(1970) {Title} « « Né d’un regard juste… » (à propos de Richard Coudenhove-Kalergi) (2 septembre 1962) » p. 1

« Né d’un regard juste… » (à propos de Richard Coudenhove-Kalergi) (2 septembre 1962)a

Né d’un regard juste — vertu majeure du bouddhisme — posé sur les réalités du monde occidental, le mouvement paneuropéen a été l’expression directe et immédiate d’une pensée politique qui se distingue de toute autre, en ce siècle, par un alliage unique de clarté et d’imagination : la pensée de Richard Coudenhove-Kalergi.

Réalités délimitées et situées d’emblée avec une belle lucidité qui soudain les rendait évidentes : l’Europe de l’Ouest, la Grande-Bretagne, l’URSS, et les USA. C’était en 1922, soulignons-le. Peu d’hommes, en ce temps-là, partageaient l’Occident selon ces lignes de force traditionnelles qui se sont de nos jours manifestées comme lignes du destin de la politique mondiale. Churchill parfois s’en est souvenu — relisez son discours de Zurich sur l’Europe.

Clarté de l’exposé et parfaite liberté de l’imagination : voilà ce qui donne à la parole de Coudenhove ce pouvoir convaincant dont tous les militants de l’Europe unie peuvent témoigner.

Je sais bien que les adversaires de cette union, et les politiciens aux courtes ruses, ont cru pouvoir taxer cette clarté de simplisme, et cette libre imagination d’utopie. Mais leur culte opportuniste des complications d’experts ne menait à rien, sinon aux catastrophes que l’on sait ; et l’Europe est en train de s’unir. Une utopie qui réussit prouve par là même qu’elle n’en était pas une.

Encore fallait-il l’énoncer. Elle ne se serait jamais réalisée si personne ne l’avait dressée comme un but simple et grand devant nos volontés.

Nous sommes tout près de ce but que Coudenhove fut le premier du siècle à désigner clairement. Mais il sait que ce n’est qu’une étape nécessaire. L’Occident tout entier, qu’il nous faut exiger, domine aujourd’hui la vision de « l’idéaliste pratique » que Coudenhove n’a jamais cessé d’être, et qui sera devant l’Histoire son plus beau titre.