(1985) Articles divers (1982-1985) « Réponses à des questions de Marcel Proust et de Michel Moret (1983) » p. 1

Réponses à des questions de Marcel Proust et de Michel Moret (1983)q

Qui auriez-vous aimé être ?

Moi, mais pleinement réalisé.

Le principal trait de votre caractère ?

L’alternance admiration-indignation, moteur de tous mes écrits.

La qualité préférée chez vos semblables ?

La capacité d’amitié.

Croyez-vous au hasard ?

Oui, quand il fait bien les choses.

Croyez-vous, comme Rousseau, que l’homme naît bon et que la société le rend mauvais ?

L’homme naît orienté par ses gènes et par son milieu. La société est le résultat global des réussites et des échecs de ses efforts pour se rendre meilleur, ou plus puissant, ou plus libre, c’est-à-dire plus fidèle aux ordres de sa vocation unique.

Pensez-vous que l’homme soit capable de progrès moral ?

Je ne sais. Je le souhaite. C’est le vrai sens de toute vie.

Estimez-vous que, dans le monde, les libertés individuelles sont en progression ?

Personne ne dispose des moyens de répondre à cette question.

Si le Christ revenait sur terre et plus précisément en Suisse, pensez-vous que notre justice le condamnerait ?

Oui, comme objecteur de conscience (« Présenter l’autre joue », non-violence absolue).

La plus noble conquête de l’homme ?

Sa liberté, c’est-à-dire le pouvoir qu’il prend non sur autrui mais sur soi-même.

La réforme que vous admirez le plus ?

La christianisation jamais achevée des Églises chrétiennes, de Luther et Calvin à Vatican II : même combat !

La réforme qui vous causerait le plus grand plaisir ?

Celle des concepts occidentaux de travail et de loisir, finalement le passage du fric au troc.

Votre personnage historique préféré ?

Je dirais Guillaume Tell, s’il était « historique ».

Vos musiciens préférés ?

Monteverdi, Bach, Mozart et Arthur Honegger.

Vos écrivains préférés ?

Isaïe mais aussi Eschyle, Béroul et Bernard de Ventadour. Pascal mais aussi Voltaire. Goethe mais aussi Hölderlin. Kierkegaard mais aussi Rimbaud. Puis : Valéry, Rilke, Léon-Paul Fargue, Claudel, T. S. Eliot et Saint-John Perse.

Le don de la nature que vous aimeriez avoir ?

Une santé qui puisse résister à pas mal d’excès.