Jacques Benoist-Méchin, Histoire de l’armée allemande depuis l’armistice (mars 1937)ae
Ce livre eût passionné Lénine, grand lecteur, comme on sait, de Clausewitz. Il passionnera d’ailleurs tous ceux qui cherchent à connaître l’état réel des forces dans le monde présent. Qu’on n’aille pas se figurer qu’il s’agit d’un bouquin d’érudition ou d’un traité classique d’officier▶ en retraite. C’est toute l’histoire de la première révolution allemande (1918-1919) qui se recompose autour de l’aventure du GQG prussien, au lendemain de l’armistice. La thèse de l’auteur paraît aussi solide qu’inattendue : si l’Allemagne ne s’est pas défaite en vingt morceaux, si la révolte spartakiste a pu être étouffée en quelques semaines, c’est uniquement le fait d’initiatives follement risquées par quelques ◀officiers du grand état-major. Du point de vue de la tactique révolutionnaire et contre-révolutionnaire, je ne connais pas d’ouvrage plus riche et plus précis, sinon les mémoires de Trotski.
Deux personnages retiendront particulièrement l’attention : le colonel Maercker, fondateur des fameux corps francs qui réduisirent les révoltes ouvrières et séparatistes, — et Noske, commissaire du peuple devenu ministre de la Guerre, figure classique du marxiste au pouvoir, de « l’homme à poigne » touché par la grâce nationale, et qui se charge d’écraser la révolution avec une brutalité qu’aucun bourgeois ne se serait permise. Avis à ceux de Saint-Denis ! Noske, Mussolini, Doriot, Staline ont plus d’un trait commun, quoi qu’ils en pensent.