 r que cela eût un sens, il faudrait être sûr de n’ avoir pas la tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, int
941 ncore Aragon, sinon qui ? — sa grandeur, c’est qu’ il lui faut atteindre Dieu ou n’espérer plus aucun pardon. II Nove
942 l y a un an, tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Aragon revêtu d’une d
943 Et voici Aragon revêtu d’une dignité tragique qu’ il trouverait sans doute un peu ridicule. C’est ainsi que l’on arrive à
944 830, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encor
945 assez fréquent dans les cafés littéraires et dont il serait le premier à s’amuser ?   Février 1927. Relu Une vague de rêve
946 m revient sous ma plume, comme une mouche qu’on n’ a jamais fini de chasser parce qu’elle n’a pas mérité du premier coup q
947 mouche qu’on n’a jamais fini de chasser parce qu’ elle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser,
948 qu’on n’a jamais fini de chasser parce qu’elle n’ a pas mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser, — c’
949 qu’on se donne la peine de l’écraser, — c’est qu’ il symbolise tout cet état d’esprit « bien Parisien » dont de récentes s
950 e craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité v
951 s toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous tromper sur ce qu’il y a de p
952 s tromper sur ce qu’il y a de profond en nous, et elle ne manque guère à ce devoir sacré. » (Edmond Jaloux.) Entre un monsi
953 revus. Mais je suis vos travaux avec intérêt, et il m’a paru que depuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je me su
954 s. Mais je suis vos travaux avec intérêt, et il m’ a paru que depuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je me suis d
955 intéressant. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’ avons pas le temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtr
956 gés, absolument… Le Sens Critique. — Justement j’ aurais en quelque manière la prétention… Moi. — Que voilà un singulier impe
957 oubliez pas que « l’artiste serait peu de chose s’ il ne spéculait sur l’incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Vou
958 ait sur l’incertain », c’est un académicien qui l’ a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Mai
959 re plaisir… III Il y a des gens qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à l’origine de telle doctrine mystique
960 Il y a des gens qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à l’origine de telle doctrine mystique une exaltation nerv
961 y a des gens qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à l’origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse
962 e exaltation nerveuse ou des troubles organiques. Ils opposent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raiso
963 si cela ne condamne pas et la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grande tradition
964 écarter. Voilà bien leur désinvolture, car enfin, elle est déesse. Mais entre leurs mains qu’est-elle devenue ? C’est bien l
965 n, elle est déesse. Mais entre leurs mains qu’est- elle devenue ? C’est bien leur faute si elle nous apparaît aujourd’hui com
966 ns qu’est-elle devenue ? C’est bien leur faute si elle nous apparaît aujourd’hui comme une vieille courtisane assagie, parfo
967 raphiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui l’ aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiques. N
968 esprit contre votre raison. Et avec Aragon lorsqu’ il vous crie : « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimba
969  » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’ il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les pl
970 ix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’ il vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significati
971 Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite révolution à nous, dans tel dom
972 ci que je ne puis pardonner aux surréalistes : qu’ ils aient voulu s’allier aux dogmatiques d’extrême gauche. Je ne dirai pa
973 ue je ne puis pardonner aux surréalistes : qu’ils aient voulu s’allier aux dogmatiques d’extrême gauche. Je ne dirai pas, com
974 iques d’extrême gauche. Je ne dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli de crier merde pour Horace, Montaigne, Desc
975 r Marx ou Lénine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner
976 sprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10 ans, une révolution en fonction du capitalisme. Est-c
977 langue et de crier rouge pour la simple raison qu’ ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit « bien français » qu
978 ue et de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit « bien français » qui s’
979 e mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’ il inspire ? Alors que cette réaction même est ce qu’il y a de plus fran
980 ême est ce qu’il y a de plus français ; que c’est elle qui donne au surréalisme ce petit côté jacobin si authentiquement, si
981 a quatrième dimension. Aragon et les surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et contre toutes les critiq
982 n et les surréalistes auront raison même encore s’ ils ont tort, envers et contre toutes les critiques qu’on pourrait leur a
983 les surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et contre toutes les critiques qu’on pourrait leur adres
984 pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort,
985 parce que ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la pa
986 nt la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable se
987 a vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous f
988 e, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut
989 sion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand principe de violen
990 ïssions. Notre haine de certaine morale ne venait- elle pas de ce qu’en son nom l’on mesurait odieusement une sympathie humai
991 sympathie humaine pour nous sans prix ? Mais nous avions besoin de révolution pour vivre, pour nous perdre. Vivre était devenu
992 urt que de vices. ⁂ Ici le lecteur se rassure. «  Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue
993 Ici le lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue dans les brancards
994 disque de gramo comme par hasard nasille : Nous avons tous fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis l’aiguille divagu
995 s, et aussi pourtant des histoires de copains qui ont mal tourné, on pensait bien, ah ! cette jeunesse, mais voyons des aff
996 plus sérieuses. Et tout est dit. Ah ! c’est vrai, il allait oublier, il y a encore cette histoire, comment dites-vous, sur
997 rité changeante et toujours évidente, de laquelle il se demande vainement pourquoi il n’arrive pas à se contenter13 ». Acc
998 nte, de laquelle il se demande vainement pourquoi il n’arrive pas à se contenter13 ». Acculés à ce choix : inconscience de
999 l-Genève-Fribourg, avril 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
52 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
1000 et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qui se passaient
1001 le train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre d
1002 ries de profils jusqu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain l
1003 yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique, le visa
1004 d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sourire d’amitié mortel de tout ce
1005 e d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trompé, ce n’est pas elle. Il pensa que c’était un ange, de ceu
1006 ui n’arrive jamais. Il s’est trompé, ce n’est pas elle . Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à la recherche des âm
1007 rrive jamais. Il s’est trompé, ce n’est pas elle. Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à la recherche des âmes.
1008 e ceux qui vont à la recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui va à la chasse perd sa place, nou
1009 t immédiatement un fauteuil et un violon, pour qu’ il en joue, au printemps, s’il savait … R.S.V.P. À Max-Marc-Jean J
1010 et un violon, pour qu’il en joue, au printemps, s’ il savait … R.S.V.P. À Max-Marc-Jean Jacob Reymond. Une étoile à
1011 sa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fen
1012 e jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses, un sour
1013 flocons, plus perfides que des murmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’amitié pensive des jardins. Une fenêt
1014 cide ou la promenade en bateau À Grego More. Il disait : « Je suis né pour la mort. » Il fait assez beau pour que s’o
1015 More. Il disait : « Je suis né pour la mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi, comme un ca
1016 l’après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeur merveilleuse des objets et des êtres véritables.
1017 eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ ai pas bougé. C’est une question d’amitié. Pourtant je suis seul dès cet
1018 i, qui regarde comme de l’autre bord, je songe qu’ il est des visites à de certaines grandes dames où je préférais — et lui
53 1927, Articles divers (1924–1930). Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927)
1019 stes neuchâtelois (avril 1927)k Neuchâtel va-t- elle redevenir le centre artistique qu’elle fut au siècle passé ? Allons-n
1020 hâtel va-t-elle redevenir le centre artistique qu’ elle fut au siècle passé ? Allons-nous assister à un regroupement de ses f
1021 on est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’ elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins des deux éléments nécess
1022 de jeunes peintres neuchâtelois. Quant à savoir s’ il est possible déjà de discerner parmi eux certaines tendances générale
1023 faire le procès, mais qui expliquent, me semble-t- il , pour une part, la dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde
1024 e, énervante, souvent fatale aux novateurs. Alors ils s’en vont à Paris, ou bien ils se retirent dans une solitude plus eff
1025 x novateurs. Alors ils s’en vont à Paris, ou bien ils se retirent dans une solitude plus effective, quitte à nous revenir m
1026 nt d’un de ses enfants… » Car le fils prodigue, s’ il rentre au foyer dans une Rolls-Royce et fortune faite, tout le monde
1027 . « Voilà le train du monde… » Je ne pense pas qu’ il en faille gémir. Une certaine résistance est nécessaire pour que la f
1028 iques autorisés. Du benjamin, Eugène Bouvier, qui a 25 ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si les peintres don
1029 ouvier, qui a 25 ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si les peintres dont nous allons parler méritent d’être a
1030 arriva de Genève il y a de cela cinq ou six ans. Il peignait alors des natures mortes, de petits paysages, il dessinait d
1031 ait alors des natures mortes, de petits paysages, il dessinait des nus aux crayons de fard. C’était un peu plus Blanchet q
1032 einte en bleu vif et ornée de surprenants batiks, il s’est livré pendant quelques années à des recherches un peu théorique
1033 out est lisse et parfait. Trop parfait seulement. Il manque à ces recompositions de la nature, à ces natures remises à neu
1034 , cette tête prisonnière qui regarde ailleurs… Qu’ il sorte enfin et se mette à graver les scènes qu’il voit dans la petite
1035 il sorte enfin et se mette à graver les scènes qu’ il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de constater co
1036 la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’ il intitule la cité est un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est
1037 mum d’expression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conférer à tout ce qu’il touche, qu’il décore une bannière, f
1038 ité précieuse », il sait la conférer à tout ce qu’ il touche, qu’il décore une bannière, fabrique une poupée, compose une a
1039 », il sait la conférer à tout ce qu’il touche, qu’ il décore une bannière, fabrique une poupée, compose une affiche ou une
1040 oupée, compose une affiche ou une mosaïque, c’est elle qui permettra de reconnaître une de ses œuvres. Et aussi ce brin de c
1041 es. Et aussi ce brin de comique un peu bizarre qu’ il glisse si souvent là où on l’attend le moins. Conrad Meili apporte ch
1042 inspiration neuve, d’origine germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à la voluptueuse rigueur latine, et qui tout e
1043 et qui tout en s’épurant dans des formes claires a su les renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité comb
1044 rant dans des formes claires a su les renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité combative qui manque trop
1045 bative qui manque trop souvent au Neuchâtelois. S’ il casse des vitres, ce n’est pas seulement pour le plaisir, mais plutôt
1046 nt une initiative comme celle de Neuchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuchâtelois. Actuelleme
1047 une initiative comme celle de Neuchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuchâtelois. Actuellement, M
1048 lle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui eût cru que ce paysagiste plutôt impressionniste s’astreindrait jamais au
1049 habiller une idée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans
1050  : il ne prend pas le sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche et un peu lourde, son pinceau la
1051 ceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’ il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une
1052 icate quand du haut de San Miniato ou de Fiesole, il peint Florence avec des roses et des jaunes jamais mièvres, sous l’œi
1053 Donzé touché à son tour par la grâce décorative, il n’en reste qu’un, du moins à Neuchâtel même : Eugène Bouvier. Ce garç
1054 ique et qui voient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la pei
1055 e et qui voient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peint
1056 s défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il faut pour comprendre cet art emprunter de singuliers chemins d’accès.
1057 ses aînés, dont on le puisse rapprocher, parce qu’ il est un des rares peintres de ce pays pour qui la couleur existe avant
1058 ires qui s’épanouissent sur les toiles de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies. Il aime ces heures où
1059 t sur les toiles de Meuron. Il semble toujours qu’ il peigne entre deux pluies. Il aime ces heures où ciel et onde se mêlen
1060 l semble toujours qu’il peigne entre deux pluies. Il aime ces heures où ciel et onde se mêlent, et sait rendre mieux que p
1061 -je, Bouvier va peindre. Comme peintre religieux, il se cherche encore. On a pourtant l’impression, à voir ses dernières t
1062 Comme peintre religieux, il se cherche encore. On a pourtant l’impression, à voir ses dernières toiles, d’une plus grande
1063 ment on passe en cinq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt le ch
1064 le chef d’une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures mortes qui décidément l’étaient, à faire froid d
1065 un mélange de Rops et d’Ensor ; pensait-on… Déjà il avait des disciples (Madeleine Woog, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà par
1066 mélange de Rops et d’Ensor ; pensait-on… Déjà il avait des disciples (Madeleine Woog, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà paraissai
1067 issaient dans les Voix (cette courageuse revue qu’ il avait fondée avec J. P. Zimmermann) des dessins d’un dynamisme impétu
1068 aient dans les Voix (cette courageuse revue qu’il avait fondée avec J. P. Zimmermann) des dessins d’un dynamisme impétueux ré
1069 mble s’être opérée. Humbert est rendu à lui-même. Il atteint son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme le Potier.
1070 z un Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il y en a plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de le voir peint
1071 rles Humbert livré à sa fougue originale. Il y en a plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de le voir peint par lu
1072 le. Il y en a plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de le voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large
1073 e cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout cela communique une impression de pu
1074 i semble se faire une volupté de la discipline qu’ elle s’impose. Et voilà qui fait encore plus « Renaissance » : le costume
1075 ient un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’ il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-
1076 ert, et ce n’est pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est
1077 u’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’ il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le beau sens anci
1078 lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le beau sens ancien du terme
1079 r la reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le beau sens ancien du terme, tout comme son frère
1080 ui s’y reflèteront soient aussi beaux que ceux qu’ il peint ou modèle, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle
1081 e, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme ( elle peint aussi, d’un œil regardant le sujet, de l’autre ce qu’en fait so
1082 voici François Barraud, le plus jeune des frères. Il vient apporter des dessins qui ressemblent beaucoup aux petites huile
1083 , très en avant, sans s’en apercevoir, peut-être. Il suivait son petit bonhomme de chemin sans se douter qu’il avait pris
1084 it son petit bonhomme de chemin sans se douter qu’ il avait pris quelques années d’avance sur ses contemporains. Un jour le
1085 son petit bonhomme de chemin sans se douter qu’il avait pris quelques années d’avance sur ses contemporains. Un jour les jeun
1086 u à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et
1087 peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d
1088 . Il a fait de la pâtisserie, mais on m’assure qu’ il se nourrit de noix et d’oranges. Il administre une feuille religieuse
1089 n m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. Il administre une feuille religieuse. Il déniche à Paris des tableaux my
1090 d’oranges. Il administre une feuille religieuse. Il déniche à Paris des tableaux mystérieux qu’il relègue dans son atelie
1091 se. Il déniche à Paris des tableaux mystérieux qu’ il relègue dans son atelier, pêle-mêle avec les siens. Vous retournez un
1092 bjet le plus banal se charge de mystère. Que va-t- il se passer là-dedans ? Et ces roses sont le signe de quel occulte prod
1093 e de ces machines à explorer l’au-delà. En vérité il faut être sorcier ou artiste pour changer en instruments métaphysique
1094 venir de Charles Harder, qui est mort jeune, sans avoir pu donner toute sa mesure. Il a laissé surtout des dessins, d’une sûr
1095 mort jeune, sans avoir pu donner toute sa mesure. Il a laissé surtout des dessins, d’une sûreté un peu traditionnelle, d’u
1096 t jeune, sans avoir pu donner toute sa mesure. Il a laissé surtout des dessins, d’une sûreté un peu traditionnelle, d’un
1097 ne, un sculpteur qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout le parti qu’on pouvait tirer des principes cubistes dans
1098 décomposition primitive en plans. C’est ainsi qu’ il atteint d’emblée dans ses statues à un beau style dépouillé et hardi.
1099 inement sa vie propre. Depuis, Léon Perrin semble avoir évolué vers une plus grande harmonie de lignes. Je pense surtout à se
1100 n de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique. C’est dans la manière cubist
1101 iguë. Notre revue n’est certes pas complète. Mais elle a du moins l’avantage de grouper des artistes qui, par le fait des ci
1102 Notre revue n’est certes pas complète. Mais elle a du moins l’avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circ
1103 7 sera la première manifestation collective. Est- il possible, au sein de ce mouvement, d’en distinguer d’autres plus orga
1104 aussi différentes par leur objet et le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Evard, Perrin, manif
1105 , notre but serait suffisamment atteint si nous n’ avions fait qu’affirmer l’existence et la vitalité d’une jeune peinture orig
1106 rmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’ elle ne caresse ; où pourtant les hivers les plus durs réservent des douce
54 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
1107 st un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’ a d’ambition que pour ses enfants. Jacob, l’aîné se révolte. Sensualité
1108 ance. C’est par l’argent qu’on domine notre âge : il devient grand industriel, assure sa fortune au prix du peu cynique re
1109 e honte et de douleur. « On vend de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leurs ambitions. S
1110 nd de l’étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût, le pèr
1111 le père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur L
1112  Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit gras
1113 oisie fatiguée, et de suivre le destin que vous m’ avez assigné à force de m’humilier et de me craindre. » ah. Rougemont D
55 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
1114 René Crevel, La Mort difficile (mai 1927) ai Le jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inq
1115 aiment ? C’est l’exigence d’une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute joie comme illusoire et livre l’individ
1116 l’individu pieds et poings liés à l’obsession qu’ il voulait avouer pour s’en délivrer peut-être. Cette sincérité ne serai
1117 ’en délivrer peut-être. Cette sincérité ne serait- elle à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de c
1118 de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’ elle s’acharne sur le détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourge
1119 et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai . Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel, La Mort difficile
56 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
1120 ves éveillés, entre deux gorgées d’un élixir dont il voudrait bien nous faire croire que le diable est l’auteur. Beaucoup
1121 verres, se posent sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une
1122 tache de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ ai la beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique
1123 e sent presque pas sa blessure. Mais c’est ici qu’ il s’agit de ne pas confondre inexplicable avec incompréhensible. aj.
57 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
1124 e dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit- il  ? de détruire ou de rafistoler ? » Entre ces deux tentations, cédant
1125 ine. Encore un ? Non, enfin un. Tous les autres y ont apporté de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée d’apologie,
1126 Celui-ci bat sa coulpe avec une saine rudesse. «  Il s’examine jusqu’au ventre de sa mère et cognoit que dès lors il a est
1127 usqu’au ventre de sa mère et cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’es
1128 u’au ventre de sa mère et cognoit que dès lors il a esté corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’est
1129 les « éclats de l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceaux très divers qui composent ce livre
1130 magnifiquement jetés. Mais cette imperfection, s’ il ne peut encore s’en tirer, du moins l’avoue-t-il avec une franchise q
1131 ’il ne peut encore s’en tirer, du moins l’avoue-t- il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout de même, on
1132 r chez les jeunes écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’époque, une vision si claire et si tragique d
1133 es au sérieux en France par quelques jeunes gens. Il faut louer Drieu d’avoir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est q
1134 e par quelques jeunes gens. Il faut louer Drieu d’ avoir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la litt
1135 r Drieu d’avoir échappé au surréalisme en tant qu’ il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su e
1136 le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’ avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu’au boutisine » qu
58 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
1137 et je jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on m’ a appris à voler. Aristophane (« Les Chevaliers »). Dès qu’on eut dép
1138 er. Aristophane (« Les Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une eau minérale devant son étrang
1139 l’esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’ avais vingt ans. Je vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet âge,
1140 vaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que je leur devais. Pourtant
1141 pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’ elle ne souffrît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je l’embrassai
1142 ur qu’elle ne souffrît à cause de moi. Un soir qu’ elle pleurait, je l’embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais
1143 quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce qu’ il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtement heureux. Le len
1144 art d’heure, je connaissais l’amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtement heureux. Le lende
1145 ur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses lèvres sans une parole quand je vins lui so
1146 i souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait avec une terreur ou je crus disti
1147 endemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait avec une terreur ou je crus distinguer je ne sais quelle
1148 talgie. Pour lui, sans doute, j’étais perdu. Mais il souffrait d’autre chose encore : il se savait vieux, maintenant. » Je
1149 s perdu. Mais il souffrait d’autre chose encore : il se savait vieux, maintenant. » Je songeais justement à un sourire de
1150 songeais justement à un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser la parole après un silence vertigineux. Il vit mon
1151 ’adresser la parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Alors une rage s’empara de mon corps tout
1152 nuit et je partais dans une direction quelconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — J
1153 ar instants l’air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à cause du soir trop limpide et trop vaste, c
1154 reux — celui justement que j’entrevoyais. » Quand elle se fut endormie, je me rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans s
1155 sion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne m’ avait -on pas dérobé des années de joie au profit d’une vertu que tout en mo
1156 le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’ avait emprisonné c’était un bas opportunisme social, résultante des paresse
1157 de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer les modalités de ma vengeance
1158 et non dénuée d’ironie, de mon mépris pour ce qu’ ils appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est
1159 Prêté — rendu, pour la gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il
1160 prit un temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit- il , de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore qu
1161 us vulgaires et des plus généralement répandus, j’ ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions élément
1162 nt le sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’ a-t -on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais o
1163 Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nom
1164 n parut satisfait de cette dernière plaisanterie. Il but avec beaucoup de délicatesse quelques gorgées d’eau minérale. Isi
1165 ins compromettante, sur cette vie dont le récit n’ avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chose avant tout m
1166 t endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit- il , lâchant tout de suite ses compliments, ce qui est de mauvaise politi
1167 e, — c’est l’extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans réticences ; elle m’apparaît comme un divertis
1168 tre vie. Elle est sans bavures, sans réticences ; elle m’apparaît comme un divertissement perpétuel et dénué d’inquiétude. E
1169 irer de votre conduite les conclusions morales qu’ elle paraît impliquer, c’est ce caractère de, comment dirai-je…, de juvéni
1170 l’agressif — effet d’une timidité naturelle dont il paraissait lui-même gêné. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieu
1171 vous dire que si vous me trouvez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’ait point raison. Mais juste
1172 ache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’ ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d’avoir raison.
1173 raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d’ avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce que mes principes peuvent avoi
1174 aussi bien que vous ce que mes principes peuvent avoir de « bien jeune », de banal presque, et, pis, d’agréablement paradoxa
1175 aines de mes plaisanteries la dérision secrète qu’ elles masquent par caprice. ...............................................
1176 e Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’ elles n’engagent pas sa responsabilité. (N. de la R.) »
59 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conseils à la jeunesse (mai 1927)
1177 Conseils à la jeunesse (mai 1927)u « On a reproché bien des choses aux romantiques : le goût du suicide, l’habi
1178 es temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de
1179 e cette méthode ne suffirait pas à supprimer. Or, ils nous paraissent entraîner assez naturellement chez des jeunes « et qu
60 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
1180 le cœur des femmes (juillet 1927)am Quand vous avez fermé ce petit livre, vous partez en chantonnant le titre sur un air
1181 attardez aux terrasses des cafés. Peut-être va-t- elle revenir avec son Johannes laqué. Ah ! comme vous sauriez lui plaire,
1182 irard : lui seul connaît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous venger, vous lui dites qu
1183 es que, « d’abord », son livre n’est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que le lyrisme des noms géographiques vous fatig
1184 rocédés lassants ». Pierre Girard n’écoute plus : il pense à des Vénézuéliennes ou à Gérard de Nerval. Bientôt vous vous c
1185 à Gérard de Nerval. Bientôt vous vous calmez. Car il semble aujourd’hui que ce globe dans son voyage « est arrivé à un end
1186 lus sa drôlerie, son aisance. Vous accordez que s’ il force un peu la dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité
1187 us ne regardions que les jambes des femmes », dit- il , pour vous apprendre ! — sans se douter que rien ne saurait vous ravi
1188 parle toujours de Weber… Mais au fait, si vous n’ aviez pas lu ce livre ? Ah ! sans hésiter, je vous ferais un devoir de ce p
61 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
1189 nce le nom de tel de vos confrères, si je dis : «  Avez -vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de votre paradi
1190 : c’est trop agréable. Vous dites d’un goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alors, quelque paysan d
1191 royais écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonn
1192 uoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’ ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un peu grosse, n’est-ce pas ?
1193 cérités gardent au moins l’excuse d’une audace qu’ ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar où je vous suis. Vous y ent
1194 ntemple au miroir de son monocle. Au petit matin, il se noie dans un verre à liqueur. Poisson dans l’eau, plumes dans le v
1195 vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable et ne se baignent que dans des
1196 ète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable et ne se baignent que dans des béniti
1197 baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ ils trouvent ça pittoresque. Et le plaisir d’être nu devant un public sup
1198 e cherche les raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce les guillemets qui vous choquent 
1199 nt gratuit ». C’est de la littérature. À force d’ avoir mérité ces épithètes, pour nous laudatives, vous vous étonnez aujourd
1200 littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ ayons rien lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature
1201 rientaux cette croyance : nommer une chose, c’est avoir puissance sur elle. Images, pensées des autres, je vous ai mis un col
1202 nce : nommer une chose, c’est avoir puissance sur elle . Images, pensées des autres, je vous ai mis un collier avec le nom du
1203 nce sur elle. Images, pensées des autres, je vous ai mis un collier avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur la lais
1204 Une fois — et ce n’est pas que je m’en vante, — j’ ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, parl
1205 le. Poussière. Ma vie est ailleurs. L’addition, s’ il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces jeux, simulac
1206 Ma vie est ailleurs. L’addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui
1207 On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’ il ne tolère pas qu’on lui parle littérature. Mais il y a des mépris qui
1208 r. Tel qui raille l’Église et les curés, c’est qu’ il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature 
1209 tuelles donne la mesure de ce que vous attendez d’ elle . Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente
1210 eurs qui sont parfois des actions en puissance15. Il faudrait des choses plus lourdes et plus irrésistibles, percutantes.
1211 epuis le temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’ elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que
1212 l’expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il deviendrait inutile de la publi
1213 viduelle. Elle serait tellement incommunicable qu’ il deviendrait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, o
1214 , en passant à la limite, on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en apercevrait pas. Je pressens encore dans v
1215 n les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier les choses qui nous importent. Vous
1216 te esthétique ou de ce sens social, — et voilà qu’ ils perdent même la problématique utilité de liaison qui était leur excus
1217 re. Avouons-le : rien de ce qu’on peut exprimer n’ a d’importance véritable. Alors, cessons de nous battre contre des moul
1218 le plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la connaissance abstraite et rationnelle dont le mon
1219 par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J
1220  littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dan
1221 ivains d’aujourd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de
1222 ins d’aujourd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ce
1223 e dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise
1224 sez drôle de voir le malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses familiarités avec une Muse qu’ils
1225 s à ce toréador ses familiarités avec une Muse qu’ ils n’ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode
1226 toréador ses familiarités avec une Muse qu’ils n’ ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de
1227 savantes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’ elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse viv
1228 a littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un a
1229 apperai pas plus qu’un autre : et qu’un beau soir il faille écrire pour vivre, possible ; mais, pour sûr, jamais vivre pou
1230 vre pour écrire16. De tous les prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfaisant
1231 ux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’ a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » Ch
1232 suivre une quête de l’esprit. Et vous savez ce qu’ elle nous vaut : les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous
1233 re acceptation des réalités spirituelles parce qu’ elles troublent leurs bureaucratiques sécurités. Pourtant, vous voyez bien
1234  » peuvent encore se reconnaître. Quand bien même elle n’aurait plus d’autre excuse que celle-là, la littérature mériterait
1235 ent encore se reconnaître. Quand bien même elle n’ aurait plus d’autre excuse que celle-là, la littérature mériterait d’exister
1236 elle-là, la littérature mériterait d’exister : qu’ elle soit le langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes cert
1237 e m’aide à découvrir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une « maladie »
1238 de… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ ai défini une « maladie » dont je parviens à tirer quelque bien pour ma
1239 quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’ elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les bienfaits que j
1240 plus grands que les bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m’en guérir. Vous me demanderez «
1241 scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement de nuit très en vogue à Paris. Cambr
1242 aragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sache s’ il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de l’auteur. 15. Variante : des
1243  ». Leurs amours sont des pastiches de Morand, et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». v. Rougemon
1244 astiches de Morand, et ils en sont tout fiers : «  Il n’y a plus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, « La part du f
1245 s de Morand, et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, « La part du feu. Le
62 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les derniers jours (juillet 1927)
1246 er dans les singuliers mouvements de sympathie qu’ a provoqués l’infortune de l’Action française la fraternité qui existe,
1247 tidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athées du Socialisme et du Communis
1248 ccident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’ avaient pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont D
63 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Adieu au lecteur (juillet 1927)
1249 ns. Nous nous retirons : et ce n’est pas que nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous
1250 aite est toute « statutaire » — si l’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fièvre, sans lamenta
1251 sans fièvre, sans lamentations d’adieu.   On nous a parfois traités de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’âge d
1252 de nous voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches
1253 s l’énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches contradictoires. Nous les additionnons : ils s’ann
1254 eproches contradictoires. Nous les additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la paradoxale situation int
1255 ictoires. Nous les additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la paradoxale situation intellectuelle d’u
1256 ences de ce que vous écrivez ! ») En définitive, il semble que certains n’attendent de nous que d’innocentes farces — ou
1257 ou bien de ces affirmations dont en vérité l’on n’ a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en est a
1258 se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’ il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi,
1259 lisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’ avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun remord
1260 mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’ avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’avoir troub
1261 te catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’ avoir troublé quelques bonnes petites somnolences par des cris intempestifs
1262 par des cris intempestifs. Il y a des gens qui n’ ont pas encore admis que jeunesse = révolution Tous les malentendus vienn
1263 illard, et même, et surtout, un miracle. Et puis, ils ont des vieux un peu là, du grand Arthur-Alfred-Albert au non moins g
1264 rd, et même, et surtout, un miracle. Et puis, ils ont des vieux un peu là, du grand Arthur-Alfred-Albert au non moins grand
1265 thur-Alfred-Albert au non moins grand Tanner. (On a fait ses preuves, quoi !) Et puis, qui sait, peut-être sauront-ils ra
1266 ves, quoi !) Et puis, qui sait, peut-être sauront- ils rallier le dernier disciple du Bienheureux Jean… Et puis, en voilà as
1267 ter à cette lourde charge le poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! comme nous y tenons ! x.
64 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
1268 res amours (août 1927)an Ces trois nouvelles n’ ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminisc
1269 Ces trois nouvelles n’ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intéri
1270 nt d’un danseur de ses 20 ans, d’une aventure qui aurait pu être… Un homme médite à côté du corps de son ami suicidé pour une
1271 ôté du corps de son ami suicidé pour une femme qu’ ils ont aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été
1272 du corps de son ami suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de v
1273 et d’une si subtile convenance avec son objet qu’ il en saisit sans mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et l’in
1274 éalité ressuscitée… » Sachons gré à M. Vaudoyer d’ avoir su donner à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui le « char
65 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
1275 fumeux pour caractériser tout lyrisme germanique, il faudra opposer l’excellent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recu
1276 scandinaves et des romantiques allemands parce qu’ il partage avec eux ce goût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appel
1277 la vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace de lui un portrait qu’on dirait
1278 is, ne peut être sensible qu’à des êtres pour qui elle est en somme inutile : parce qu’ils possèdent déjà, au moins obscurém
1279 res pour qui elle est en somme inutile : parce qu’ ils possèdent déjà, au moins obscurément, le sens des réalités sur lesque
1280 On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ ont plus besoin de preuves. Il reste qu’un livre comme celui-ci tend un m
1281 aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuves. Il reste qu’un livre comme celui-ci tend un merveilleux piège sentimenta
1282 piège sentimental à la raison raisonnante. Et qu’ il nous mène un peu plus loin que la sempiternelle « stratégie littérair
1283 , de gazetiers ; au cœur de ces sujets qui paraît- il , ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. R
66 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
1284 auteur raconte dans une lettre à une amie comment il a écrit, sur commande, une Promenade dans le Midi. Récit alerte et fa
1285 eur raconte dans une lettre à une amie comment il a écrit, sur commande, une Promenade dans le Midi. Récit alerte et fami
1286 milieu d’une effusion « lyrique », histoire de n’ avoir pas l’air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de v
1287 rique », histoire de n’avoir pas l’air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir juste. Et quand son
1288 ue », histoire de n’avoir pas l’air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir juste. Et quand son bo
1289 « si arbitraire et si facultative », je me dis qu’ il n’en saurait être autrement tant qu’on se tient à cette attitude scie
1290 urité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu’il était de taille à affronter d’autres déda
1291 e, — encore que Bopp ait prouvé dans son Amiel qu’ il était de taille à affronter d’autres dédales ! Mais il a su mettre pl
1292 ait de taille à affronter d’autres dédales ! Mais il a su mettre plus de choses qu’il n’y paraît d’abord dans ces 50 pages
1293 de taille à affronter d’autres dédales ! Mais il a su mettre plus de choses qu’il n’y paraît d’abord dans ces 50 pages.
1294 s dédales ! Mais il a su mettre plus de choses qu’ il n’y paraît d’abord dans ces 50 pages. Beaucoup sont excellentes et le
67 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
1295 anvier 1928)aq C’est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la
1296 tions lyriques à leur propos. Mais dans ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensib
1297 yriques à leur propos. Mais dans ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité.
1298 r ; la tournée des cours de l’Europe centrale, qu’ elle subit comme jeune épouse d’un comte polonais, grand seigneur médiatis
1299 ais) assez peu intéressante à vrai dire, parce qu’ elle n’est pas à l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la te
1300 es, malicieuses ou poétiques ; et ce n’est pas qu’ il ne s’y glisse quelque préciosité ou quelques « pointes » faciles mais
68 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
1301 Le péril Ford (février 1928) a On a trop dit que notre époque est chaotique. Je crois bien, au co
1302 Le péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chaotique. Je crois bien, au contraire,
1303 ue. Je crois bien, au contraire, que l’histoire n’ a pas connu de période où les directions d’une civilisation apparaissen
1304 e question de quelques années. Mais peut-être est- il temps encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans le désert d’une
1305 les, l’Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs, qu’il y avait peut-être dans ces buts une abs
1306 une absurdité fondamentale. L’infaillible progrès aurait -il fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastr
1307 urdité fondamentale. L’infaillible progrès aurait- il fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastre s
1308 illible progrès aurait-il fait fausse route ? Est- il temps encore de le détourner du désastre spirituel vers lequel il ent
1309 de le détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreu
1310 le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscience du péril. Nous ne tentons rien d’
1311 nce générale à proclamer le désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affirmer que tout est incompr
1312 e de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’une époque entière ait pu se tromper, et se tro
1313 tion. Il répugne à admettre qu’une époque entière ait pu se tromper, et se tromper mortellement. Il suffit pourtant de rega
1314 re ait pu se tromper, et se tromper mortellement. Il suffit pourtant de regarder autour de nous et d’en croire nos yeux.
1315 de nous et d’en croire nos yeux. I. L’homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et
1316 a popularité universelle sont signes que l’époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc
1317 e de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’ il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe
1318 telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe son enfance à jouer avec des outils, « 
1319 dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe son enfance à jouer avec des outils, « et c’est avec des outils
1320 er avec des outils, « et c’est avec des outils qu’ il joue encore à présent », dit‑il. Le plus mémorable événement de ces a
1321 vec des outils qu’il joue encore à présent », dit‑ il . Le plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin
1322 nnées de jeunesse, son « chemin de Damas » (comme il dit sans qu’on sache au juste quelle dose d’« humour » il met dans l’
1323 ans qu’on sache au juste quelle dose d’« humour » il met dans l’expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière.
1324 ’au jour présent, ma grande et constante ambition a été de construire une bonne machine routière. » Les étapes de sa jeun
1325 ère automobile fabriquée, à temps perdu, alors qu’ il est simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après la Société des
1326 u, alors qu’il est simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après la Société des automobiles Ford, « et commence à réal
1327 ait ajouter à ces chiffres celui des milliards qu’ il possède, ou plutôt qu’il gère, mais ce n’est pour lui qu’un résultat
1328 s celui des milliards qu’il possède, ou plutôt qu’ il gère, mais ce n’est pour lui qu’un résultat secondaire de son activit
1329 at secondaire de son activité. Le but de sa vie n’ a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’a réalisé co
1330 mais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voit
1331 été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’ a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures
1332 r. Son « rêve » était autre, il l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la
1333 industriel du monde ; le plus riche, au point qu’ il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ; le plus parfait aus
1334 alaires, des conditions de travail et de repos qu’ il offre à ses ouvriers semblent bien apporter une solution définitive a
1335 enage et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’ a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialis
1336 européens ne sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire
1337 opéens ne sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire au
1338 pas déplaire aux doctrinaires de gauche, lesquels ont coutume de promettre à leurs électeurs une organisation complète du m
1339 en supprimant l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dé
1340 principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de nett
1341 épandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t- il , en souhaitant que les industriels européens s’en inspirent toujours
1342 rent toujours plus. Ford leur montre le chemin qu’ ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préférable qu’ils
1343 u’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préférable qu’ils s’y engagent dès aujourd’hui résolument, pendan
1344 igés de prendre tôt ou tard. Il est préférable qu’ ils s’y engagent dès aujourd’hui résolument, pendant qu’il reste quelques
1345 y engagent dès aujourd’hui résolument, pendant qu’ il reste quelques chances encore de régler pacifiquement le conflit du c
1346 ne le premier exemple de son achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici do
1347 le premier exemple de son achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc
1348 la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on puisse poser
1349 qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avo
1350 philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et
1351 vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute sa carrière — pensée, méthode, technique — soit cond
1352 tière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser l’objet par ses propres moyens, à un exemplai
1353 t par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier les réalisations. Bientôt, élargissan
1354 réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par la possessi
1355 é par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les pl
1356 omobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la pro
1357 biles Ford. Et, comme il est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la produ
1358 ormes d’autos. Seulement, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la conso
1359 il faut vendre ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé tr
1360 mple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ ils ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée. La p
1361 lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant que de lui donner une apparence d’utilité p
1362 s sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur.
1363 rs des clients, quel que soit l’état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client. Mais cherchons un p
1364 ent trop chère ; mais surtout que le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’indust
1365 e le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’industriel n’ait plus qu’à plier bagag
1366 qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’es
1367 ou a disparu. Il semble alors que l’industriel n’ ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’o
1368 aisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution 
1369 ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les
1370 isparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix.
1371 abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne
1372 n. Il est impressionné par la baisse, au point qu’ il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellement. Il croit qu’il va
1373 n oublie que cela ne l’intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en achetant 5 francs moins chers un ob
1374 cela ne l’intéresse plus réellement. Il croit qu’ il va gagner 5 francs en achetant 5 francs moins chers un objet que, san
1375 ancs moins chers un objet que, sans cette baisse, il n’eût pas acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse.
1376 moins chers un objet que, sans cette baisse, il n’ eût pas acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’ind
1377 isse, il n’eût pas acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est pré
1378 scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense superflue ; l
1379 faire une dépense superflue ; le scandale est qu’ il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profon
1380 e une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond, cet
1381 ar cela va bien plus profond, cette tromperie-là. Elle peut amener, en se généralisant, une sorte de suicide du genre humain
1382 e, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme
1383 -être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un article intitulé « Le grand paradoxe du mon
1384 dans la conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Cré
1385 on », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford re
1386 n engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc.
1387 st déterminé par la réclame, les produits Ford qu’ il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation.
1388 réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus comple
1389 clame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus complet
1390 a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à
1391 end plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’ il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vici
1392 e vicieux : plus la production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or, l’industrie ne peut subsiste
1393 bsister qu’en progressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront atteintes. On peut
1394 re humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à quel point Ford est con
1395 nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom philosophique : c’e
1396 t au plus pur, au plus naïf matérialiste que nous avons affaire ici. Et ses prétentions « idéalistes » n’y changeront rien. D
1397 salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en pratiq
1398 fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop dans ce que nou
1399 sons et ne pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de
1400 en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des conséquences, alors que Ford passe outre et se
1401 e et se remet à discuter des points de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’
1402 se remet à discuter des points de technique. Il n’ a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’aill
1403 uter des points de technique. Il n’a pas senti qu’ il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées
1404 ette sorte sont rares dans son livre. En général, il se borne à parler de problèmes techniques où son triomphe est facile.
1405 en parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérit
1406 me la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’ elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimis
1407 ds esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’insiste un pe
1408 Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement aigu. Est-ce notre pensée qui, à force de subtil
1409 justiciable encore de nos vérités essentielles ? Il semble bien que notre temps ait prononcé définitivement le divorce de
1410 tés essentielles ? Il semble bien que notre temps ait prononcé définitivement le divorce de l’esprit et de l’action. III
1411 sprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une aventure que nous pensions gratuite : nous
1412 ui une aventure que nous pensions gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pen
1413 ’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’ il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but vérita
1414 t pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but véritabl
1415 is par l’importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y c
1416 l’essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre pass
1417 ses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, «  il se passera bien de cette littérature ». Plus tard, « puisqu’elle n’es
1418 bien de cette littérature ». Plus tard, « puisqu’ elle n’est pas utile, elle est nuisible ». « … Tableaux, symphonies, ou au
1419 ture ». Plus tard, « puisqu’elle n’est pas utile, elle est nuisible ». « … Tableaux, symphonies, ou autres œuvres destinées
1420 . « En être » ou ne pas en être Une fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le m
1421 écanique bien huilée, au mouvement si régulier qu’ il en devient insensible et que la fatigue semble disparaître, l’homme s
1422 s d’horlogerie calculé une fois pour toutes et qu’ il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soi
1423 monde, c’est-à-dire à une nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s’empresse d
1424 oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’ il s’empresse d’aliéner au profit de plaisirs tarifés, soumis plus subti
1425 mande sans rapport avec ses désirs réels, et dont il subit docilement l’abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue
1426 es exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec l
1427 exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les
1428 turelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — qu’il met d’ailleur
1429 ressent une vague et intermittente détresse, — qu’ il met d’ailleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête
1430 . Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’ a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
1431 aissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’ il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, peu à peu, il découvre
1432 e plus même cette carence ; seulement, peu à peu, il découvre qu’il s’ennuie profondément ; fatigué de trop de satisfactio
1433 te carence ; seulement, peu à peu, il découvre qu’ il s’ennuie profondément ; fatigué de trop de satisfactions matérielles,
1434 t ; fatigué de trop de satisfactions matérielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effor
1435 fatigué de trop de satisfactions matérielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort
1436 factions matérielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sent
1437 tions matérielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentim
1438 joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’ avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une certaine durée nor
1439 res, humains et divins. Mauvais loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer la nature entre 17 et 19 heures : vraimen
1440 mirer la nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le
1441 manque plus rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut p
1442 nque plus rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plu
1443 le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le monde, lui attribue
1444 dans le monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le
1445 sent obscurément que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’escl
1446 méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature,
1447 ur s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits entre les ch
1448 isir que des rapports abstraits entre les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’Occide
1449 rien à l’Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté plus haute. O
1450 rvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supporter. Il ab
1451 gences telles que l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permet
1452 toire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons,
1453 faculté destinée à amuser nos moments de loisir, il a des exigences effectives ; et ces exigences sont en contradiction a
1454 culté destinée à amuser nos moments de loisir, il a des exigences effectives ; et ces exigences sont en contradiction ave
1455 » très spécial, — on les écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Ils se réfugient dans ce qu’on
1456 ages où ils risqueraient de faire grain de sable. Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler les classes privilégiées
1457 es forces occultes sans doute dangereuses, puisqu’ elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le trio
1458 igueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’ elle est inutile au grand dessein matérialiste de l’Occident. La logique,
1459 uche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une fois de plus. Pas de compromis possible de ce côté. Mais
1460 it autre chose qu’une échappatoire utopique. Nous avons mieux à faire, il n’est plus temps de se désintéresser simplement des
1461 échappatoire utopique. Nous avons mieux à faire, il n’est plus temps de se désintéresser simplement des buts — si bas soi
1462 désintéresser simplement des buts — si bas soient- ils — d’une civilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr
1463 sous le poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révoltes terribles4, celles d’un mysticisme exasp
1464 u dans sa prison. Les intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il est possible d’échapper au fatal
1465 ’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’ il est possible d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers la soluti
1466 question de foi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon
1467 rance, en Amérique ; poussée mystique en Russie. a . Rougemont Denis de, « Le péril Ford », Foi et Vie, Paris, février 1
69 1928, Articles divers (1924–1930). Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)
1468 à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. D
1469 osait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fallait- il accuser de cette duperie, qui rendre responsable de ma déception, sin
1470 ime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du monde ne sont
1471 ologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ ayant pas renoncé à certaine idée que j’avais d’un romantisme viennois, je
1472 . Donc, n’ayant pas renoncé à certaine idée que j’ avais d’un romantisme viennois, je fus conduit, par une sorte de compromis
1473 venir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’ avais même pas prononcé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans l’omb
1474 s, une fois de plus manquait le rendez-vous que j’ avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare
1475 évadé dans son rêve, beaucoup plus loin que moi, il n’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me v
1476 sparente : la mort même en devient moins brutale. Elle rôde ici comme une tristesse amoureuse. Elle n’est plus que l’approch
1477 ale. Elle rôde ici comme une tristesse amoureuse. Elle n’est plus que l’approche d’une grandeur où se perdraient nos amours
1478 que vous êtes tout près de comprendre… Mon voisin avait parlé tout haut ; personne pourtant ne se détournait. Comment pouvais
1479 e détournait. Comment pouvais-je être le seul à l’ avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’atteindre au
1480 le seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit- il , que seul vous venez d’atteindre au monde des êtres véritables. Nous
1481 otre souffrance… Mais le temps approche où vous n’ aurez plus besoin de souffrir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitt
1482 ns son collier de barbe noire. Je sentis que je l’ avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui
1483 rbe noire. Je sentis que je l’avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, p
1484 r, pouvait passer pour une élégance très moderne. Il n’y avait dans toute sa personne rien de positivement démodé ; je n’e
1485 ait passer pour une élégance très moderne. Il n’y avait dans toute sa personne rien de positivement démodé ; je n’eus même pa
1486 te sa personne rien de positivement démodé ; je n’ eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le
1487 ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où m’ avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison d’intervenir entre
1488 omard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit- il , parce qu’ils y voient une façon de me moquer de leurs petits chiens
1489 né. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce qu’ ils y voient une façon de me moquer de leurs petits chiens musclés… Je n’
1490 l’air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’ a guère changé, dis-je, songeant aux Amours de Vienne. — Certes, répond
1491 que ce soit. Cette ville, qui est toute caresses, a peur de l’étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez
1492 s une chose que je comprends assez bien, ajouta-t- il , mais pour d’autres raisons qu’eux, probablement… À ce moment, comme
1493 ésespérément à ses manches. De terreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur orangée. Gér
1494 ses manches. De terreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur orangée. Gérard semblai
1495 inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n’ ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant bien, mais peut-
1496 eux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient cet amour, c’éta
1497 mes qui m’ont retenu un instant, c’était parce qu’ elles évoquaient cet amour, c’était parce que je découvrais en elles de sec
1498 ent cet amour, c’était parce que je découvrais en elles de secrètes ressemblances, qui pour d’autres paraissaient purement my
1499 t jamais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femme ! elle n’était qu’un regard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver la
1500 e n’était qu’un regard, un certain regard, mais j’ ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela s
1501 paya quelques œillets rouges en lui expliquant qu’ elle devait les donner à la première jolie femme qui passerait seule. Nous
1502 eurs pour se donner le temps de regarder autour d’ elle  ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit
1503 êt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit donc par accepter et vint à nous avec un sourire du type le plu
1504 courant : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’y avait plus qu’à lui prendre chacun un bras, une femme pour deux h
1505  : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’y avait plus qu’à lui prendre chacun un bras, une femme pour deux hommes — et
1506 outume viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette ville, — du type que Gérard et Théo
1507 c’est que de prendre des femmes au hasard, disait- il . Je sens très bien que nous allons nous ennuyer terriblement. Du moin
1508 de plaisir — autre façon de parler. On dit que j’ ai vécu d’illusions, avouez que les miennes étaient de meilleure qualité
1509 qui seules faisaient sa dignité humaine, parce qu’ elles le rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins bl
1510 és s’amusent plus grossièrement que des barbares, ils s’imaginent pouvoir faire une place dans leur vie aux “divertissement
1511 ntent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ont pas été préparées pour leur
1512 laisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ ont pas été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni le
1513 ueurs qui n’ont pas été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t
1514 ignes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t- il bruyamment dans ces lieux : cet orchestre triomphant suffit à peine à
1515 eauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bugles agonisaient, aux dernières mesure
1516 pas moins. « Pourquoi vous ne dites rien ? » fit- elle d’un ton de reproche, évidemment scandalisée par cette atteinte aux l
1517 rda avec une certaine pitié : « Chère enfant, dit- il doucement, pauvre colombe dépareillée, vous n’avez pas de ressemblanc
1518 -il doucement, pauvre colombe dépareillée, vous n’ avez pas de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. » La pauvre fille n
1519 llement la belle effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, laissé au vestiaire, y était l’objet de vexati
1520 lire les signes. » Comme je ne répondais rien : «  Avez -vous sommeil ? demanda-t-il. Moi pas. D’ailleurs j’ai oublié mes clef
1521 répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-t- il . Moi pas. D’ailleurs j’ai oublié mes clefs il y a très, très longtemp
1522 ous sommeil ? demanda-t-il. Moi pas. D’ailleurs j’ ai oublié mes clefs il y a très, très longtemps… Et pas de Lune ce soir,
1523 y a très, très longtemps… Et pas de Lune ce soir, il serait dangereux de s’endormir. » Se penchant vers moi il prononça :
1524 t dangereux de s’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : « La nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque ém
1525 ïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’ il arrive aux meilleurs de se répéter, et que c’était la première fois d
1526 aisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Rouge avaient peu à peu envahi notre sang. Nos pensées devenaient légères comme des
1527 uarium de rêves, discourt et décrit les images qu’ il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Cl
1528 parle avec une liberté magnifique et angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’espace. Cent années et tous les visages
1529 e que tout revit en un instant dans cette vision, il connaît enfin la substance véritable et unique de toutes ses amours,
1530 bstance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous les drames du monde ne so
1531 s mouvants dans la lueur bariolée des sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles : le vrai drame de son destin
1532 boles : le vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des signes, des généalogies étourdissantes qui c
1533 outes les formes animales. Pour lui, les choses n’ ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité extr
1534 es choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’ il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la pas
1535 u’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne,
1536 seigne que la passion seule, par la souffrance qu’ elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et peu à peu, de leur
1537 . La fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher de moi. Il me raconte de ces superstitions qui n
1538 t son exaltation. Il semble se rapprocher de moi. Il me raconte de ces superstitions qui ne sont enfantines que pour nos s
1539 savants retombés en pleine barbarie spirituelle. Il plaisante. Il dit que la vie ressemble surtout à un film où les épiso
1540 bés en pleine barbarie spirituelle. Il plaisante. Il dit que la vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellen
1541 se voient par transparence au travers de l’autre. Il dit : « Pour celui qui saisit les correspondances, chaque geste, chaq
1542 us le soleil, et même ailleurs. Croyez-moi, ce qu’ il faudrait écrire, c’est une Vie simultanée de Gérard, qui tiendrait to
1543 presque plus rien ; à peine, de temps en temps, s’ il parlait à voix basse à son homard, qui semblait d’ailleurs endormi. E
1544 tant, le homard se réveilla. Gérard m’expliqua qu’ il en était ainsi chaque nuit, que l’animal devenait nerveux et que depu
1545 devenait nerveux et que depuis quelques semaines, il avait dû le mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion e
1546 enait nerveux et que depuis quelques semaines, il avait dû le mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion et la f
1547 elques semaines, il avait dû le mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit prendre au homard avec t
1548 ut cela s’empila dans des autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne, la place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’
1549 s’empila dans des autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne, la place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’étaient
1550 rs en bandeaux, au teint pâle, l’air d’autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée, je m’ape
1551 en bandeaux, au teint pâle, l’air d’autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée, je m’aperçus q
70 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
1552 t — et ce livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouvre des perspectives d’évasion — où
1553 et ce livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouvre des perspectives d’évasion — où s
1554 oir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’ elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les poètes savent se perd
1555 e perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’ avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs
1556 rgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que
1557 se jetaient sur ces volumes « au travers desquels ils respiraient l’air du monde ». N’en ferons-nous pas autant, emprisonné
1558 d’une conception de la littérature si pédante qu’ elle exclut un de nos plus grands conteurs sous prétexte qu’il n’est styli
1559 t un de nos plus grands conteurs sous prétexte qu’ il n’est styliste ni psychologue ? Laisserons-nous Jules Verne aux enfan
1560 ce coup, voilà qui ne m’empêchera pas d’y monter, il suffit que cet obsédant capitaine Nemo soit à bord, je soupçonne que
71 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
1561 Aragon, Traité du style (août 1928) as Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à m
1562 e aux écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ ils les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a
1563 ’ils les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (be
1564 r leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est même un
1565 conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est même un des très rares parmi les jeunes qui ait vraiment donné qu
1566 l est même un des très rares parmi les jeunes qui ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ai lu ce livre, malgré
1567 it vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ ai lu ce livre, malgré son premier chapitre, variation sur un mot bien f
1568 . Mais la seconde partie du livre est admirable ; il suffit. Le titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’ex
1569 our crier : Lâches, vous refusez d’avancer ! Mais il reste à portée de voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il le
1570 e de voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il le tient magnifiquement. Mais qu’on nous laisse chercher plus loin, d
1571 ccède à des objets qui enfin valent le respect. as . Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Aragon, Traité du style  », Bi
72 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)
1572 es surréalistes débattent la question de savoir s’ ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne doit pas entraîner, à leur
1573 leur point de vue, celui d’autrui sur eux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers l’action, c’est-à-dire — nous som
1574 universellement méprisées. Mais les surréalistes ont leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’esprit s’est bornée
1575 re un état de choses justement détesté, mais dont ils participent plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent de fair
1576 tement détesté, mais dont ils participent plus qu’ ils ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette
1577 ils participent plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réalité de premier plan
1578 ance positive de ce qu’il y a sous cette réalité. Il est certain que s’ils avaient le courage de se soumettre au concret d
1579 u’il y a sous cette réalité. Il est certain que s’ ils avaient le courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils compre
1580 y a sous cette réalité. Il est certain que s’ils avaient le courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient
1581 e courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommode mal de t
1582 en très beau style contre un monde très laid dont ils n’ont pas encore renoncé à chatouiller le snobisme. at. Rougemont
1583 s beau style contre un monde très laid dont ils n’ ont pas encore renoncé à chatouiller le snobisme. at. Rougemont Denis
73 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
1584 es chefs pour l’une ou l’autre de ces attitudes. ( Elles ne sont pas essentiellement contradictoires : elles représentent deux
1585 les ne sont pas essentiellement contradictoires : elles représentent deux manières de sentir l’unité d’une époque obsédée d’a
1586 concrétisé en hommes, en meurtres, en décrets. Qu’ il décrive la vie intense et instable des acteurs du drame, l’aspect quo
1587 it parfois tenté de le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus sensible. Et il ne se borne p
1588 plus nerveux, sans doute aussi plus sensible. Et il ne se borne pas à des effets pittoresques : ce récit coloré et précis
1589 i, mais à coups de faits, une discussion d’idées. Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malr
1590 t lui qui parle au nom de l’auteur, je pense) : «  Il me semble que je lutte contre l’absurde humain, en faisant ce que je
1591 ant de jeunes hommes de l’après-guerre, Malraux l’ a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La
1592 décisif : « La Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite, l’absurde retrouve ses droits.
1593 évolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’ elle … » Expérience faite, l’absurde retrouve ses droits. C’est ainsi que,
1594 asqué par l’enchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette intellige
1595 grimace. Cette intelligence et cette sensibilité ont quelque chose de trop aigu, de dangereux. Mais qu’elles s’appliquent
1596 quelque chose de trop aigu, de dangereux. Mais qu’ elles s’appliquent à distinguer les forces déterminantes de l’heure, à les
74 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
1597 éçoit l’imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l’ait point trompé : « Avec son beau regard de
1598 end que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l’ ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Ennemi
1599 ssi pure ni aussi rare qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ain
1600 aussi rare qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’ il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d
1601 si rare qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’u
1602 l’imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’ il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez moros
1603 giner. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’ a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ;
1604 u’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ; mais à grande éche
1605 z morose ; mais à grande échelle. M. de Pourtalès a su rehausser le tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner
1606 osait par hasard de moyens d’action puissants : s’ il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’
1607 ar hasard de moyens d’action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas
1608 d’action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’ il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet d
1609 action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de
1610 tion puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Lis
1611  : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’ il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopi
1612 s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin,
1613 il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’
1614 c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’ il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, do
1615 qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’ a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc l
1616 llusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’ il préfère parler d’illusion là où nos psychiatres proposeraient de moin
1617 n’était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès l’ a résolu d’une façon fort adroite mais non moins franche. av. Rougem
75 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
1618 autour de sa vie le plus grand mystère. Cependant il aime à raconter certaines scènes terrifiantes de la révolution : il a
1619 certaines scènes terrifiantes de la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à Paris même… Il
1620 rtaines scènes terrifiantes de la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à Paris même… Il su
1621 ntes de la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français
1622 mort, il s’est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre q
1623 nçais par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’ il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent les soupçons du « petit
1624 éveillent les soupçons du « petit-bourgeois » qu’ il a choisi comme public, et brusquement le mot éclate : menteur. Feinte
1625 eillent les soupçons du « petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public, et brusquement le mot éclate : menteur. Feintes
1626 à la mort, inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé. Je reg
1627 ique. Il y a dans ce culte de la mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde une confusion assez tra
1628 vant-garde une confusion assez tragique, parce qu’ elle constitue une tentation pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai
1629 u. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il
1630 butaire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’ il la faudrait, sans rien fausser, transcender… aw. Rougemont Denis d
76 1928, Articles divers (1924–1930). Miroirs, ou Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928)
1631 chez lui, cela ne s’est pas porté sur les autos. Il préfère s’intéresser aux divers types humains. Mais on lui sait peu d
1632 sait peu de grés de sa curiosité. Sans doute est- il trop impatient, demande-t-il aux êtres plus qu’ils ne peuvent donner…
1633 sité. Sans doute est-il trop impatient, demande-t- il aux êtres plus qu’ils ne peuvent donner… D’ailleurs on ne lui doit ri
1634 il trop impatient, demande-t-il aux êtres plus qu’ ils ne peuvent donner… D’ailleurs on ne lui doit rien, n’est-ce pas ? Il
1635 r… D’ailleurs on ne lui doit rien, n’est-ce pas ? Il en tombe d’accord ; accepte d’attendre comme un enfant sage que le mo
1636 e lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait la mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En
1637 n son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’ il fallait la mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes
1638 ermes, on lui conseille de rentrer en lui-même. «  Il se ramène en soi, n’ayant plus où se prendre » comme parle un de nos
1639 de rentrer en lui-même. « Il se ramène en soi, n’ ayant plus où se prendre » comme parle un de nos classiques. Repoussé par l
1640 de nos classiques. Repoussé par le monde parce qu’ il n’est pas encore quelqu’un, Stéphane cherche à savoir ce qu’il est. C
1641 encore quelqu’un, Stéphane cherche à savoir ce qu’ il est. C’est une autre manie de sa génération. Mais là encore il se sin
1642 une autre manie de sa génération. Mais là encore il se singularise : il n’écrit pas de livre pour y pourchasser un moi qu
1643 sa génération. Mais là encore il se singularise : il n’écrit pas de livre pour y pourchasser un moi qui feint toujours de
1644 e, et là déclare froidement ne pas exister. Non : il a remarqué que l’époque peut être définie par l’abondance des autobio
1645 et là déclare froidement ne pas exister. Non : il a remarqué que l’époque peut être définie par l’abondance des autobiogr
1646 aussi bien par celle des miroirs. C’est pourquoi il en installe un sur sa table de travail, de façon à pouvoir s’y surpre
1647 des heures entières à se regarder dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. Il découvr
1648 son visage les jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans les moments de p
1649 e genre, qui l’intriguent à n’en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir encore cette fatigue dans son regard :
1650 uent à n’en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir encore cette fatigue dans son regard : appuyé sur lui-même
1651 tte fatigue dans son regard : appuyé sur lui-même il se perd en méditations éléates. Le sommeil l’en délivre. Au matin il
1652 ations éléates. Le sommeil l’en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se prend en pitié. Ces séan
1653 sommeil l’en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se prend en pitié. Ces séances lui font du mal
1654 u matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se prend en pitié. Ces séances lui font du mal, l’énervent, mais l’av
1655 ances lui font du mal, l’énervent, mais l’aveu qu’ il en consent l’attache plus secrètement à son aventure. Nous vivons da
1656 n offre à Stéphane sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans l’acte de se raser, de se baigner ; son image descend en
1657 son image descend en face de lui par l’ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des
1658 l’ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le
1659 entre des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos,
1660 oiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’ il la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’
1661 est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il lui arrive de
1662 goisse qu’il la recherche. Il veut se voir tel qu’ il est parmi les autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour
1663 ut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’ il lui arrive de prendre son image pour celle de n’importe quel passant,
1664 e son image pour celle de n’importe quel passant, il se sent comme séparé de soi, et si profondément différent de cette ap
1665 si profondément différent de cette apparence, qu’ il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y c
1666 éalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’une révélation.
1667 on. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ? Il n’y a plus que cette incantation à soi-même qui pourrait lui rendre l
1668 t-on s’hypnotiser avec son propre regard ? Il n’y a plus que cette incantation à soi-même qui pourrait lui rendre la cert
1669 qui pourrait lui rendre la certitude d’être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qui vont en diminuant vertig
1670 ne à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout dans l’eau des miroirs.
1671 miroirs. Stéphane est en train de se perdre pour avoir voulu se constater. Va-t-il découvrir aussi qu’on ne comprend que ce
1672 de se perdre pour avoir voulu se constater. Va-t- il découvrir aussi qu’on ne comprend que ce qu’on dépasse ? Et qu’il fau
1673 si qu’on ne comprend que ce qu’on dépasse ? Et qu’ il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans l’homme moderne un bes
1674 vérifier qui n’est plus légitime dès l’instant qu’ il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu con
1675 uit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n’ a pas eu confiance. Or la personnalité est un acte de foi : Stéphane ne
1676 r la négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait p
1677 est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’ il est. Semblablement, il ne sait plus aimer. (Ces jeunes gens ne veulen
1678 téphane ne sait plus ce qu’il est. Semblablement, il ne sait plus aimer. (Ces jeunes gens ne veulent pas se fatiguer pour
1679 rire l’aspect psychologique d’une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que le lecteur dérisoirement tro
1680 d’une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que le lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoi
1681 lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’ avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette incom
1682 te aux considérations précédentes lui échappe, qu’ il y voie une de ces marques. Stéphane a oublié jusqu’au mot de prière.
1683 chappe, qu’il y voie une de ces marques. Stéphane a oublié jusqu’au mot de prière. Orphée perd Eurydice par scepticisme,
1684 à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre : «  Il faudrait briser tous les miroirs. Alors tu te verrais en vérité. Peut
1685 de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherche dans d’autres yeux, c’est pourq
1686 ujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherche dans d’autres yeux, c’est pourquoi il fait peur à certaine
1687 il se cherche dans d’autres yeux, c’est pourquoi il fait peur à certaines femmes. Un soir, après quelques alcools et un
1688 une amie d’une beauté de plus en plus frappante, il croit saisir dans un regard de cette femme l’écho de ce qui serait lu
1689 de cette femme l’écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeux, mais comme on meurt dans une naissance. Stépha
1690 et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester co
1691 appels qui reçoivent en même temps leur réponse, il répète à plusieurs reprises : « Je ne sais pas : je suis !… Je ne sai
1692 sage me cache tous les miroirs » — à une femme qu’ il aimait. n. Rougemont Denis de, « Miroirs, ou Comment on perd Euryd
77 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
1693 i raconte sa vie avec une émouvante simplicité et il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur qu
1694 vie avec une émouvante simplicité et il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien co
1695 e cette autobiographie tellement au sérieux que j’ ai été bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un hom
1696 au sérieux que j’ai été bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne
1697 j’ai été bien étonné du passage où il rappelle qu’ il écrit la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas enc
1698 sous cet aspect dans ces deux premiers tomes, où il décrit des scènes de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’a
1699 nt dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait être, avec sa verve doucement comique, si émouvant : « À cette é
1700 mme ou d’une femme quelconque, et disais “houu !” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que n
1701 d’une femme quelconque, et disais “houu !” il ou elle se secouerait enfin, que moi aussi je me secouerais, et que nous nous
1702 uchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’ ont plus que leur raison, ce monde où l’on ne sait plus créer avec joie d
1703 blâme, mais comme l’homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’importe quel autre de mon temps à faire abo
1704 la standardization à sa fin logique, ne pourrait- il pas être considéré un jour comme le grand tueur de son époque ? Rendr
78 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
1705 à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’il
1706 perdu toute foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ont pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvai
1707 u toute foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ont pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.)
1708 e connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ ils n’ont pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de cho
1709 aîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ ont pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses da
1710 Car ils ont vu, et s’ils n’ont pas cru, c’est qu’ ils sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans le monde moderne on
1711 mauvais.) 6. Peu de choses dans le monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur
1712 r à l’Éternel et à Satan pareillement. Et ceux qu’ elle enivre entrent en état de grâce ou de blasphème, selon. Mais ce qui i
79 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Avant-propos
1713 Avant-propos Le dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante petites pages tous les méfai
1714 r leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 exc
1715 eur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excel
1716 que, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’ il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est assez différent, moin
1717 sous un régime radical à sécrétion socialiste qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformémen
1718 a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré leur mauvaise h
1719 âtres aboutit à l’instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’on va voir
1720 lle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes l
1721 utes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien.
1722 rit ne peut servir à rien. — Alors ? — Justement. Il est un reproche auquel je compte ne pas échapper : celui de naïveté.
1723 m’étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais
1724 le. Pourtant je sais qu’à droite comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être compli
1725 Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce que je dirai de
1726 isé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce que je dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh !
1727 sur ce que je dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui s
1728 des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ ai encore deux mots à dire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute
1729 ment exagéré pour la jugeote de l’adversaire ou s’ il traduit simplement cette mauvaise foi pas même consciente, cette lâch
1730 ts à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’ aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du type : o
1731 temps — je n’aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’époq
1732 ux qui croient aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuve
1733 ent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ ils ne peuvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réfor
1734 le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira
1735 les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules d
1736 és par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherc
80 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 1. Mes prisons
1737 1. Mes prisons Il existe des gens qui s’attendrissent sur leurs souvenirs de classe. C’
1738 ndrissent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment partici
1739 t participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de la tâch
1740 Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’«  il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces b
1741 quand il essaie de nous faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles
1742 roit… Et de ces beaux problèmes d’arithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du raisonnement, par une
1743 être qui s’énerve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait j
1744 ve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui vo
1745 l, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recommence à gratter
1746 qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’ il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les to
1747 ient trop de place dans notre enfance. À 5 ans, j’ avais appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée. L’année suivante, on
1748 es acides, et naturellement, la phrase sacrée : «  Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans la suite, on se cha
1749 ouleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’ avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléité d’
1750 garde contre moi-même à cause des autres desquels il ne fallait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau s
1751 comprendre avec enthousiasme que ces vérités-là n’ ont aucune importance.) Quant à l’autre « évidence » que je viens de cite
1752  » que je viens de citer, je découvris un jour qu’ elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un cert
1753 contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps pour m’habituer à cette idée. Je tenais ce
1754 en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent ruiné trop de certitudes apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que j
1755 être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère et étende ses
1756 aux vertueuses indignations de nos maîtres quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous éti
1757 ar les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent- ils assez de verdeur d’esprit pour qu’il pût se dégager de leur empire. M
1758 laissèrent-ils assez de verdeur d’esprit pour qu’ il pût se dégager de leur empire. Mais on avait brisé en nous ces ressor
1759 pour qu’il pût se dégager de leur empire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une pe
1760 i les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure e
1761 e dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions pl
1762 ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux
1763 aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’ avions plus de « superstitions grossières » comme celles qui touchent à l’ac
1764 ent à l’action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne
1765 s miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’ il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. O
1766 ait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’ avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois matérielleme
1767 vré, en supporter longtemps encore l’action. Je n’ eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit et ces
81 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 2. Description du monstre
1768 nnues d’anciens camarades d’école primaire. Comme ils avaient changé ! On s’entendait d’autant mieux qu’on était devenus pl
1769 s d’anciens camarades d’école primaire. Comme ils avaient changé ! On s’entendait d’autant mieux qu’on était devenus plus diffé
1770 e je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’ avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Ri
1771 urs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressemble plus à un bon é
1772 lève qu’un instituteur : de l’un à l’autre il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’étant qu’une question
1773 x dans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai -je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini
1774 que des hommes et son mépris pour les paysans. Qu’ il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’être
1775 ire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable, cela se voit de
1776 — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable, cela se voit de loin
1777 ir à une élite responsable, cela se voit de loin. Il faut dire que ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le pl
1778 faut dire que ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter
1779 n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles au
1780 happe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesse
1781 ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ ils étaient sensibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais je n’en di
1782 ssieu très instruit, vous êtes presque certain qu’ il s’agit d’un de ces cuistres pédants qu’on aime rencontrer dans des fa
1783 pédants qu’on aime rencontrer dans des farces où ils sont drôles, mais non point dans la vie courante où ils le sont beauc
1784 nt drôles, mais non point dans la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la vi
1785 riodiquement, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue de quelque instrument. Il a des idées modernes sur tous les suje
1786 rhume de cerveau. Il joue de quelque instrument. Il a des idées modernes sur tous les sujets, espécialement sur la pédago
1787 ume de cerveau. Il joue de quelque instrument. Il a des idées modernes sur tous les sujets, espécialement sur la pédagogi
1788 ie. Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le prononce avec un inimitable sérieux, avec un P majuscule. On sent
1789 posthumes : l’artiste photographe et le régent. J’ ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogi
1790 ladresse professionnelle. J’en connaissais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien
1791 dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous
1792 que pendant que nous en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est
1793 ue l’apport des instituteurs, ou bien préexiste-t- il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourge
1794 dans les principes mêmes de l’École, et attire-t- il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouc
1795 ouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont
1796 t ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moins aussi sympathiques que n’importe quelle autre classe de
1797 prit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’ il se manifeste dans l’école primaire est un véritable virus de mesquine
1798 e. Entrons, c’est pire encore. Beaucoup d’enfants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloch
1799 ui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodé
1800 ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’
82 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 3. Anatomie du monstre
1801 3. Anatomie du monstre Ayant épanché un peu de ma rancune, à seule fin de montrer pour quelles rai
1802 ne, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ ai entrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera p
1803 ique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’ elles me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoig
1804 uisqu’elles me sont absolument personnelles et qu’ elles ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je
1805 elles me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fas
1806 ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse passer un petit examen aux principes de cette
1807 ion passionnément détestée. Vous allez voir comme il bafouillent leur « par cœur non compris ». Aux yeux de beaucoup de ge
1808 tient pour une bonne part à ce que ces personnes ont les yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’
1809 part à ce que ces personnes ont les yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une clairvoyance inté
1810 es. Il serait plus juste de dire que la passion n’ a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les plus vives.
1811 pacifiste n’est pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la
1812 se. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficulté dans l’avenir, d’une ou deux génér
1813 enir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec l’héritage de cinquante ans de radicali
1814 ales de réalisations pratiques. Le programme a ) l’horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse
1815 e concentration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bien distinctes. On attribue à chac
1816 une vue aussi large que simplifiée. Remarquons qu’ il suffit pour établir ce programme de disposer d’une ou deux feuilles d
1817 ers rectangulaires, bien proprement.) Évidemment, il est préférable de savoir aussi les noms des sciences élémentaires. Ma
1818 ir aussi les noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en aucune façon nécessaire de connaître la psychologie des enfa
1819 enfin des rythmes naturels de l’esprit humain, qu’ il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’actuelle division ho
1820 ’esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’ a point accordés à l’actuelle division horaire des journées… Monsieur,
1821 l’esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas. Les examens Ce sont en principe des « contrôl
1822 que trimestre. Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’étape. On obtient par ce moyen un peloton homogène, facil
1823 , la tricherie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies »
1824 s « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n’ a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « f
1825 plume de divers maîtres primaires et secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui
1826 ibre, car à la vérité ce n’est pas d’enseigner qu’ il s’agit, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’État, voyons d
1827 s esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’ avez -vous pas honte de vous faire rappeler sans cesse des vérités aussi él
1828 e ou deux autres bêtises de cette épaisseur, mais il faut reconnaître que jamais on n’avait songé à leur donner une extens
1829 aisseur, mais il faut reconnaître que jamais on n’ avait songé à leur donner une extension universelle et un caractère obligat
1830 ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’école s
1831 forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’e
1832 régime des lumières et des compteurs à gaz. Mais ils se fâchent tout rouge quand on leur dit que la Suisse est caractérisé
1833 u’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne re
1834 à. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui soit de première main, rien qui soit authentiq
1835 soit de première main, rien qui soit authentique. Ils négligent toutes les particularités, toutes les « prises » où pourrai
1836 les « prises » où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or la va
1837 ls dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or la valeur éducative des choses n’apparaît qu’à celui qui
1838 raît qu’à celui qui entre en commerce intime avec elles . On apprend plus de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ai
1839 de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut l
1840 ’est qu’on ne peut laisser aux élèves le temps qu’ il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés de gâcher l
1841 x élèves le temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ ils apprennent. Ils sont forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’a
1842 s qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’a qu’une valeur é
1843 nt forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’ a qu’une valeur éducatrice : s’il n’est pas modèle, il est absurde. Mai
1844 l. Or ce travail n’a qu’une valeur éducatrice : s’ il n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles
1845 qu’une valeur éducatrice : s’il n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles de ce qu’on nommait a
1846 tre conception pénitentiaire de l’école. Mais, s’ il est des disciplines qui renforcent, il en est d’autres qui amoindriss
1847 . Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’autres qui amoindrissent. La discipline scolaire consiste à
1848 mmobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite le travail du maître. Il se peut. Tout dépen
1849 Il paraît que cela facilite le travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce travail. Je doute qu’il
1850 end de ce qu’on attend de ce travail. Je doute qu’ il soit de nature à légitimer l’énormité de l’effort qu’on demande à ces
1851 école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction civique sont insuf
1852 sont insuffisantes pour former le petit citoyen : il faut que l’enseignement tout entier soit occasion de développer les v
1853 enfants sur les bancs d’une salle d’école, vous n’ aurez rien qui ressemble en quoi que ce soit à aucun état social existant.
1854 sme. La culture de l’esprit démocratique telle qu’ elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise aut
1855 le qu’elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentiellement négative. Elle
1856 omprise autrement — est essentiellement négative. Elle consiste à persécuter ceux qui, en quelque manière que ce soit, voudr
1857 olaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’ eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant
1858 té que le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour
1859 le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous.
1860 ous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré qu’ils donnent une image mensongère de l’anc
1861 s d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré qu’ ils donnent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à l’usage du peupl
1862 ole publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu’il soit tout de nob
1863 est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu’ il soit tout de noblesse, de vertu et de grandeur. Mais on peut s’étonne
1864 et de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’ il n’est que ridicule et mesquinerie. Il y a là une préméditation de méd
1865 r de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez
1866 X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 su
1867 iver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie Z pour avoir trouvé
1868 Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie Z pour avoir trouvé : « 
1869 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie Z pour avoir trouvé : « Quant il neige, c’est comme des petits morceaux de vouate.
1870 a 3 sur 10 à Sylvie Z pour avoir trouvé : « Quant il neige, c’est comme des petits morceaux de vouate. » Il est évident qu
1871 ige, c’est comme des petits morceaux de vouate. » Il est évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où l’
1872 eut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un légalisme écœurant6,
1873 -thème, voire par d’ex-instituteurs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’amb
1874 rs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents,
1875 ents, ne laissent pas que d’être assez spéciales. Il arrive en effet que nos petits futurs grrrands citoyens ayant accompl
1876 en effet que nos petits futurs grrrands citoyens ayant accompli de « fortes études primaires et secondaires » (témoignage su
1877 rstition, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un co
1878 tion, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collè
1879 les bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de constater que la force et l’originalité de leur jugeme
1880 erse du nombre d’années d’instruction publique qu’ ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’inst
1881 du nombre d’années d’instruction publique qu’ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruct
1882 on publique qu’ils ont subies. Le dilemme J’ ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident qu’
1883 cette fois à démontrer, ce qui serait facile, qu’ ils constituent une inversion méthodique de toutes les lois divines et hu
1884 thode d’abâtardissement de la race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérivent nécessairement du fa
1885 École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être avantageux dans certains cas de soustraire l’enfant à l
83 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 4. L’illusion réformiste
1886 . L’illusion réformiste Bien entendu, tout cela a été dit. (Un peu autrement, j’en conviens.) On n’a pas attendu ma col
1887 été dit. (Un peu autrement, j’en conviens.) On n’ a pas attendu ma colère pour entreprendre ce travail de démolition. Il
1888 olère pour entreprendre ce travail de démolition. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir l’abondante littérature publ
1889 incipe de l’instruction publique. Les réformes qu’ ils ont proposées jusqu’ici sont en général judicieuses, dictées par le b
1890 pe de l’instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont en général judicieuses, dictées par le bon s
1891 es par le pédantisme inhérent à toute science. On a constaté que l’école actuelle est fondée sur une remarquable ignoranc
1892 chologie infantile. Où il y avait non-science, on a voulu apporter de la science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon
1893 oulu apporter de la science. Mais c’est un art qu’ il faudrait. Sinon l’on retombera dans des absurdités. On a créé par exe
1894 ait. Sinon l’on retombera dans des absurdités. On a créé par exemple des « jardins d’enfants » où l’on apprend à des élèv
1895 es noms des rues et places de leur ville, comme s’ ils étaient tous destinés à la profession de chauffeurs de taxi. Si cette
1896 de taxi. Si cette conception du pratique prévaut, il est à craindre que l’école nouvelle n’apporte bientôt sa méthode rati
1897 nt le meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spontanéité nécessair
1898 es exagérations ne sont pas bien graves, parce qu’ elles sont comiques précisément. Je ferai à l’école nouvelle un reproche d’
1899 l’école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend donner plus de liberté aux enfants en leur rendant le travail
1900 ant la possibilité de trouver par eux-mêmes ce qu’ ils doivent apprendre. Mais qu’est-ce qu’une liberté méthodiquement organ
1901 hodiquement organisée ? En réalité, cet amusement a pour seul but de faire avaler la pilule amère des connaissances. On s
1902 donne à ses ouvriers un second dimanche, afin qu’ ils consomment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec la souris. On
1903 et plus grave que la brutalité primaire, parce qu’ elle n’excite pas de réaction vive de la part des écoliers. Enfin, je n’ai
1904 pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’
1905 -citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins je soupçonne dans tous ces
1906 toute la personne était un enseignement, et qui n’ avait pas des élèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise le dévelop
1907 nce spirituelle. Qui sait ?… En attendant, puisqu’ il faut attendre, je salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur l
1908 dont les classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant
1909 les classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Cela me permet de leur faire remarquer d’autant plu
1910 e leur faire remarquer d’autant plus librement qu’ ils trahissent le dessein profond de l’instruction publique, qu’ils trahi
1911 le dessein profond de l’instruction publique, qu’ ils trahissent leur mission officielle. Ils éduquent de futurs anarchiste
1912 lique, qu’ils trahissent leur mission officielle. Ils éduquent de futurs anarchistes8, bravo ! Mais ce qu’on leur avait con
1913 e futurs anarchistes8, bravo ! Mais ce qu’on leur avait confié, c’était la fabrication en série de petits démocrates conscien
1914 sse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’ il progresse). L’école nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la
84 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 5. La machine à fabriquer des électeurs
1915 e. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et se perpétue ; de quel droit il nous écrase. La réponse es
1916 urquoi il triomphe et se perpétue ; de quel droit il nous écrase. La réponse est simple, terriblement simple : du droit de
1917 n publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles ont cru et embelli d’un même mouvement
1918 t sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles ont cru et embelli d’un même mouvement. Morigéner l’une c’est faire p
1919 s siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles ont cru et embelli d’un même mouvement. Morigéner l’une c’est faire pleur
1920 que dit l’une, c’est savoir ce que l’autre pense. Elles ne mourront qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’entend
1921 que l’autre pense. Elles ne mourront qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne me conteste pas c
1922 utre pense. Elles ne mourront qu’ensemble. Il n’y aura qu’une oraison. Laïque. J’entends qu’on ne me conteste pas cette thès
1923 . J’entends qu’on ne me conteste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquets officiels par des orateurs émus
1924 idéologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ ai l’honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à d
1925 uve correspondre à des faits patents et simples ; il serait vraiment dommage de priver ces Messieurs d’une aubaine pour eu
1926 a n’irait pas sans quelque indécence. Et d’abord, il faut pouvoir lire, écrire et compter pour suivre la campagne électora
1927 , voter et truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à q
1928 ique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite, il faut une discipline sévère dès l’enfance pour façonner des contribuab
1929 ur façonner des contribuables inoffensifs. Enfin, il faut un nombre considérable de leçons, et le plus longtemps possible,
1930 çons, et le plus longtemps possible, pour qu’on n’ ait pas le temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour qu’o
1931 re compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un
1932 lliard de façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embras
1933 s de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’ a embrassée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est a
1934 endu. Car dans ce monde-là « tout se paye » comme ils disent avec une satisfaction sordide et mal dissimulée. Certes, je ne
1935 s pas que les créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je les excuse pour a
1936 que les créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je les excuse pour auta
1937 tion publique aient eu pleine conscience de ce qu’ ils faisaient — et je les excuse pour autant10. Je dis simplement ceci :
1938 r autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’ a été possible que parce qu’elle était liée aux intérêts de la démocrat
1939 t ceci : leur œuvre n’a été possible que parce qu’ elle était liée aux intérêts de la démocratie. Car il faut bien se représe
1940 lle était liée aux intérêts de la démocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’était encore au xviiie siècle qu’
1941 la démocratie. Car il faut bien se représenter qu’ elle n’était encore au xviiie siècle qu’une utopie de partisans. Il ne se
1942 ore au xviiie siècle qu’une utopie de partisans. Il ne serait guère plus fou de proposer aujourd’hui qu’on répande univer
1943 u saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’ il ne manque à cette plaisanterie, pour prendre corps, que l’appui intér
1944 e notre instrument de progrès par excellence. Car il n’est qu’une explication vraisemblable de cette incurie : l’école, so
1945 emen et rendait des tommies. La machine scolaire, elle , dévore des enfants tout vifs et rend des citoyens à l’œil torve. Dur
1946 l’œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mécanique à quatre sous qui suff
1947 naturel explique que les autorités compétentes n’ aient point hésité à l’adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenan
1948 orme scolaire, politiquement, n’est pas rentable. Il est clair que si le but principal de l’instruction publique était d’é
1949 r l’heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais les go
1950 ape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ ils font. Tout se tient, comme vous dites, sans doute pour m’ôter l’envie
1951 peuple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ ils n’ont pas d’eux-mêmes une connaissance aussi sensible. Ils ignorent c
1952 e souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ ont pas d’eux-mêmes une connaissance aussi sensible. Ils ignorent ce qu’é
1953 pas d’eux-mêmes une connaissance aussi sensible. Ils ignorent ce qu’étiolent en eux les droits de l’homme. Mais attendez,
1954 attendez, si quelques-uns allaient se réveiller… Il suffit d’un peu de chaleur d’âme pour amorcer le dégel de ces princip
1955 être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’on
1956 e signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’on culbu
1957 où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens des images.) 9. J’emploie ce mot au sens fort,
1958 s enivrant, 100 %. Beaucoup de gens mourront sans avoir jamais soupçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à la fin du
1959 soupçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à la fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’un
1960 te. 10. Voir note A à la fin du cahier. 11. Est- il besoin de déclarer formellement qu’une telle attitude n’est en aucune
85 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 6. La trahison de l’instruction publique
1961 venons de le voir, son unique moyen de parvenir. Elle participe donc sur une vaste échelle à cette « Trahison des clercs »
1962 oque paiera cher ce crime contre la civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales, eh bien ! elle ap
1963 s qu’au péché contre les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché cont
1964 eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’ a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffi
1965 on c’est le péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’ il suffit d’un peu de bon sens et d’information pour jouer au prophète,
1966 cole prétend ouvertement nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée dans la mesure où elle réalise son ambition : soustrair
1967 . D’ailleurs elle y est obligée dans la mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Église et à la fami
1968 l’École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un danger pour le désordre établi. L’idéalisme est forcém
1969 st l’aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à développer tout ce qu’il y a de spécifiquement malfaisant dans
1970 alfaisant dans l’esprit moderne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’époque. Pauvre époque ! On parle sans ce
1971 uvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est vrai qu’elle est anormalement insatiable… Je crois qu’elle a surt
1972 n parle sans cesse de ses besoins. Il est vrai qu’ elle est anormalement insatiable… Je crois qu’elle a surtout besoin d’une
1973 qu’elle est anormalement insatiable… Je crois qu’ elle a surtout besoin d’une purge violente qui chasse ce ver solitaire du
1974 lle est anormalement insatiable… Je crois qu’elle a surtout besoin d’une purge violente qui chasse ce ver solitaire du ma
1975 e ce ver solitaire du matérialisme. Et quand on m’ aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à outra
1976 t précisément d’échapper à cette organisation. Or il semble bien que nous en soyons-là, s’il faut en croire les signes de
1977 ation. Or il semble bien que nous en soyons-là, s’ il faut en croire les signes de révolte qui apparaissent de toutes parts
1978 nne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’i
1979 sance de l’esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de l
1980 lles, l’habitude de l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en même temps que cette drogue, ell
1981 es journaux, mais en même temps que cette drogue, elle devrait fournir son contrepoison. Au contraire, elle prépare de consc
1982 e devrait fournir son contrepoison. Au contraire, elle prépare de consciencieuses poires, des esclaves du mot. Il est clair,
1983 e de consciencieuses poires, des esclaves du mot. Il est clair, par exemple, que seules les victimes de l’instruction helv
1984 r sans fou rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste établissement de travaux forcés.
1985 de travaux forcés. L’école donne à l’enfant ce qu’ il faut pour se résigner à l’état de citoyen bagnard auquel il est promi
1986 ur se résigner à l’état de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qui lui donnerait l’envie de se lib
1987 tat de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qui lui donnerait l’envie de se libérer — et peut-être le
1988 fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’ elle est cultivée par l’État), l’École, après avoir entraîné l’âme moderne
1989 qu’elle est cultivée par l’État), l’École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’y laisse c
1990 y enferme et l’y laisse crever de faim. Par ce qu’ elle enseigne à ignorer bien plus que par ce qu’elle enseigne à connaître,
1991 u’elle enseigne à ignorer bien plus que par ce qu’ elle enseigne à connaître, elle constitue la plus grande force antireligie
1992 ien plus que par ce qu’elle enseigne à connaître, elle constitue la plus grande force antireligieuse de ce temps. L’instruct
1993 Le pasteur sème dans un terrain que l’instituteur a méthodiquement desséché.
86 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 7. L’Instruction publique contre le progrès
1994 ublique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce
1995 qui a meilleure façon que le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de déclamatoire, de… journalis
1996 de… journalistique, de bedonnant creux, cela vous a un petit air démocratique, hé ! hé !… et d’ailleurs vous aimez les id
1997 euses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ ai peur que mon progrès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l
1998 ns une direction tout opposée. C’est très malin d’ avoir inventé un instrument de progrès : encore faut-il le mettre en marche
1999 ir inventé un instrument de progrès : encore faut- il le mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, m
2000 est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors n’ a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfl
2001 e de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris par cœur la réponse. Regardez un écolier préparer ses
2002 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’ aient appris par cœur la réponse. Regardez un écolier préparer ses devoirs,
2003 un écolier préparer ses devoirs, c’est frappant : il apprend les questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je tro
2004 es réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait p
2005 rt : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la sécurité d’un rég
2006 nu un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’ il ne fallait pas moins pour assurer la sécurité d’un régime établi dans
2007 ue est une puissance conservatrice. — Pas moins ! Elle est destinée à légitimer par la force de l’inertie et à perpétuer méc
2008 e réaction collaborent à leur manière au progrès, elles corrigent, stimulent, vivifient. L’École se contente d’être figée. Es
2009 ’instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier.
2010 l’anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup d’entre nous — encore que peu l’avouent. Car détru
2011 ecul humain. Par exemple, est-ce un progrès que d’ avoir remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fon
2012 z le dire, est un ramassis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs les consi
2013 s. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on m’ aura fait remarquer que la plupart des intellectuels sont convertis depuis
2014 depuis longtemps à ces idées antidémocratiques : il est temps qu’elles débordent ce cercle étroit et distingué. Il y a de
2015 s à ces idées antidémocratiques : il est temps qu’ elles débordent ce cercle étroit et distingué. Il y a de grands balayages à
2016 mportera toutes ces statistiques et ces journaux, il en restera toujours assez pour allumer des feux de joie, etc. Bon. Su
2017 our préparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai -je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui
2018 a notion de démocratie, vous trouvez bien vite qu’ elle repose sur des postulats rationalistes. En vérité, démocratie et rati
2019 ique, l’autre intellectuel, d’une même mentalité. Elle s’est développée au xviiie dans l’aristocratie qui n’y voyait qu’un
2020 ie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est deve
2021 descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et les sentime
2022 s empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans
2023 première tâche constitue un programme si riche qu’ il est superflu d’en formuler une seconde. Laissons ce soin, à des génér
2024 ne et de cette formidable expérience négative qui aura duré deux siècles au moins. L’évolution de l’humanité paraît conforme
2025 lui, calculables, chiffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien c’est qu’ell
2026 es, chiffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien c’est qu’elles sont déjà mo
2027 ue les existences particulières, ou bien c’est qu’ elles sont déjà mortes. Mais le temps vient où elles renaîtront à une vie n
2028 qu’elles sont déjà mortes. Mais le temps vient où elles renaîtront à une vie nouvelle et plus complète, à un degré supérieur
2029 rien de bien précis, on triomphe grossièrement. J’ aurais voulu vous voir demander à un sujet de Louis XIV ce qu’il concevait à
2030 vous voir demander à un sujet de Louis XIV ce qu’ il concevait à la place de la royauté absolue. Il eût fallu certes une i
2031 qu’il concevait à la place de la royauté absolue. Il eût fallu certes une imagination prodigieuse au dit sujet pour se rep
2032 il concevait à la place de la royauté absolue. Il eût fallu certes une imagination prodigieuse au dit sujet pour se représe
2033 seau, à la veille de la Révolution, soupçonnaient- ils que la république qu’ils appelaient serait livrée cent ans plus tard
2034 évolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ ils appelaient serait livrée cent ans plus tard à peine à la folie démocr
2035 rir. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’ a que de lointains rapports de parenté avec ce maigre descendant nommé
87 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Appendice. Utopie
2036 Utopie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassurer
2037 ilà bien ce que l’École empêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’homme. El
2038 y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens
2039 e punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait
2040 l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécanique. Bref, elle
2041 qui permettrait d’échapper à la mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les conséquences seront matérie
2042 e grandeur supérieure à la somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes les combin
2043 re à la somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes les combinaisons de vitesse e
2044 léments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes les combinaisons de vitesse et d’ennui à quoi présentem
2045 uction publique. Cela promet des grabuges inouïs. Il ne tient peut-être qu’à une forte équipe d’idéalistes pratiques d’en
2046 e d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces élites, et cela ne se
2047 uve être dans une certaine mesure un anarchiste s’ il défend son opinion de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de
2048 iste que j’aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou un amour) et qui s’y consacre. (Mais alors !… Je vois à v
2049 être qui ignore le réel. C’est justement parce qu’ il le connaît mieux qu’eux qu’il y a vu des fissures et des possibilités
2050 t celui qui ne se résigne à aucun état de choses. Il est pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avach
2051 Sans lui l’humanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que fa
2052 vachirait totalement. Mais il est dans l’ordre qu’ elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront les gens de b
2053 r l’esprit le plus dangereusement plat qui soit. ( Il est plus que plat : il est creux.) Si beaucoup de personnes répondent
2054 ereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : il est creux.) Si beaucoup de personnes répondent oui, cela finira par c
2055 nion. Et l’opinion publique mène le monde, paraît- il . À ce propos : que les journalistes s’engagent désormais à ne publier
2056 ne perce leur mépris pour l’instruction publique. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n’importe quoi, comme on s
2057 ur l’instruction publique. Ils peuvent dire ce qu’ ils veulent à propos de n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là
2058 ent à propos de n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là l’occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de
2059 à propos de n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là l’occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’
2060 d’invraisemblance de petites réformes. Mais j’en ai assez dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possibilit
2061 d’une réforme suffisante. C’est une révolution qu’ il faut. Alors, supprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les i
2062 terre ? Impossible. Le peuple qui déteste l’école a pourtant faim d’instruction15, et se croirait lésé dans un de ses dro
2063 ire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus gros obstacle
2064 Et c’est cela, préparer le terrain. D’autre part, il faut partir de ce qui est. Mais comment retourner contre l’ennemi ses
2065 es mortes. Une technique spirituelle. Et puis, qu’ il en fasse ce qu’il voudra. Les Orientaux appellent yoga cette culture
2066 hnique spirituelle. Et puis, qu’il en fasse ce qu’ il voudra. Les Orientaux appellent yoga cette culture des facultés physi
2067 tirait des conclusions immédiates, non seulement il serait sauvé du désastre, mais il recouvrerait la domination du monde
2068 , non seulement il serait sauvé du désastre, mais il recouvrerait la domination du monde16 et non plus en barbare cette fo
2069 nt à des exercices de contrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux Indes, je vous ju
2070 ussi pratique son yoga à lui : toutes les fois qu’ il veut obtenir une grande intensité avec un minimum de moyens. J’en cit
2071 . Le parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un geste identique, exécuté dans deux plans différents.
2072 bien dangereux et impopulaires. Tout comme ce qu’ ils désignent d’ailleurs. Tant mieux. Il y a beaucoup de gens qui ne peuv
2073 pensée au garde-à-vous durant quelques instants, il s’épargnerait de longs énervements. Il n’y a pas là de quoi se tordre
2074 instants, il s’épargnerait de longs énervements. Il n’y a pas là de quoi se tordre. Car tout cela nous donnerait des anné
2075 ts, il s’épargnerait de longs énervements. Il n’y a pas là de quoi se tordre. Car tout cela nous donnerait des années de
2076 la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’ il est très exagéré de dire que tout homme gagnerait à posséder une plus
2077 s atrophiées que devrait s’employer l’école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soi
2078 que devrait s’employer l’école. Nous avons vu qu’ elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que t
2079 éfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’ il soit bon que tous progressent de la même manière. Dans un système de
2080 se légitimeraient du même coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire la diversité des besoins individuels. Méditez un
2081 coup. La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’ elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’espri
2082 fera sans vous. Déjà revient le temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure,
2083 mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes e
2084 ries d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes et tout un arc-en-ciel de sentimen
2085 a force des choses et de l’Esprit, l’homme sera-t- il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse, 26 décembre 1928-10 janvi
2086 Areuse, 26 décembre 1928-10 janvier 1929.   NOTE A On est toujours tenté d’attribuer à ses adversaires des intentions no
2087 ns noires et consciemment criminelles. Ce travers a été développé jusqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les
2088 ue n’importe qui juge et contrôle n’importe quoi, il faut bien inventer des dessous pour redonner quelque saveur à ses jug
2089 e vous attaquez est pourtant un très brave homme, il fait partie du conseil de la paroisse, etc. » — Il semble qu’en attaq
2090 l fait partie du conseil de la paroisse, etc. » —  Il semble qu’en attaquant ses idées et leurs réalisations ont ait porté
2091 e qu’en attaquant ses idées et leurs réalisations ont ait porté atteinte à la dignité morale de ce M. Machin, membre du con
2092 ’en attaquant ses idées et leurs réalisations ont ait porté atteinte à la dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil
2093 pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais ils sont les premières victimes du système
2094 gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais ils sont les premières victimes du système qu’il propagent et qui les fai
2095 ais ils sont les premières victimes du système qu’ il propagent et qui les fait vivre. La question se complique dès que l’i
2096 ur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-ils dans la même mesure conscie
2097 action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont- ils dans la même mesure conscients des fins qu’on assigne à leur activité
2098 ace que dans un système religieux. Pour quiconque a une foi et la conscience de cette foi, il n’est d’enseignement vérita
2099 uiconque a une foi et la conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que religieux. Mais les questions conf
2100 issent ici que pour impressionner le public. Je n’ ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deux mots en effet,
2101 n effet, terrorisent à tel point les bourgeois qu’ ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous
2102 rgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés
2103 giques encore très actuels, du fait que l’école n’ a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant, s’il est
2104 puis. 16. On promet des confitures à l’enfant, s’ il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
88 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)
2105 vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici l’on meurt. Étoile de jour
2106 ù mieux qu’ici l’on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons glissent et rient c’est la caresse d
89 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
2107 Quand avec un air fin mais un ton convaincu l’on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois 
2108 triotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à se connaître et que cela n’a point stérilisé : sa nature, il
2109 rares qui ont réussi à se connaître et que cela n’ a point stérilisé : sa nature, il est vrai, s’y prêtait, peu complexe e
2110 ître et que cela n’a point stérilisé : sa nature, il est vrai, s’y prêtait, peu complexe et comme réduite à deux dimension
2111 it critique fort alerte. Jugez-en à la façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés avec son mérite »
2112 es succès, si disproportionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairv
2113 sproportionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulièr
2114 oportionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière,
2115 lairvoyance singulière, mes propres limites, et j’ ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’écono
2116 rvoyance singulière, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie
90 1929, Journal de Genève, articles (1926–1982). Panorama de Budapest (23 mai 1929)
2117 voix haute, aucune couleur vive. Les journaux qu’ ils lisent annoncent chaque jour quelque catastrophe imminente, une révol
2118 un coussin aux curieux dessins noirs et blancs : il représente l’ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond noir et port
2119 n cœur noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est
2120 auve s’élève la montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans le Danube, froide et nue, mais dans son
2121 ylles démodées… Rentrons dans la ville un soir qu’ elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gens qui vous ont reçu co
2122 trons dans la ville un soir qu’elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gens qui vous ont reçu comme un cadeau de Di
2123 Vous avez dîné au paprika chez des gens qui vous ont reçu comme un cadeau de Dieu, — c’est leur formule de salutation — vo
91 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
2124 re de poèmes est comme une initiation au silence. Il faut s’en approcher avec une douceur patiente, et le laisser créer en
2125 ilence particulier avant d’entendre les signes qu’ il nous propose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu d’images (à p
2126 sur la nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’ elle décrit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de l’esprit ou des
2127 ue dans le silence « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et l’âme peut enfin « saisir » dans
2128 nfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière : « Tout semblai
2129 réalité les choses dont elle s’est dégagée et qu’ elle voit dans une autre lumière : « Tout semblait vivre au fond d’un insi
2130 ntiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est- elle pas proprement « saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’a
92 1929, Articles divers (1924–1930). La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)
2131 tour de Hölderlin (15 juillet 1929)o « Je lui ai raconté qu’il habite une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort
2132 rlin (15 juillet 1929)o « Je lui ai raconté qu’ il habite une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort les portes ouv
2133 il habite une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’ il dort les portes ouvertes, et pendant des heures récite des odes grecq
2134 au murmure de l’eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, e
2135 esse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches s
2136 e de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches son
2137 urs touches sonnent encore, et c’est là-dessus qu’ il improvise, oh ! j’aimerais tant aller là-bas, cette folie m’apparaît
2138 rminant sa lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu at
2139 nant sa lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu atti
2140 les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin, mais il est plus diff
2141 lu attirer là-dessus l’attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendre par un sot que par un fou. 
2142 temps doit vouer l’attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui confinent peut-être à l
2143 d’entre nous se préparent à tenter le climat, — j’ avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sans doute assez pro
2144 gue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui l’ a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait
2145 connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il règne dans ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient le temps
2146 de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encore quelques cris brisés : « Ô vieux démon ! — je te rappell
2147 sse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où meurt Diotima, Hölderlin errant loin d
2148 moment où meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’ elle (dans la région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa f
2149 lin signe maintenant Scardanelli des quatrains qu’ il donne aux visiteurs venus pour contempler la victime d’un miracle. — 
2150 e. Il y a là une station de canots de louage où j’ ai vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à côté d’un « Hypérion ». E
2151 be, hauts et sombres, qui paraîtraient immenses s’ ils n’étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre. L’homm
2152 el. « Monsieur connaît Hölderlin ? — questionne-t- il , méfiant — bon, bon, parce qu’il y en a qui viennent, n’est-ce pas, i
2153 ? — questionne-t-il, méfiant — bon, bon, parce qu’ il y en a qui viennent, n’est-ce pas, ils ne savent pas trop qui c’était
2154 tionne-t-il, méfiant — bon, bon, parce qu’il y en a qui viennent, n’est-ce pas, ils ne savent pas trop qui c’était… Alors
2155 n, parce qu’il y en a qui viennent, n’est-ce pas, ils ne savent pas trop qui c’était… Alors vous devez connaître ces portra
2156 lus affreuses sur son compte, simplement parce qu’ il a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour les gens d’ici, aimer
2157 affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour les gens d’ici, aimer,
2158 e familièrement l’image d’une femme par le nom qu’ elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres ornées de cactu
2159 trempent… Tout est familier, paisible au soleil. Il passait des heures à cette fenêtre, à marmotter. Vingt-sept ans dans
2160 nd accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps
2161 a jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’ elles ont fui. Avril et mai et juin sont lointains, Je ne suis plus rie
2162 esse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avril et mai et juin sont lointains, Je ne suis plus rien, j
2163 ur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre côté de l’eau
2164 ie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’ a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais
2165 ux : « La perfection n’a pas de plainte »… Vivait- il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais le gardien : il y est comme
2166 e ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais le gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh ! répond-il, j
2167 ez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh ! répond- il , je pourrais aussi bien habiter la chambre. Il ne vient pas tant de v
2168 nd-il, je pourrais aussi bien habiter la chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Une rue étouff
2169 encontrent, qui montent au Séminaire protestant : il leur fait de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une gra
2170 Est-ce que tout cela existe dans le même monde ? ( Il est bon de poser parfois de ces grandes questions naïves.) Lui aussi
2171 rfois de ces grandes questions naïves.) Lui aussi a vécu dans cette ville, tout semblable à ces théologiens aux yeux voil
2172 rop courts, qui se promènent tout seuls… Et puis, il lui est arrivé quelque chose de terrible, où il a perdu son âme. Et p
2173 , il lui est arrivé quelque chose de terrible, où il a perdu son âme. Et puis il n’est revenu qu’un vieux corps radotant.
2174 l lui est arrivé quelque chose de terrible, où il a perdu son âme. Et puis il n’est revenu qu’un vieux corps radotant. — 
2175 chose de terrible, où il a perdu son âme. Et puis il n’est revenu qu’un vieux corps radotant. — Qu’en pensez-vous, bonnes
2176 rps radotant. — Qu’en pensez-vous, bonnes gens ?… Il a eu tort, sans doute. Tout le monde s’accorde à trouver malsain ce g
2177 radotant. — Qu’en pensez-vous, bonnes gens ?… Il a eu tort, sans doute. Tout le monde s’accorde à trouver malsain ce gen
2178 adotant. — Qu’en pensez-vous, bonnes gens ?… Il a eu tort, sans doute. Tout le monde s’accorde à trouver malsain ce genre
2179 ntreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de « bourgeois cultivés » à faire la bête dè
2180 de « bourgeois cultivés » à faire la bête dès qu’ il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je n
2181 ir de je ne sais quelle revanche du médiocre dont ils se sentent bénéficiaires. Ah ! vraiment les malins ! qui ont préféré
2182 ent bénéficiaires. Ah ! vraiment les malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on est mieux pour do
2183 es musiquettes et ces parfums de fleurs et d’eau… elle est tellement d’ailleurs… Faut-il donc que l’un des deux soit absurde
2184 urs et d’eau… elle est tellement d’ailleurs… Faut- il donc que l’un des deux soit absurde, de ces mondes à mes yeux soudain
2185 multanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’ elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle paraît ici bien établie, t
2186 est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle paraît ici bien établie, triomphante, à beau fixe. Pourquoi troubler
2187 ces âmes indulgentes à leur banalité ? Est-ce qu’ ils ne soupçonnent jamais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand l’a
2188 etite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse où ils ont cru pressentir de grandes choses généreuses autour d’eux… Cela s’
2189 e fièvre, — cette semaine de leur jeunesse où ils ont cru pressentir de grandes choses généreuses autour d’eux… Cela s’oubl
2190 ment, nous fait comprendre, dans le temps même qu’ il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que
2191 s le temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’ il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulgaire, par qu
2192 ttina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il était précepteur. Madame Gontard est la Diotima de l’Hypérion et des
93 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
2193 nnée dernière — un livre assez troublant et qu’on a trop peu remarqué —, Jean Cassou revient à son romantisme, à notre ch
2194 fait rencontrer des êtres bizarres avec lesquels il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gu
2195 des bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ ils ne s’en doutent… C’est un dévergondage sentimental, plein de malices
2196 e malices et d’envies de pleurer. Quel dommage qu’ il s’égare parfois dans les maisons des grands bourgeois, où tout, souda
2197 nge dans une atmosphère autre, où les personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet air dangereux e
2198 t tendre que prennent les hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux dernières pages du livre, u
2199 Ce serait un de ces miracles de liberté dont nous avons besoin pour croire que le monde actuel n’est pas un cas désespéré. Ma
94 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
2200 29)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’ il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la
2201 a tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’ il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie
2202 entative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie le
2203 voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’ il est bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour
2204 uiert l’œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’ il n’élargisse pas plus une question aussi centrale — qui est, si l’on v
2205 e à l’état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’est pas plus admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour le cath
95 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
2206 tion dans un débat où les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs de cett
2207 ébat où les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’ elles avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs de cette revue connaiss
2208 ù les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs de cette revue connaissent la t
2209 e me sens bien plus près de M. Gabriel Marcel, qu’ il attaque. (M. Benda trahit à son tour quand il tire argument contre un
2210 qu’il attaque. (M. Benda trahit à son tour quand il tire argument contre une thèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin
2211 e argument contre une thèse de M. Marcel de ce qu’ elle « mène loin… dans l’ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous
2212 vieux que le monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a un sophiste en M. Benda, un polémiste qu
2213 qui joue de la raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui n
2214 gênante que soit souvent son adresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer l’audace tranquille et admirable de son poin
2215 ble. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’ avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et qu
2216 e de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et quand bien même elle croira
2217 u’on lui demande l’impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de la pensée intempor
2218 impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de la pensée intemporelle, en butte aux s
2219 . Mais ces affirmations sont exactement celles qu’ il fallait attendre de ces auteurs. Ce qu’on ne viendra pas disputer à M
96 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
2220 une fois un jeune homme comme les autres. Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ailes. Allait-on s’émerveill
2221 inrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’aveugle-t- il  ? Veux-tu conserver, ô cruel, des ailes qui donnent des rhumes à ton
2222 ids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’état normal, q
2223 e. Mais à partir de ce jour, on lui fit sentir qu’ il était devenu beaucoup moins intéressant. ⁂ Celui qui a des ailes sera
2224 it devenu beaucoup moins intéressant. ⁂ Celui qui a des ailes sera persécuté à cause de ses ailes, mais celui qui n’en a
2225 rsécuté à cause de ses ailes, mais celui qui n’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas. Le libéralisme Seigneu
2226 , mais celui qui n’en a pas sera méprisé parce qu’ il n’en a pas. Le libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien co
2227 elui qui n’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas. Le libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes
2228 a pas. Le libéralisme Seigneur ! clamaient- ils , combien complexes sont les problèmes que vous proposez à notre bonne
2229 nt la Démocratie outragée, les autres disaient qu’ il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher le
2230 émocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les ques
2231 nt qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qui vous désarme. Craignant qu’on
2232 rti, l’ange trouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt la discu
2233 ouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’ il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt la discussion de repre
2234 ur la nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima l’héroïne, mai
2235 Il alla au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima l’héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, d
2236 voluptueux. Il aima l’héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une crèmerie pleine de couples à
2237 rie pleine de couples à la mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde assise près de lui. Ayant demandé un timbr
2238 il pensait à une femme blonde assise près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer l’attention de la femme blonde — sans
2239 l’attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit la lettre dans la première boîte v
2240 ettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher ami, mais bie
2241 enue. Le lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher ami, mais bien excusable de la part d’un poèt
2242 blonde. Je suis noire. Mais je sais qui c’est. J’ ai fait suivre. Alexandrine un jour m’a laissé entendre qu’elle vous aim
2243 ui c’est. J’ai fait suivre. Alexandrine un jour m’ a laissé entendre qu’elle vous aime. Elle attend votre lettre depuis de
2244 uivre. Alexandrine un jour m’a laissé entendre qu’ elle vous aime. Elle attend votre lettre depuis des mois. Je pense que ces
2245 ne un jour m’a laissé entendre qu’elle vous aime. Elle attend votre lettre depuis des mois. Je pense que ces lignes vous tro
97 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Avant-propos
2246 Avant-propos Le dire une bonne fois.   Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de
2247 r leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 exc
2248 eur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excel
2249 que, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’ il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est assez différent, moin
2250 ous un régime radical à sécrétion socialiste, qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformémen
2251 a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré leur mauvaise h
2252 âtres aboutit à l’instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’on va voir
2253 lle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes l
2254 utes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. —
2255 rit ne peut servir à rien. — Alors ? — Justement. Il est un reproche auquel je compte ne pas échapper : celui de naïveté.
2256 m’étant pas livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais q
2257 ile. Pourtant je sais qu’à droite comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être compli
2258 Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce que je dirai de
2259 isé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce que je dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh !
2260 sur ce que je dirai de plus beau… Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui s
2261 des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ ai encore deux mots à dire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute
2262 ent exagéré pour la jugeotte de l’adversaire ou s’ il traduit simplement cette mauvaise foi pas même consciente, cette lâch
2263 ts à néant ici même ; mais — gain de temps — je n’ aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du type : o
2264 temps — je n’aurai plus qu’à renvoyer aux lettres A ou B, selon. A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’époq
2265 ux qui croient aux faits. Je leur réponds : 1° qu’ ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuve
2266 ent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ ils ne peuvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réfor
2267 le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira
2268 les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules d
2269 és par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherc
98 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 1. Mes prisons
2270 1. Mes prisons Il existe des gens qui s’attendrissent sur leurs souvenirs de classe. C’
2271 ndrissent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment partici
2272 t participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de la tâc
2273 Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ «  il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces b
2274 quand il essaie de nous faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles
2275 roit… Et de ces beaux problèmes d’arithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du raisonnement, par une
2276 être qui s’énerve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait j
2277 ve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui vo
2278 l, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recommence à gratter
2279 qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’ il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les to
2280 ient trop de place dans notre enfance. À 5 ans, j’ avais appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée. L’année suivante, on m
2281 es acides, et naturellement, la phrase sacrée : «  Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans la suite, on se char
2282 ouleurs morales. Après six ans de ce régime, on m’ avait suffisamment rabroué pour que je ne montrasse plus aucune velléité d’
2283 garde contre moi-même à cause des autres desquels il ne fallait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau s
2284 comprendre avec enthousiasme que ces vérités-là n’ ont aucune importance.) Quant à l’autre « évidence » que je viens de cite
2285  » que je viens de citer, je découvris un jour qu’ elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un cert
2286 contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps pour m’habituer à cette idée. Je tenais ce
2287 en servir craignant peut-être des découvertes qui eussent ruiné trop de certitudes apprises. Enfin j’ouvris, c’est-à-dire que j
2288 être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère et étende ses
2289 aux vertueuses indignations de nos maîtres quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous éti
2290 ar les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent- ils assez de verdeur d’esprit pour qu’il pût se dégager de leur empire. M
2291 laissèrent-ils assez de verdeur d’esprit pour qu’ il pût se dégager de leur empire. Mais on avait brisé en nous ces ressor
2292 pour qu’il pût se dégager de leur empire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une pe
2293 i les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure e
2294 e dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions pl
2295 ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux
2296 aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’ avions plus de « superstitions grossières » comme celles qui touchent à l’ac
2297 ent à l’action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne
2298 s miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’ il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. O
2299 ait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’ avais trop souffert de cette compression morale pour, une fois matérielleme
2300 vré, en supporter longtemps encore l’action. Je n’ eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’esprit et ces
99 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 2. Description du monstre
2301 nnues d’anciens camarades d’école primaire. Comme ils avaient changé ! On s’entendait d’autant mieux qu’on était devenu plu
2302 s d’anciens camarades d’école primaire. Comme ils avaient changé ! On s’entendait d’autant mieux qu’on était devenu plus différ
2303 e je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’ avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Ri
2304 urs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’école. Rien ne ressemble plus à un bon é
2305 bon élève qu’un instituteur : de l’un à l’autre, il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’était qu’une que
2306 ève qu’un instituteur : de l’un à l’autre, il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’était qu’une question
2307 x dans un très grand nombre de cas, mais pourquoi ai -je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini
2308 que des hommes et son mépris pour les paysans. Qu’ il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’être
2309 ire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable, cela se voit de
2310 — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable, cela se voit de loin
2311 ir à une élite responsable, cela se voit de loin. Il faut dire que ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le pl
2312 faut dire que ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter
2313 n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles au
2314 happe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesse
2315 ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ ils étaient sensibles aux finesses de l’ironie paysanne. Mais je n’en dir
2316 eine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogi
2317 e maladresse professionnelle. J’en connais un qui avait coutume de dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien
2318 dire à une classe de garçons de 10 à 11 ans : « J’ ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous
2319 ue, pendant que nous en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est
2320 ue l’apport des instituteurs, ou bien préexiste-t- il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourge
2321 dans les principes mêmes de l’École, et attire-t- il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouc
2322 ouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont
2323 t ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moins aussi sympathiques que n’importe quelle autre classe de
2324 prit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’ il se manifeste dans l’école primaire est un véritable virus de mesquine
2325 e. Entrons, c’est pire encore. Beaucoup d’enfants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloch
2326 ui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodé
2327 ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’
100 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 3. Anatomie du monstre
2328 3. Anatomie du monstre Ayant épanché un peu de ma rancune, à seule fin de montrer pour quelles rai
2329 ne, à seule fin de montrer pour quelles raisons j’ ai entrepris de combattre l’instruction publique — on ne me contestera p
2330 ique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’ elles me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoig
2331 uisqu’elles me sont absolument personnelles et qu’ elles ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je
2332 elles me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fas
2333 ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse passer un petit examen aux principes de cette
2334 n passionnément détestée. Vous allez voir comment ils bafouillent leur « par cœur non compris ». Aux yeux de beaucoup de ge
2335 tient pour une bonne part à ce que ces personnes ont les yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’
2336 part à ce que ces personnes ont les yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une clairvoyance inté
2337 es. Il serait plus juste de dire que la passion n’ a qu’une clairvoyance intéressée : mais celle-là est la plus vive. Enfi
2338 pacifiste n’est pas toujours l’esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la
2339 se. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficulté dans l’avenir, d’une ou deux génér
2340 enir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec l’héritage de cinquante ans de radicali
2341 de réalisations pratiques. 3.a. Le programme a ) l’horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse
2342 e concentration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bien distinctes. On attribue à chac
2343 une vue aussi large que simplifiée. Remarquons qu’ il suffit pour établir ce programme de disposer d’une ou deux feuilles d
2344 ers rectangulaires, bien proprement). Évidemment, il est préférable de savoir aussi les noms des sciences élémentaires. Ma
2345 ir aussi les noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en aucune façon nécessaire de connaître la psychologie des enfa
2346 enfin des rythmes naturels de l’esprit humain, qu’ il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’actuelle division ho
2347 ’esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’ a point accordés à l’actuelle division horaire des journées… Monsieur,
2348 l’esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas. 3.b. Les examens Ce sont en principe des « co
2349 que trimestre. Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’étape. On obtient par ce moyen un peloton homogène, facil
2350 , la tricherie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies »
2351 s « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n’ a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « f
2352 plume de divers maîtres primaires et secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui
2353 ibre, car à la vérité ce n’est pas d’enseigner qu’ il s’agit, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’État, voyons d
2354 s esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’ avez -vous pas honte de vous faire rappeler sans cesse des vérités aussi él
2355 e ou deux autres bêtises de cette épaisseur, mais il faut reconnaître que jamais on n’avait songé à leur donner une extens
2356 aisseur, mais il faut reconnaître que jamais on n’ avait songé à leur donner une extension universelle et un caractère obligat
2357 ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne convient donc qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’éc
2358 ent. Elle ne convient donc qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’e
2359 régime des lumières et des compteurs à gaz. Mais ils se fâchent tout rouge quand on leur dit que la Suisse est caractérisé
2360 u’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne re
2361 à. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui soit de première main, rien qui soit authentiq
2362 soit de première main, rien qui soit authentique. Ils négligent toutes les particularités, toutes les « prises » où pourrai
2363 les « prises » où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or la va
2364 ls dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or la valeur éducative des choses n’apparaît qu’à celui qui
2365 raît qu’à celui qui entre en commerce intime avec elles . On apprend plus de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ai
2366 de deux que de mille, dit un sage oriental dont j’ ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut l
2367 ’est qu’on ne peut laisser aux élèves le temps qu’ il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés de gâcher l
2368 x élèves le temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ ils apprennent. Ils sont forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’a
2369 s qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’a qu’une valeur é
2370 nt forcés de gâcher leur travail. Or ce travail n’ a qu’une valeur éducatrice : s’il n’est pas modèle, il est absurde. Mai
2371 l. Or ce travail n’a qu’une valeur éducatrice : s’ il n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles
2372 qu’une valeur éducatrice : s’il n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles de ce qu’on nommait a
2373 otre conception pénitentiaire de l’école. Mais, s’ il est des disciplines qui renforcent, il en est d’autres qui amoindriss
2374 e. Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’autres qui amoindrissent. La discipline scolaire consiste à
2375 mmobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite le travail du maître. Il se peut. Tout dépen
2376 Il paraît que cela facilite le travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce travail. Je doute qu’il
2377 end de ce qu’on attend de ce travail. Je doute qu’ il soit de nature à légitimer l’énormité de l’effort qu’on demande à ces
2378 école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction civique sont insuf
2379 sont insuffisantes pour former le petit citoyen : il faut que l’enseignement tout entier soit occasion de développer les v
2380 enfants sur les bancs d’une salle d’école, vous n’ aurez rien qui ressemble en quoi que ce soit à aucun état social existant.
2381 sme. La culture de l’esprit démocratique telle qu’ elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise aut
2382 le qu’elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentiellement négative. Elle
2383 omprise autrement — est essentiellement négative. Elle consiste à persécuter ceux qui, en quelque manière que ce soit, voudr
2384 olaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’ eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant
2385 té que le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour
2386 le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous.
2387 ous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré qu’ils donnent une image mensongère de l’anc
2388 s d’histoire, dont il est aujourd’hui démontré qu’ ils donnent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à l’usage du peupl
2389 ole publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu’il soit tout de nob
2390 est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu’ il soit tout de noblesse, de vertu et de grandeur. Mais on peut s’étonne
2391 et de grandeur. Mais on peut s’étonner de voir qu’ il n’est que ridicule et mesquinerie. Il y a là une préméditation de méd
2392 de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez
2393 a, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 su
2394 iver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie pour avoir trouvé :
2395 Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie pour avoir trouvé : « Qu
2396 10 sur 10. Mais on donnera 3 sur 10 à Sylvie pour avoir trouvé : « Quand il neige, c’est comme des petits morceaux de vouate.
2397 era 3 sur 10 à Sylvie pour avoir trouvé : « Quand il neige, c’est comme des petits morceaux de vouate. » Il est évident qu
2398 ige, c’est comme des petits morceaux de vouate. » Il est évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où l’
2399 eut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un légalisme écoeurant 
2400 thèmes, voire par d’ex-instituteurs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’amb
2401 rs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents,
2402 ents, ne laissent pas que d’être assez spéciales. Il arrive en effet que nos petits futurs grands citoyens ayant accompli
2403 ve en effet que nos petits futurs grands citoyens ayant accompli de « fortes études primaires et secondaires » (témoignage su
2404 rstition, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un co
2405 tion, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collè
2406 les bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de constater que la force et l’originalité de leur jugeme
2407 erse du nombre d’années d’instruction publique qu’ ils ont subies. 3.h. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l
2408 du nombre d’années d’instruction publique qu’ils ont subies. 3.h. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’ins
2409 blique qu’ils ont subies. 3.h. Le dilemme J’ ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident qu’
2410 cette fois à démontrer, ce qui serait facile, qu’ ils constituent une inversion méthodique de toutes les lois divines et hu
2411 éthode d’abâtardissement du peuple. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérivent nécessairement du fa
2412 ité et au vice. » L’école de demain, page 12. 5. Il est peut-être avantageux dans certains cas de soustraire l’enfant à l